Mais à la veille des législatives, tout ce qui se trouve à la gauche d’Emmanuel Macron part divisé, particulièrement dans le Rhône. Point route. Accrochez-vous.
L’histoire commence toujours par des réunions. Au lendemain du premier tour de l’élection présidentielle, toutes les forces de gauche se sont pour la énième fois fois réunies pour tenter de trouver des candidatures communes, en vue des législatives. Toutes ? Non. Le PCF, EELV, le PS, le Gram et Lyon Gauche Solidaire étaient présents. Mais il manquait la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon.
« Ce n’est pas un manque de respect, affirme Andréa Kotarac, l’un de ses représentants dans le Rhône et candidat dans la 7ème circonscription. Mais nous ne négocions qu’au niveau national ».
La suite, on la connaît sur la scène nationale : les négociations entre la France insoumise et le PCF ont capoté, notamment parce que les communistes ont refusé la charte du mouvement mélenchoniste.
Raphaël Debû, secrétaire départemental du PCF du Rhône analyse froidement :
« Pour ces élections, on ne recherche pas les mêmes objectifs. Nous, nous voulons envoyer un maximum de députés de la gauche de combat. Alors que l’objectif de la France insoumise, en tant que parti mitterrandien, est de reconstituer un grand mouvement qui étouffe et efface les autres formations politiques. »
Cette volonté d’hégémonie est envisagée différemment par l’insoumis Andréa Kotarac :
« On rejette la tambouille. Et les Français ne veulent plus de l’addition d’étiquettes. Ça ne marche pas. À la présidentielle, PS et EELV ont passé plus de temps à dire qu’ils étaient ensemble qu’à développer leur propre programme ».
Aucun accord avec la France insoumise, même dans les circonscriptions gagnables
Dans chaque circonscription du Rhône, la France insoumise présente donc des candidats essayant de capitaliser sur la dynamique Jean-Luc Mélenchon version 2017.
Sur les quatorze circonscriptions, trois sont gagnables pour la gauche d’Emmanuel Macron, si on se base sur les résultats du 1er tour de la présidentielle :
- La 7ème circonscription (Rillieux, Vaulx-en-Velin, Bron) où Mélenchon termine premier avec 26,56 %.
- Dans la 14ème circonscription (Vénissieux, Feyzin et une partie de Saint-Priest), le candidat de la France insoumise culmine à 30,07 %, loin devant Emmanuel Macron.
On peut également ajouter la 2ème circo du Rhône (1er, 2ème, 4ème, 9ème arr. de Lyon) où les voix cumulées de Mélenchon (25,80%) et Hamon (9,87%) dépassent de six points le score de Macron, toutefois arrivé en tête.
Malgré tout, aucun accord local n’a été conclu par la France insoumise (FI) alors même que le Parti de gauche (fondateur de la FI) participe aux majorités municipales de Vénissieux et du 1er arrondissement de Lyon.
Andréa Kotarac défend toujours la ligne :
« Certes, on aurait pu se dire qu’on était dans les mêmes majorités. Mais les négociations se font au niveau national. Ce n’est donc pas possible de faire des accords locaux. »
Ces directives nationales de la France insoumise ne s’appliquent toutefois pas si aisément au plan local.
Particulièrement dans la 14ème circonscription, où le « groupe d’appui » a voté contre une candidature France insoumise pour laisser le champ libre à Michèle Picard, la maire communiste de Vénissieux, candidate pour tenter de reconquérir le fauteuil d’André Gerin.
Des écologistes présents partout
En dehors de la France insoumise, la gauche de Macron s’est-elle entendue sur des candidatures communes ? À l’heure où nous publions cet article, nous pouvons répondre par la négative, à quelques exceptions près.
À noter que la date limite du dépôt des candidatures est fixée au 19 mai.
Les écologistes d’EELV veulent des candidats dans un maximum de circonscriptions. Dans le Rhône, il y en aura donc… 14 sur 14.
