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Une journée avec les lecteurs de la bibliothèque mobile du Tonkin, à Villeurbanne

Au début de l’été s’est tenue la dernière séance de Bib d’HLM, opération socioculturelle au quartier du Tonkin à Villeurbanne, juste avant sa pause estivale. La clôture de cette saison a été l’occasion pour le Lyon Bondy Blog de se rendre sur place afin d’en faire un bilan, en interrogeant notamment Patricia Portier, une des instigatrices du projet.

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Une journée avec les lecteurs de la bibliothèque mobile du Tonkin, à Villeurbanne

Bib d’HLM est l’acronyme de « bibliothèque  hors les murs », un projet ayant pu voir le jour il y a 9 ans du fait d’une collaboration aboutie entre le centre social de Charpennes-Tonkin et la bibliothèque municipale du Tonkin.

L’idée ? Se poser dans un endroit du quartier alentour avec des livres pour offrir un temps de détente aux enfants. L’intérêt est de faire venir la bibliothèque et son univers à ceux qui n’y viennent pas forcément.

Patricia Portier, conteuse et référente de la biblichaussette (la bibliothèque pour petits du centre-social), définit ce moment comme une « action de vie ».

Après réorientation d’un financement du centre social, le projet imaginé avait ainsi pu voir le jour. L’équipe de Bib d’HLM est toujours composée de trois personnes ; une représentante de biblichaussette, une représentante de la bibliothèque du Tonkin et un représentant du club pré-ado du centre social.

Le projet est appuyé par le SLEA (société lyonnaise pour l’enfance et l’adolescence), par la maison du service public de Villeurbanne, et par la mairie de Villeurbanne. L’action se focalise dans deux lieux du quartier en particulier, à savoir aux Samouraïs et aux Terrasses.

Un triporteur dans les allées des quartiers du Tonkin

Tous les mercredis, c’est le même rituel : Patricia sort l’emblématique vélo triporteur à la caisse remplis de livres, des tapis sont installés le long de l’allée des Terrasses. Le lieu est situé en face du centre social de Charpennes-Tonkin, il suffit de traverser la rue de Bât Yam et de passer une petite arche pour y accéder.

Le lieu des Terrasses dispose de douze entrées ce qui en fait un espace ouvert sur le reste du quartier. Les rangées d’immeubles se succèdent dans une enfilade de petites cours, parfois entourées d’espaces verts.

Ce jour-là, Patricia parcourt les allées du bas d’immeubles en sonnant la cloche annonciatrice tandis que Jérôme Jaboulet peaufine l’installation.

Pour cette dernière séance, une bibliothèque entourée de hamacs est inaugurée. Celle-ci a donc tôt fait d’attirer la curiosité des habitants des Terrasses. La petite équipe est bientôt rejointe par les bibliothécaires du Tonkin, Christelle Hannedouche et Violette Palfroy, accompagnées de Laurine, une stagiaire. Comme à chaque séance de fin de saison, les jeux d’extérieurs sont sortis à côté des traditionnelles caisses de livres.

Le triporteur Bib d’HLM. ©Blandine Lavignon / LBB

« Donner envie sans obliger »

La bibliothèque du Tonkin mobilise parfois aussi des applications sur tablette numérique où l’histoire du livre est animée de manière interactive par l’enfant. Les bibliothécaires présentes voient cela comme un support plus attractif « pour intéresser à la lecture » :

« Cela participe d’une volonté de modernisation de la bibliothèque ».

Patricia explique que l’essence de Bib d’HLM est de « donner envie sans obliger ». Lors de cette dernière séance, chaque enfant est autonome : certains enfants lisent des livres près des hamacs, d’autres discutent à l’ombre un peu plus loin, et certains enfin s’amusent avec les animateurs ou essaient les jeux.

La plupart des enfants, majoritairement âgés de 9 à 15 ans, sont des habitués. Ils sont inscrits pour la plupart dans l’un des clubs du centre social Charpennes-Tonkin. Ainsi, ils ont pu connaître Patricia à la « biblichaussette », qui accueille dans une atmosphère feutrée les tous petits du centre. Ils s’y déplacent uniquement en chaussettes, d’où le surnom donné à cet espace voulu familial.

