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Maîtrise des dépenses : la Métropole de Lyon à la sauce Macron… à contre coeur

Après la Ville de Lyon, c’est au tour de la Métropole de Lyon de mettre son budget « à la sauce Macron ». Un objectif de limitation des dépenses de fonctionnement de la collectivité sera contractualisé avec l’État. Même si la mesure a été adoptée, l’opposition et une partie de la majorité ont crié à l’ingérence et à la perte d’autonomie. 

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siège de la Métropole de Lyon, rue du Lac (Lyon 3ème). © Guillaume Bernard/Rue89Lyon

En septembre 2017 le chef de l’État a indiqué aux collectivités territoriales qu’elles allaient devoir se serrer la ceinture. Dans quel but ? Participer à l’effort de réduction du déficit public fixé à 13 milliards d’euros au total sur cinq ans.

Les grandes collectivités, comme les métropoles, sont concernées. En échange, l’État s’engage à maintenir la dotation globale de fonctionnement.

Depuis le début de l’année les 322 collectivités concernées négocient avec l’État, via les préfets, afin de contractualiser la démarche. Elles doivent s’engager à limiter la hausse de leurs dépenses de fonctionnement. Le seuil national a été fixé à 1,2% par an. Ce taux peut varier, à la hausse comme à la baisse, selon trois critères notamment :

  • la dynamique de la population,
  • le revenu moyen par habitant,
  • efforts déjà consentis sur l’évolution des dépenses de fonctionnement par la collectivité en question.

Les négociations menées avec le préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes ont abouti à un taux de 1,19 % pour la Métropole de Lyon. Ce qui signifie donc qu’elle s’engage à ne pas augmenter ses dépenses de fonctionnement de plus de 1,19% par an sur la période 2018-2022. L’évaluation de leurs résultats fonctionnera sur un système de bonus-malus (voir encadré ci-contre).

« Injustice », « fin de la libre administration » et autres cris d’orfraie 

Lors du conseil métropolitain de ce lundi 25 juin, tous les élus à la tribune ou presque ont salué le travail des services de la Métropole pour mener ces discussions serrées. Tous ou presque se sont par ailleurs dit satisfaits du taux négocié. Mais tous ou presque encore, y compris au sein de la majorité, ont dénoncé le principe même de ce pacte avec l’État.

Avec des mots assez durs. De l’extrême gauche à la droite, c’est un « diktat » insupportable qui a été vilipendé d’une même voix. Ainsi que des capacités d’action moindres pour la collectivité dans les années à venir du fait de ces efforts budgétaires pour une collectivité aux finances reconnues comme plutôt saines.

Le discours était en substance : « nous ne sommes pas responsables de la dette de l’État, qu’il nous laisse gérer nos finances nous-mêmes ».

Rolland Jacquet (Lyon Métropole Gauche Solidaire) trouve ainsi « injuste » que la Métropole de Lyon doive ainsi limiter ses dépenses de fonctionnement.

« Pourquoi alors être vertueux au fond ? Ce sont les associations ou des structures comme le Sytral qui en subiront les conséquences. C’est une atteinte à la libre administration des collectivités », a-t-il affirmé.

Ces expressions sont très souvent revenues dans la bouche des élus. Pour Bertrand Artigny (EELV), ce contrat c’est :

« L’acte 1 de la mort des communes. Si on rajoute la suppression de la taxe d’habitation, c’est la fin de la liberté de lever l’impôt des collectivités territoriales ».

Moins de dépenses donc moins de services publics ?

Les dépenses de fonctionnement ne se limitent pas aux paiements des fournitures ou des réceptions de la Métropole. Elles concernent les services qu’assure la Métropole de Lyon aux compétences en matière sociale très larges aujourd’hui.

C’est ce qu’a laissé entendre Ludivine Piantoni (PRG) craignant des coupes budgétaires à venir :

« Il faudra faire des choix politiques dans les mois à venir ».

Christophe Geourjon (UDI), s’est inquiété lui aussi d’une possible injustice à venir :

« Le Président de la République veut développer le droit à l’expérimentation des collectivités locales, mais avec quel budget ? »

Une injustice doublée d’une situation « schizophrénique » qui verrait l’État demander aux collectivités locales de maîtriser leurs dépenses de fonctionnement alors mêmes qu’il peut contribuer à les faire augmenter.

« 31% de nos dépenses de fonctionnement concernent les dépenses sociales, des allocations dont les montants sont décidés par l’État et que la Métropole doit payer. L’État dicte aux collectivités comment gérer leurs budgets. C’est une mise sous tutelle budgétaire »

Voter contre serait pire que voter pour 

Jean-Paul Bret (Métropole Autrement), maire PS de Villeurbanne, a lui aussi insisté sur ce « faux processus contractuel ». Pour lui, l’indicateur utilisé pour s’assurer de la bonne gestion des collectivités locales n’est pas le bon.

« L’impact est difficile à évaluer dans la durée. Et l’impact sur la politique d’investissement ne peut pas être apprécié. Cela relève de la boule de cristal alors que le niveau d’investissement est essentiel ».

Les menaces de sanction financière en cas de non-respect créent selon lui une situation kafkaïenne. Même en désaccord avec le principe, il vaut mieux l’accepter car payer des amendes ne seraient économiquement pas rationnel. C’est pourquoi il a voté cette résolution autorisant la Métropole à passer ce contrat avec l’État sans vraiment en approuver le principe.

C’est ce qu’on fait certains membres de la majorité métropolitaine. D’autres se sont abstenus comme le groupe PRG, certains élus socialistes comme Annie Guillemot ou des membres du groupe Synergie, ces « petits maires » nécessaires à la stabilité de la majorité de David Kimelfeld.

Le Gram, le groupe communiste, EELV, l’UDI ont voté contre. Le groupe LR présidé par Philippe Cochet maire Les Républicains de Caluire a voté pour, même s’il estime qu’avec cette mesure l’État ne réduira pas sa dette. C’est pour une autre raison qu’il l’a fait :

« Nous le voterons parce qu’il vous oblige à ce que nous vous demandons depuis plusieurs années : faire des économies ».

Pour David Kimelfeld, la Métropole est trop bonne élève pour avoir peur

Du côté de l’exécutif, on juge évidemment ce pacte beaucoup plus positivement.

Anne Brugnera, députée LREM de la Métropole, a été chargée de le défendre. Pour elle, ce contrat assure une « visibilité à la Métropole sur ses moyens pour les années à venir » au contraire des coupes budgétaires dans les dotations décidées par les gouvernements précédents.

Pour David Kimelfeld, président de la Métropole depuis le départ de Gérard Collomb, le dispositif ne change rien ou presque.

« Ces efforts demandés, nous nous les appliquons déjà depuis des années ».

Le compte administratif pour l’année 2017 présenté un peu plus tôt lors du conseil faisait apparaître une augmentation des dépenses de fonctionnement de 1,2%.


#Annie Guillemot

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Photo : RC/Rue89Lyon

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