Thomas Dossus, secrétaire du groupe EELV Lyon explique le raisonnement pour ce qui reste des Verts :
« Sans la France insoumise, il y a peu de sens de faire un accord avec les autres. Avec le PCF, par exemple, il est difficile de trouver un terrain d’entente vu nos positions antagonistes sur l’écologie. »
Conséquence directe : les écologistes appliquent leur stratégie arrêtée l’été dernier.
« Faire exister au maximum l’écologie politique d’autant plus qu’on n’était pas directement présent à la présidentielle. »
Localement, les écolos n’ont donc conclu aucune alliance. Et si vous voyez le point et la rose sur les affiches de la lyonnaise Fanny Dubot (candidate dans la 3ème circonscription), c’est en application de l’accord national conclu entre Hamon et Jadot. Là, il perdure.
Dans la 7ème circonscription (Rillieux, Vaulx, Bron), les écologistes font toutefois toujours le forcing pour conclure un accord unitaire, au moins avec le PCF.
Militant vaudais des années 90, co-fondateur du mouvement Force Citoyenne Populaire, Pierre-Didier Tchétché-Apéa a obtenu l’investiture d’EELV et souhaiterait s’entendre avec Andréa Kotarac de la France insoumise et le candidat communiste, Paul Boghossian. Mais il n’a obtenu que des refus.
L’exception Nathalie Perrin-Gilbert ?
Au final, il n’y a que la maire du 1er arrondissement, Nathalie Perrin-Gilbert, partie initialement sous les couleurs de son mouvement, le GRAM, qui a réussi à réaliser un embryon d’union de la gauche.
À l’origine, rétive à apposer les logos des partis politiques, elle a conclu récemment un accord avec le PCF et Ensemble !, deux des trois composantes de feu le Front de gauche. Aline Guitard, la patronne des communistes de Lyon, sera sa suppléante en cas d’élection.
Mais en face, elles trouveront, sur leur gauche, les écologistes et les insoumis.
Nathalie Perrin-Gilbert qui a des positions très proches de la France insoumise sur la nécessité de « dépasser les partis politiques » a donc décidé de s’associer avec deux partis politiques. Et ce ticket GRAM/PCF va, très certainement si l’on en croit le socialiste Jules Joassard, recevoir le soutien des militants PS concernés.
Une décision saluée par Armand Creus, un des représentants d’Ensemble ! du Rhône :
« Contrairement à la France insoumise, elle n’est pas sur une ligne populiste de gauche. Au lieu de détruire l’ancien, elle veut le dépasser. Elle ne veut pas tuer les partis politiques, elle veut accompagner leur mort en les respectant. »
Vers un zéro pointé pour le PS du Rhône ?
Depuis la victoire de Benoît Hamon à la primaire, les clés de la fédération du Rhône sont entre les mains de son représentant local, Jules Joassard. Moteur pour trouver une union de la gauche au niveau départemental, il ne peut que regretter son absence.
Cette division risque de coûter l’élection aux deux candidats socialistes en meilleure position pour l’emporter, dans les 7ème (Renaud Gauquelin, député sortant en tant que suppléant d’Hélène Geoffroy) et 6ème circonscriptions (Najat Vallaud-Belkacem à Villeurbanne).
Sachant que deux députés sortants PS (Jean-Louis Touraine dans la 3ème) et Yves Blein (dans la 14ème) se sont vus retirer leur investiture socialiste après avoir rejoint En Marche !.
S’il n’envisage pas un avenir radieux pour les candidats socialistes, le représentant socialiste du Rhône n’envisage pas de fort score en faveur de la France insoumise :
« Il y a eu un double vote utile à la présidentielle : pour Macron et pour Mélenchon à partir du moment où il a été présenté comme le quatrième voire le troisième homme par les médias. Aux législatives, les électeurs vont revenir à leur famille d’origine, socialiste, communiste ou écologiste ».
Pour Jules Joassard lui-même, la partie va être difficile dans la 11ème circonscription (sud du Rhône, Givors). Les communistes ont décidé de maintenir leur candidat, Raymond Combaz, un proche du maire de Givors. C’est la première fois depuis 2002 qu’il n’y a pas d’accord entre le PCF et le PS. Les temps changent.
Chargement des commentaires…