« Il y a toujours des artistes très engagés et rebelles »
Petit Bulletin : Comment définiriez-vous le street art ?
Cart’1 : C’est un art difficile à définir car il est en constante mutation depuis le début des années 1980, se séparant notamment peu à peu du seul graffiti. Disons que, sous cette appellation, on regroupe maintenant les activités artistiques qui se pratiquent dans la rue, avec une multitude d’approches (graph’futuristes, muralisme, mosaïque…). C’est aussi un mouvement sans leader, spontané et protéiforme.
« Aujourd’hui, le marché et les galeries tentent de récupérer le mouvement »
N’a-t-il pas perdu un peu de son côté sauvage et rebelle aujourd’hui ?
Il a forcément lâché un peu de lest. Mais il y a toujours des artistes très engagés et rebelles, et d’autres qui vont davantage vers les beaux-arts sans message particulier. Tous, quoi qu’il en soit, sont engagés au sens où ils pratiquent un art gratuit. De plus, les street artistes sont toujours considérés comme des délinquants.
Aujourd’hui, le marché et les galeries tentent de récupérer le mouvement (et il faut bien que les artistes vivent), mais le plus important selon moi c’est qu’ils gardent le contact avec la rue. Certains artistes malheureusement ne s’en servent que comme un tremplin pour évoluer ailleurs et s’en détacher.
Quelle a été la genèse du festival TrubLyon ?
Depuis 1997, je travaille sur des événements et des festivals un peu partout dans le monde. J’ai monté mon propre festival en Colombie où j’ai vécu plusieurs années. À mon retour dans ma ville natale, Lyon, j’ai voulu faire quelque chose autour du street art.
L’an passé, à l’occasion de l’exposition Wall Drawing au Musée d’Art Contemporain (voir la vidéo ci-après), nous avons organisé une journée de jet-stream qui a connu un joli succès public avec 3500 personnes : on pouvait donc projeter un vrai festival à Lyon !
C’est un festival qui se déroulera dans… un collège !?
Oui, sur le site de l’ancien Collège Maurice Scève dans le 4e arrondissement. Un collège c’est comme une ville dans la ville, c’est parfait pour un festival de street art ! J’aimerais pouvoir y recréer une certaine ambiance, celle que j’ai connue quand j’étais adolescent en 1989 : on allait dans des friches, on mettait de la musique, on faisait un barbecue et on peignait toute la journée.
Ce festival se veut aussi un événement familial avec de la peinture, de la musique, des ateliers pour enfants et des échanges…
« Les artistes qui viennent de la capitale Bogota empruntent beaucoup aux cultures rock et punk, pratiquant le pochoir et étant très revendicatifs »
Comment avez-vous choisi les artistes ?
À la fois pour ce qu’ils font artistiquement et pour leur état d’esprit qui correspond à cette ambiance souhaitée du festival.
Ma programmation n’est ni exhaustive ni objective, mais fonctionne au coup de cœur.
Il y aura aussi beaucoup de musiciens et de DJ (lyonnais mais pas seulement), dont un invité colombien, Tété, qui est une star dans sa ville de Barranquilla, et qui est tout à la fois DJ, musicien et musicologue. Il embrasse autant les musiques traditionnelles de son pays que la techno et l’électro.
Le festival aura une forte coloration colombienne.
Oui, de par mon expérience personnelle là-bas et aussi parce que 2017 est l’année culturelle croisée France-Colombie. J’ai invité cinq artistes colombiens. Ceux qui viennent de la capitale Bogota empruntent beaucoup aux cultures rock et punk, pratiquant le pochoir et étant très revendicatifs. Les autres ont un style et un univers plus caribéen, plus coloré.
Tous s’approprient le street art en le liant avec leur culture, qui depuis longtemps a une tradition du mur peint. Les Colombiens sont proches aussi des problématiques des minorités indigènes, de la spiritualité et de l’écologie.
De manière générale, le street art n’est pas un art impérialiste : chaque culture s’y immisce et peut se l’approprier.
Par JED, dossier complet sur le street art à lire sur petit-bulletin.fr
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