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Traboulotte, la coopérative des livreurs à vélo pour contrer les géants de la « foodtech »

À Lyon, des livreurs à vélo travaillant (dans de mauvaises conditions) pour Deliveroo ou encore Uber Eats ont monté une coopérative nommée Traboulotte. À terme, ils et elles espèrent pouvoir délaisser ces géants de la « foodtech » et travailler dignement. Vendredi matin, Amélie est déjà sur son vélo. La veille, cette jeune livreuse de 26 ans, …

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Gaëlle (à gauche) et Amélie, les deux fondatrices de Traboulotte. © Aurélien Defer

À Lyon, des livreurs à vélo travaillant (dans de mauvaises conditions) pour Deliveroo ou encore Uber Eats ont monté une coopérative nommée Traboulotte. À terme, ils et elles espèrent pouvoir délaisser ces géants de la « foodtech » et travailler dignement.

Vendredi matin, Amélie est déjà sur son vélo. La veille, cette jeune livreuse de 26 ans, passionnée de bicyclette, a travaillé quatre heures et demie pour Deliveroo. Son casque jaune fluo solidement attaché sur la tête, elle a sillonné la ville, allant de restaurant en client et de client en restaurant :

«Pour quatre heures et demie, j’ai été payée 53 euros, raconte-t-elle. Et après, il faut enlever les cotisations à l’Urssaf, soit 23%.»

On se retrouve cours Vitton. Gaëlle, une amie d’Amélie, est cheffe de cuisine dans un des restaurants de la rue. Ensemble, elles ont lancé lundi 1er octobre une coopérative de livreurs à vélo du nom de Traboulotte.

« C’est un système de livraison de repas plus éthique et plus égalitaire pour les livreurs mais aussi les clients et les restaurateurs », explique Gaëlle.

Les deux Lyonnaises pointent du doigt le fonctionnement des sociétés de livraison comme Deliveroo et Uber Eats, pour ne citer que les deux plus grosses sur le marché français. Système de rémunération à la course, protections santé faibles ou inexistantes, rythme de travail intensif… Être coursier à vélo ne fait pas rêver. Et c’est sur ces points que Gaëlle, Amélie et la trentaine de membres de la coopérative Traboulotte souhaitent travailler.

La coopérative Traboulotte, à mi-chemin entre association et entreprise

Pour l’instant, Traboulotte possède un statut d’«association de préfiguration» de coopérative.

«On dit que c’est une coopérative parce que ça fonctionne pareil mais il faut au minimum deux CDI pour être une coopérative. Or, on est pour l’instant tous bénévoles», note Gaëlle.

Les deux fondatrices espèrent pouvoir rapidement travailler à temps plein pour Traboulotte. 

Gaëlle (à gauche) et Amélie, les deux fondatrices de Traboulotte. © Aurélien Defer/Rue89Lyon

Le principe de cette coopérative est simple mais il faut d’abord comprendre le statut de micro-entrepreneur qu’ont (presque) tous les livreurs à vélo. Prenons l’exemple d’un livreur Deliveroo.

En réalité, il n’est pas employé par l’entreprise Deliveroo, c’est-à-dire qu’il n’est pas salarié et qu’il peut donc travailler pour plusieurs entreprises concurrentes. En partant de ce principe, Amélie, n’est donc pas vraiment liée à Deliveroo et est en droit de monter un projet concurrent.

Or pour fonctionner, Traboulotte a besoin d’une plateforme de commande en ligne qui met en lien clients, restaurateurs et livreurs. C’est là qu’intervient Coopcyle, un logiciel libre lancé en 2017 par Alexandre Segura, développeur parisien. Grâce à cette plate-forme, les livreurs sont prévenus lorsqu’une commande est effectuée par un client dans un des six restaurants partenaires de Traboulotte et peuvent alors se mettre en selle. 

À la (grande) différence que « Coopcyle prend moins de 5% de nos revenus pour payer les développeurs, nous aider avec les contrats si besoin, etc.», explique Amélie. Soit bien moins qu’une société comme Uber qui « prend 25% du montant d’une course qu’elle choisit et emmène les livreurs dans des restaurants non-vérifiés et parfois menaçants », ajoute la cofondatrice de Traboulotte.

« Que Deliveroo nous donne un CDI ! »

Traboulotte n’est pas la seule coopérative de livreurs en France. Depuis deux ans, des modèles participatifs similaires se sont créés dans plusieurs villes et ont largement inspiré Gaëlle et Amélie.

D’ailleurs, si Amélie a décidé de s’engager pour les livreurs à vélo, c’est parce qu’elle a vu leurs (et donc ses) conditions de travail se dégrader depuis deux ans et demi. Quand elle a commencé à Foodora, elle était payée à l’heure et non pas à la course. Mais en août, la société allemande a décidé de fermer sa filiale française.

Contrainte de se retourner vers Deliveroo, Amélie n’est aujourd’hui pas du tout satisfaite de ses conditions de travail, tant pour la rémunération que pour les relations avec les restaurants.

«Aujourd’hui, on aimerait revenir à la qualité de service qu’on avait il y a deux ans, quand tout ça a commencé», déplore-t-elle.

D’ailleurs, elle ne le cache pas :

«À terme, je voudrais quitter Deliveroo. S’ils veulent qu’on arrête Traboulotte, qu’ils nous donnent des CDI !», ironise-t-elle.

Mais au-delà de la sécurité de l’emploi, Amélie et Gaëlle souhaitent également revenir à des valeurs qui leur sont fondamentales : «qualité, transparence, production locale», etc. Traboulotte doit maintenant aller vers les restaurants et établir avec eux des partenariats sur la livraison. Pour l’instant, les deux amies débutent avec six restaurants et « dansent dans la cuisine dès qu’il y a une commande qui sonne ».


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Photo : DR

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