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Pour la préfecture du Rhône, les enfants de plus d’un an peuvent être remis à la rue

Chaque année, c’est la même histoire. Les places du plan froid ferment et des sans-abri se retrouvent à la rue. D’autres ont la chance de pouvoir rester au chaud jusqu’à l’été voire plus.

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Hôtel "Le Genève" quai Perrache à Lyon. Des familles ont été hébergées dans cet hôtel par la préfecture du Rhône, dans le cadre du plan froid. ©LB/Rue89Lyon


Mais ce printemps, les critères pour être maintenu dans le dispositif d’hébergement se sont encore durcis. Désormais, seules les familles avec enfants de moins d’un an ont droit à un toit.

La douche froide du printemps. Les membres du collectif « Jamais sans toit » qui se mobilisent pour l’hébergement des enfants scolarisés espéraient qu’avec l’annonce de 5000 places pérennisées sur le plan national, Lyon allait bénéficier d’environ 500 places, comme l’année dernière. Les remises à la rue auraient été moins nombreuses.

Mais pour le moment, c’est le grand flou. Un mois et demi après l’annonce, la préfecture du Rhône ne dispose « d’aucun chiffre sur ces places maintenues ».

La seule chose que l’on connaît avec certitude, ce sont les remises à la rue autrement appelées « fins de prise en charge ».

Aujourd’hui, selon la préfecture, sur les quelque 850 personnes qui étaient encore dans le dispositif hivernal, 250 ont retrouvé ou vont retrouver très rapidement la rue. Parmi elles :

En fin de semaine prochaine, les foyers d’hébergement de « la Sarra » (Lyon 5e) et du « Chêne » (Bron) fermeront également leurs portes.

Les autres, soit 600 personnes, sont réparties en deux groupes selon les critères établis par la préfecture du Rhône :

  • Si ces sans-abri disposent d’un « statut administratif qui leur permet d’intégrer le logement social », ils pourront intégrer un nouveau dispositif d’insertion et leur hébergement sera garanti. Cela concerne notamment les ressortissants communautaires (Roumains et Bulgares, essentiellement) qui ont droit au travail, soit 350 personnes.
  • Pour les personnes en situation irrégulière ou en demande d’asile, il faut avoir un enfant de moins d’un an et/ou être une femme enceinte de plus de six mois et/ou être gravement malade. 250 personnes sont concernées et peuvent rester dans l’hébergement d’urgence jusqu’au 30 juin.

Le collectif de profs et parents d’élèves « Jamais sans toit » a protesté contre ces remises à la rue et ces critères de sélection :

« Les critères de sélection sont drastiques, absurdes et inhumains: une première hiérarchisation est faite selon la nationalité et/ou la situation administrative des personnes puis ce sont des critères de vulnérabilité qui entrent en compte. Cette année la préfecture estime que les femmes enceintes de moins de 6 mois et les enfants de plus d’un an peuvent vivre dans la rue ! »

Hôtel « Le Genève » à Lyon. Des familles ont été hébergées dans cet hôtel par la préfecture du Rhône, dans le cadre du plan froid. ©LB/Rue89Lyon

La préfecture du Rhône change de « priorisation »

Entre le début du plan froid et sa sortie, la préfecture a changé ces critères de vulnérabilité.
En novembre dernier, lors de la conférence de presse de lancement, le préfet Bouillon expliquait en effet que, faute de places suffisantes, la préfecture allait continuer de pratiquer une « mise à l’abri » en fonction de critères :

« C’est prioriser en fonction de la vulnérabilité des personnes, s’il y a des enfants de moins de 3 ans, des femmes enceintes, des personnes malades, des familles ».

En d’autres termes, il était demandé aux associations missionnées par l’Etat de dire qui sont plus vulnérables que d’autres.

En cours d’hiver, les conditions ont changé : seules les personnes « avérées à la rue » étaient considérées comme sans-abri et pouvaient bénéficier d’un hébergement.

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Et à la fin de cet hiver, rebelote, les critères pour continuer être pris en charge ont donc encore changé : les enfants de plus d’un an ne sont plus aussi vulnérables.

Dans un communiqué de presse de fin de plan froid, le Collectif des Associations Unies (regroupant notamment la Fondation Abbé Pierre, la Fédération des acteurs de la solidarité, la Cimade et Médecins du Monde) mettait déjà en avant des critères établis « en fonction des moyens financiers et matériels », et non pour répondre aux « besoins réels ».

Une porte-parole de ce collectif, Pascale Blanchetière, réagit à ce nouveau changement :

« Encore une fois, la question de la prise en charge des plus vulnérables est posée. On filtre en fonction des places disponibles. Cela montre également le manque de planification. On ne sait toujours pas, également, le nombre de places pérennisées ».

« Jamais sans toit » met en avant la contradiction avec la loi sur le droit opposable au logement censé garantir l’inconditionnalité et la continuité de l’hébergement.
Le collectif a argumenté dans ce sens auprès de la Direction départementale de la cohésion sociale (DDCS).
Mais la réponse est toujours la même : le droit inconditionnel, c’est du passé. Désormais, l’Etat a une obligation de moyens et non de résultat, selon la jurisprudence actuelle du Conseil d’Etat.

Lundi 14 mai, une quarantaine de personnes se sont rassemblées devant la Direction départementale de la cohésion sociale (DDCS) du Rhône, à l’initiative du collectif « Jamais sans toit ». ©LB/Rue89Lyon

#Hébergement

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Photo : Isabelle Serro

Photo : Mathieu Pernot/Les Migrants, 2009.

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