« On a besoin de gens comme ça, un peu impertinents, caustiques et aussi dans l’esprit du rugby. »
Marc Lièvremont, ancien sélectionneur du XV de France, aurait pu tomber dans la facilité et dire des garçons (et des filles) bouchers qu’ils ont un ton « décalé ». Après tout, c’est ce que tout le monde dit depuis dix ans de ceux qui préfèrent le mordant au convenu. Il faut abandonner cette expression une bonne fois pour toutes. Merci à lui.
Marc Lièvremont aurait aussi pu les tailler en longe, en lard et en travers. Au temps où il tentait de payer des bières à ses joueurs après des matchs souvent aussi baroques que ses compositions d’équipe, il n’était pas épargné par la joyeuse bande de la Boucherie Ovalie. Parvenant à hisser la France en finale de la Coupe du Monde 2011 sans que lui ni personne ne sache vraiment l’expliquer, il est devenu presque, à lui seul, le symbole de la « French chatte ».
L’histoire d’amour avec les membres de la Boucherie n’est donc qu’une suite logique.
Depuis quelque temps, la bande de petits cons bien cachée derrière son écran conspiratif s’est mis en tête d’écrire des livres. C’est même son deuxième bouquin en deux ans. Elle pisse de la copie comme un vulgaire écrivain de romans de gare. C’est tout naturellement que notre grand entraîneur, pas rancunier et plutôt élégant, a signé la préface du second opus de la Boucherie Ovalie. Cette fois c’est chez Marabout (Hachette qui édite à 20 000 exemplaires contre 5 000 pour le premier numéro, dans une maison d’édition).
[INSTANT CONFESSION] Ce petit moment de réclame gratuite, totalement assumé, s’explique par la présence dans les pages de ce livre de quelques bafouilles d’un journaliste de l’équipe de Rue89Lyon, Bertrand Enjalbal. Ce livre est très drôle mais vous n’êtes pas obligés de nous croire. On vous fera simplement remarquer que Noël approche.
Le livre de la maturité
Celui de la maturité ? Oui. Tout le monde dans l’équipe est désormais majeur.
Après avoir écrit dans son premier élan littéraire le « #MeilleurLivreduMonde », la Boucherie Ovalie a pourtant décidé de remettre son titre en jeu. Fourbe comme un demi de mêlée et voulant éviter les petits lendemains dégueulasses après les nuits d’ivresse, elle a choisi d’écrire un guide et non un nouveau livre.
Consciente de la difficulté à faire lire un rugbyman, elle propose aux convertis comme à ceux attirés par l’exotisme de ce sport un petit manuel de survie dans le monde de l’ovalie.
Cette terre promise fantasmée et remplie de bons sentiments, de franche camaraderie, de développement personnel, de miel, de fruits, de muscu, de créatine Vita Coco et de valeurs du rugby ©. Une notion un peu fourre-tout où l’on range tout ce que ce sport véhiculerait de positif sans vraiment l’interroger. Un peu comme un ruck qu’on arrêterait d’arbitrer. Un slogan qui permet surtout à ses promoteurs officiels de dire qu’ici, ici c’est pas le foot. –> (Le double « ici » est volontaire, c’est pour faire référence aux chants de supporters débiles qui disent « Ici, ici c’est (le nom de la ville) ». La mode a été lancée à Oyonnax pour info. C’est aujourd’hui un fléau).
Oui, mais voilà, le rugby élargit son audience et continue de brasser davantage d’argent. Le diffuseur du championnat de France et quelques uns de ses suiveurs se plaisent (se forcent ?) à l’ériger en meilleur championnat du monde. Vous nous direz ce que vous en pensez devant Agen-Oyonnax.
Sociologues de la main courante
La Boucherie Ovalie a choisi cette fois, dans un rare et beau moment de sobriété, d’adopter pour ce second ouvrage une approche anthropologique. Ces sociologues de la main courante ont décidé de laisser de côté les clubs ou nations emblématiques du rugby pour gagner le vestiaire ou le bus du retour après un match chez l’adversaire. Mais aussi vous expliquer les différents postes d’une équipe de rugby ou comment vous comporter lors d’une bagarre générale.
La moindre des choses quand on parle de guide de survie.
Si les fameuses « valeurs du rugby » n’ont certainement plus leur rond de serviette dans le monde professionnel, il existe toujours un rugby de sous-préfecture. Et des gens dans ce sport capables de rire de tout même à Castres dans l’Aveyron. (attention piège, pour voir si vous avez de l’humour et plus de géographie qu’un pilier)
Après le succès du premier livre qui leur a ouvert grand les portes de la fête du melon de Lectoure, la joyeuse bande évite habilement l’écueil du bling-bling. Sa pastille à la mi-temps des matchs sur la chaîne de Bolloré avait irrité le canal historique de sa fanbase et ainsi satisfait les snipers les attendant côté fermé.
Après #LeMeilleurLivreDuMonde, elle signe tout naturellement le #MeilleurGuideDuMonde. Un guide sponsorisé par aucun office du tourisme ni magnat de l’échafaudage de chantier (référence au président de Montpellier, patron d’Altrad, leader mondial de l’échafaudage, au coeur d’une affaire avec Bernard Laporte). Parce que comme Guy Novès avec les 3 points, eux non plus ne transigent pas :
« L’idée c’est de rester personne, comme à nos débuts. »
Boucherie Ovalie, guide de survie au pays du rugby, éditions Marabout, 2017, 29,90€
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