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Le Peuple de l’herbe comme à la maison ce samedi à Lyon

Le Peuple de l’Herbe s’apprête à fêter au Transbordeur vingt années d’activisme sonore par un set spécial, revisitant en partie leur passé. Flashback avec Pee et Psychostick sur ces moments-clefs qui ont enclenché cette sautillante et exemplaire aventure. Le Peuple a la parole.

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Le Peuple de l’herbe comme à la maison ce samedi à Lyon

Groovambar

À l’époque, Stani (NdlR qui a quitté le Peuple depuis) joue dans DNC, un groupe de hip-hop que mon frère, Chris, sonorise. Je pose des scratchs sur un de leurs morceaux qui s’appelle Du vinyl. Stani a un Akai S950 et un Atari et j’ai envie d’apprendre à sampler, lui maîtrise ça.

Je veux essayer de monter des boucles, sous influence hip-hop mais aussi anglaise, ce que l’on n’appelle pas encore bass music, comme Smith & Mighty, Massive Attack, la scène de Bristol. On faisait déjà des soirées chacun de notre côté, mais j’en fais une dans un bar qui s’appelle Le Navire, avec Couleur 3.

Et Bertrand le patron nous propose une résidence hebdomadaire : on commence ainsi, en appelant la soirée Groovambar, avec un logo reprenant le bonbon. On mélange plein de choses, sans limites : du Wagon Christ, des trucs chépers, du Mo’Wax, puis tout ce qui fait danser, house garage, les débuts de la jungle…

Seb N’Zeng (trompette) vient jammer par dessus les disques. Six mois plus tard, Ivan (Psychostick, devenu batteur du groupe) vient faire ses soirées Melting Juice la veille, au même endroit.

Start

L’album de DNC sort, ça marche pas, ça splitte. Stani continue à composer seul, je le rejoins régulièrement en studio, j’amène des idées mais c’est lui qui maîtrise tout, qui assemble le tout. On s’entend vite bien, on fait des démos que l’on amène à Cyrille Bonin : on veut faire un label vinyle quand tout le monde annonce que ça va mourir.

Nous, on voit qu’en Angleterre, c’est encore vivace.

On tire des white labels par centaines, ça marche, ça part super vite, partout. On prépare le second maxi, on fait deux concerts en duo. Et au troisième, Ivan nous rejoint à la batterie.

Au quatrième concert, Seb N’Zeng de Mo’Jazz Beats nous rejoint à la trompette. J’avais fait les pochettes de leur groupe : j’ai souvent été dans l’ombre pour faire des pochoirs, des covers : pour les Crab’s, L’Enfance Éternelle…

« Les radios comme Nova et Couleur 3 diffusent à fond le PH Thème. On l’apprend par les copains : on n’a pas le net »

PH Thème

Notre premier concert, c’est pour l’inauguration du Batofar à Paris. Qui en fait n’a pas encore ouvert, donc on joue dans un ancien hangar de la SNCF tout tagué !

À l’époque, Stani part aussi jouer avec Silmarils, il m’envoie plein de contacts à chacune de leurs dates, moi je travaille dans une société, la nuit.

J’ai accès à un téléphone et des photocopieuses : je fais plein de trucs pour Le Peuple, je harcèle les salles, je grave des CDs à la main !

Les radios comme Nova et Couleur 3 diffusent à fond le PH Thème. On l’apprend par les copains : on n’a pas le net.

« Avec Virginie, on se connaissait avant : c’était notre copine des pentes avant qu’elle s’appelle Despentes »

Baise-moi

Varou (ancien guitariste de Condense, désormais membre du Peuple) s’occupe de la bande originale du film de Virginie Despentes, il cherche des morceaux. Originaux. Du coup, on compose nos deux premiers titres à quatre pour lui. Ivan fait un remixe drum&bass dans le week-end.

On les ajoute aux deux premiers maxis pour faire notre premier album.

