Actualités, enquêtes à Lyon et dans la région

Végétalisation VS piétonnisation : la bataille Collomb/Kimelfeld passe par la Presqu’île

Nouvel épisode de la bataille entre le maire de Lyon et le président de la Métropole. Toujours sur la thématique écolo. Cette fois-ci, c’est la Presqu’île qui est concernée. Gérard Collomb annonce une végétalisation. Moins d’une semaine après, David Kimelfeld lance une expérimentation autour de la piétonnisation de l’hypercentre. L’air de la campagne en centre-ville, en somme.

Cet article est en accès libre. Pour soutenir Rue89Lyon, abonnez-vous.

La végétalisation proposée par Gérard Collomb. Images du dossier de presse

La végétalisation de la Presqu’île selon Gérard Collomb

Des pots de fleurs sur les voies de bus. C’est le projet « Presqu’île nature » proposé par le maire Gérard Collomb le 6 juin dernier pour la rue Edouard Herriot et la rue de Brest. Le but, à en croire le dossier de presse :

« végétaliser le cœur de ville et ainsi créer des îlots de fraicheur et des espaces de convivialité » pour créer « une trame verte » entre la place des Terreaux et la place Bellecour ».

La végétalisation proposée par Gérard Collomb. Images du dossier de presse

Mais où sont les vélos sur ces modélisations ? Et les bus ? Ils devront partager avec les voitures la voie restante.

Les automobiles ne seront pas impactées par le projet, avec seulement 24 places de stationnement supprimées sur les 180 existantes. L’objectif affiché est pourtant bien la lutte contre le réchauffement climatique, avec des massifs de fleurs « éco-responsables » garnis de « plantes de saison ».

Lors de la conférence de presse pour présenter sa « végétalisation du cœur de ville », Gérard Collomb s’était amusé que « beaucoup de gens » s’intéressent aux enjeux environnementaux comme le rapporte Lyon Capitale.

Et c’est peu de le dire. Aux dernières élections européennes, la liste EELV menée par Yannick Jadot est arrivée en tête dans le 1er arrondissement avec près de 30% des suffrages exprimés. Un engouement pour l’écologie que les élus locaux ont pu également constater dans la rue, avec les différentes Marches pour le climat qui ont rassemblé plusieurs dizaines de milliers de personnes depuis septembre dernier.

L’expérimentation de végétalisation de Gérard Collomb, qui sera présentée le 1er juillet au conseil municipal, devrait commencer en septembre 2019 et s’étaler sur 18 mois. Jusqu’au 28 juin, les citoyens et acteurs locaux pourront donner leur avis sur la plateforme Civocracy. Dans la foulée, le maire de Lyon a également annoncé la candidature de Lyon au titre de capitale verte de l’Europe pour 2022.

Bad buzz pour le maire de Lyon

Sur les réseaux sociaux, ce projet de végétalisation a suscité l’indignation voire la colère de nombreuses personnes.

La Ville à Vélo, association qui promeut le vélo à Lyon, a vivement réagi sur Twitter, dénonçant un projet qui fait la part belle aux voitures au détriment des modes doux.

Le coprésident de l’association, Fabien Bagnon, a d’ailleurs interpellé la présidente du Sytral pour défendre auprès de Gérard Collomb la place des vélos et des transports en commun.

Greenpeace Lyon a également rejeté le projet, pointant au passage la qualité de l’air à Lyon qui avait fait l’objet d’une action de leur part le 24 mars dernier.

Des internautes ont habilement détourné la végétalisation de Gérard Collomb, pour présenter un contre-projet au profit des modes doux.

La piétonnisation de l’hypercentre à la mode David Kimelfeld

Une petite semaine après Gérard Collomb, le président de la Métropole a présenté ce mercredi 12 juin son propre projet, la piétonnisation de la Presqu’île. Dans sa communication, David Kimelfeld se voulait plus offensif :

« Le statu-quo n’est plus possible, le moment est venu d’avancer. De nombreux centre-villes ont été rendus piétons et apaisés à travers le monde. Lyon et d’autres villes de la Métropole doivent inventer un nouveau modèle de centre-ville ! »

A l’instar d’autres villes européennes (Oslo, Ljubjana), le but est de diminuer peu à peu la part des voitures dans les centres-villes.