Cette petite bibliothèque est définit par Patricia comme “un lieu de médiation socio-culturelle, un éveil à l’évasion”.

Le but de bib d’HLM est aussi de permettre la connaissance des missions et activités proposées par le centre social. Le projet constitue la première marche avant une éventuelle entrée dans la structure. Le responsable du club pré-ado du centre social, Rudy Chauvet, est par ailleurs présent. Patricia insiste sur l’intérêt d’une expérience hors les murs :

« Cela permet de mettre en vie le livre, et plus important, de faire comprendre aux enfants qu’on croit en eux ».

« Les hamacs avec les livres, c’est un bon concept »

L’atmosphère détendue entre animateurs et habitants du quartier semble démontrer l’intérêt d’aller directement à la rencontre des habitants.

Jihane, venue avec des amies, nous raconte :

“C’est bien de mettre des hamacs avec les livres, c’est un bon concept, comme ça on peut tous jouer, on peut passer un bon moment avec beaucoup de personnes, et on peut apprendre à se connaître.”

Alia, qui se rend chaque mercredi aux évènements Bib d’HLM, ajoute :

“Il y a une bonne ambiance, on peut rigoler, il y a beaucoup de choses on peut lire, on peut se reposer, on peut prendre du soleil sur nous, on peut faire plein de choses ici, on s’amuse, on connait des gens”.

Le témoignage complet d’Alia et Jihane est disponible à l’écoute ci-après :

Ainsi installé pendant environ deux heures, les équipes s’activent pour donner le goût de la lecture aux enfants. Si le livre est le support, le projet se veut avant tout porteur de lien. Des parents sont également au rendez-vous.

Patricia compare cela à une « mini agora », lieu où le dialogue autour de la vie publique revêt une importance toute particulière. L’idée du triporteur semble prendre tout son sens : il permet la mise en place d’un événement à l’extérieur, l’espace ne se limite alors plus à la structure qui en a l’initiative.

Pour Patricia il s’agit  d’une « appropriation de l’espace public », éphémère mais qui permet « une approche différente de l’action sociale ».

Cela n’empêche pas que les livres proposés aux enfants soient sélectionnés attentivement ; le livre doit pouvoir amener à la discussion. Découverte au Canada par l’équipe, la collection « coup de poing », par exemple, figure dans la caisse du triporteur.

« On ne peut pas nous dire d’arrêter là après tout ce qu’on a construit en 9 ans »

Lecture au quartier des Terrasses à Villeurbanne ©Blandine Lavignon/LBB

Même si au total, une centaine de nouveaux enfants a participé au projet lors de la dernière saison, cette après-midi masque une réalité plus compliquée quant à la pérennité du projet.

En effet, si le projet reste dépendant des aléas météorologiques, il l’est également et davantage encore des subsides et des possibilités de financement. Bien que le projet en lui-même soit soutenu, les institutions qui le conditionnent ont subi des coupes budgétaires dues à la baisse générale des subventions publiques.

Le centre social de Charpennes-Tonkin avait déjà vu son budget baisser entre 2016 et 2017, de par une baisse de 6 % des crédits alloués par la Métropole de Lyon.

Patricia explique :

« Le culturel et le social sont deux secteurs de financement compliqués, on nous demande de faire plus avec moins. Mais cela prend du temps de créer du lien, on ne peut pas raisonner en termes d’efficacité directement. Cela ne marche pas comme ça, on ne peut pas dire à quelqu’un qu’on s’arrête là après tout ce qu’on a construit en 9 ans, parce qu’il n’y a plus de financement ».

Le triporteur de Bib d’HLM roulera en septembre pour une nouvelle année, avec l’idée que la détermination de ses acteurs devrait permettre un équilibre entre moyens alloués et efficacité de l’action.


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Photo : Damien Mounia / Lyon Bondy Blog

Photo : Guillaume Bernard/Rue89Lyon

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