Et on se retrouve peu après aux Transmusicales, la villégiature de tous les journalistes et programmateurs, on passe encore un cap ce soir-là ! Avec Virginie, on se connaissait avant : c’était notre copine des pentes avant qu’elle s’appelle Despentes.

Elle bossait à Gougnaf, la boutique de disques de Stéphane Chaumat, notre manager, qui à l’époque s’occupait de Haine Brigade. On se connaît depuis le lycée tous !

Il y a eu un tel scandale après le film… que ça rajoute un peu de buzz…

Le Peuple de l’Herbe au Transbo le samedi 30 septembre. ©DR

« On concourt dans la catégorie « révélation scène ». On n’est pas contre, mais on s’en fout un peu »

La Victoire !

Comme un cheveu sur la soupe ! Ce qu’on a compris après : c’était la première année où la méthode de vote était modifiée. Avant, c’était trusté par la variété. Là, ils font voter des musiciens, des organisateurs…

On concourt dans la catégorie « révélation scène ». On n’est pas contre, mais on s’en fout un peu. On avait demandé à jouer, ils nous ont répondu oui, mais en playback : on a décliné, on n’a pas voulu non plus aller faire les clowns dans les fauteuils. Les semaines passent, personne ne croît à notre victoire, surtout pas nous.

La soirée arrive, on fête la naissance du fils de Pee. Et c’est les filles, les bonnes nouvelles arrivent toujours par les filles : elles allument la télé. Bon, on coupe la musique. Elles veulent entendre le nom Peuple de l’Herbe au moment des nominations.

On regarde : le gagnant est… Le Peuple de l’Herbe ! Et là… pour des mecs qui s’en foutaient, ben on est quand-même super contents !

Bon du coup, bien sûr, on était pas là pour le recevoir et c’est le mec des Négresses Vertes qui a récupéré notre prix.

« On rejoint Beth Gibbons dans sa chambre d’hôtel, on commande des bières, on discute, elle a sa petite voix, elle tape clope sur clope, boit pinte sur pinte, on est saouls avant elle »

Portishead

Pour les 25 ans des Transmusicales, Jean-Louis Brossard, le directeur, veut proposer des surprises. Il nous propose de jouer avec Beth Gibbons, la chanteuse de Portishead, deux morceaux.

Elle vient de faire un album avec le bassiste de Talk Talk. On doit faire nos preuves et envoyer une maquette au boss du groupe : c’est ok. On est hyper fans, donc on est hyper fiers. On a remonté tout le sample de Isaac Hayes de A à B, c’est très technique. Et vient la rencontre…

On arrive la veille pour des répétitions : bon, il s’avère qu’il n’y aura pas de répétitions mais juste des balances. On la rejoint dans sa chambre d’hôtel, on commande des bières, on discute, elle a sa petite voix, elle tape clope sur clope, boit pinte sur pinte, on est saouls avant elle.

Nous, on veut un featuring avec Beth Gibbons pour notre prochain album ! On lui fait écouter plein de démos. Elle sort un petit lecteur DVD portable, elle chante direct sur tous les morceaux…

Nous on boit des bières, on la regarde, on a des étoiles dans les yeux ! On part tardivement de la chambre, bien bourrés, et on se dit mais merde, on n’a rien enregistré ! Le lendemain le concert : grosse pression. Elle a un filet de voix, donc elle est super forte dans nos retours mais du coup on a aussi tout le bruit de la salle hyper fort dans les oreilles.

Et au premier mot qu’elle prononce, c’est la folie dans le public, tout est démesuré ! Et tu la vois, avec sa clope, comme avec Portishead. Sauf que c’est toi qui est derrière à jouer ! Pincez-moi ! J’en ai encore des frissons…

Le Peuple de l’Herbe
Au Transbordeur le samedi 30 septembre

Recueillis par Sébastien Broquet sur petit-bulletin.fr.


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Photo : Anne Bouillot

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