Pour ce faire, le projet de piétonnisation prévoit l’instauration de Zones à trafic limité (ZTL) où seules certaines catégories de véhicules pourront être autorisées à circuler, avec un stationnement qui reste possible du Nord de la place Bellecour au Sud de la Place des Terreaux. Des zones similaires sont actuellement en cours d’expérimentation à Nantes.

A Lyon, la concertation démarrera par une réunion publique le 9 juillet prochain, suivie par une première ZTL le 21 septembre, puis une fois par mois pendant six mois, jusqu’à la fin de l’expérience en janvier 2020.

Des aires piétonnes, interdites aux véhicules sauf livraisons, transports en commun et d’urgence, et dans lesquelles le stationnement est interdit, sont également au programme. Les trottoirs seront alors supprimés, les chaussées végétalisées et garnies de mobilier urbain. Il faudra cependant attendre septembre 2021 pour les voir.

Les associations écolos applaudissent Kimelfeld

Même si le projet du président de la Métropole reste timide comparé aux mesures de péages urbains, de larges pistes cyclables séparées des voitures ou encore de transports gratuits que l’on trouve dans certaines villes européennes, il a été salué par les principales associations écologistes.

Dans un communiqué de presse commun, différentes associations et collectifs engagés pour le climat (Coalition Climat Rhône, Alternatiba/ANV Rhône, Greenpeace, L’écoclicot, La Ville à Vélo…) ont averti que ces petits pas écolos étaient encore insuffisants et qu’ils ne leur faisaient pas oublier d’autres dossiers :

« Les enjeux climatiques ne sont pas compatibles avec les enjeux électoralistes comme nous le rappellent les aberrations autour du projet végétalisation présenté par Gérard Collomb, maire de Lyon il y a quelques jours et nécessitent une véritable stratégie globale, incompatible avec le financement de grands projets comme par exemple celui de l’Anneau Des Sciences.« 

Ils ont également prévenu qu’ils suivraient l’affaire de près :

« Les différents collectifs et le Mouvement climat resteront vigilants au modèle de ville promu par la Métropole de Lyon et seront présents à la première date de concertation le 9 juillet prochain. »

Gérard Collomb silencieux et « juxtaposition de calendriers »

Après l’annonce de ce projet de piétonnisation qui tranche avec la végétalisation de Gérard Collomb, la réaction de ce dernier était attendue. D’autant plus que la décision de piétonnisation de la Métropole a été prise indépendamment de la Ville de Lyon. Jean-Yves Sécheresse, adjoint à la sécurité et fidèle de Gérard Collomb interrogé par Le Progrès, évoque « une certaine inélégance » dans cette manière de faire, qu’il va jusqu’à qualifier d’ »irresponsable ».

Pour le moment, le maire de Lyon est resté silencieux.

Du côté de l’entourage de David Kimelfeld, on nous assure que la présentation du projet de la Métropole pour la Presqu’île une semaine après les annonces de Gérard Collomb n’était qu’une « juxtaposition de calendriers », sous-entendant que c’est certainement le maire de Lyon qui a voulu doubler le président de la Métropole puisque de dernier avait évoqué la piétonnisation dans un entretien à l’hebdo Tribune de Lyon le 29 mai dernier.

A la Métropole, on fait mine de vouloir calmer les esprits. Car, évidemment, pour mener à bien cette piétonnisation, il faudra la coopération de la mairie.

Certes la Métropole est compétente en matière de voirie mais la Presqu’île est sur le territoire de Lyon et fermer des voies de circulation risque de mobiliser la police municipale dont la compétence revient à la Ville de Lyon.

On attend de voir les expérimentations, la veille des élections de mars 2020. Un hasard du calendrier, certainement.


#Anneau des sciences

Activez les notifications pour être alerté des nouveaux articles publiés en lien avec ce sujet.

Voir tous les articles

À lire ensuite


Photo : MG/Rue89Lyon

Partager
Plus d'options
Quitter la version mobile