Mais qu’en est-il de la ville-centre ? Grenoble, municipalité écologiste, est-elle l’élève modèle de l’agglomération ?
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Composter, recycler ou incinérer ?
Renforcer la prévention pour que les habitants produisent moins de déchets, mettre des corbeilles de tri dans l’espace public et des bennes pour les cartons sur les marchés : l’action de la mairie de Grenoble en faveur du recyclage peut sembler limitée, pour une ville vitrine de l’écologie politique.
Mais la compétence de la gestion des déchets appartient à Grenoble-Alpes Métropole (la « Métro »), et la marge de manœuvre des villes, fussent-elles particulièrement vertes, est réduite.
L’une des caractéristiques de la ville-centre, comparée à d’autres communes de l’agglomération, c’est la densité de l’habitat : la très grande majorité des résidents vit dans des bâtiments collectifs. Cela ne favorise pas le tri des ordures.
Raymond Avrillier, militant écologiste de longue date et membre de l’Association démocratie écologie et solidarité (Ades), décrit :
« Le principal problème de Grenoble, ce sont les immeubles. Quand il faut descendre huit étages à pied parce que l’ascenseur est en panne pour vider ses poubelles et les trier, ce n’est pas évident. »
Surtout que, dans les immeubles, les informations relatives au recyclage doivent passer par une multitude d’acteurs.
Vincent Fristot, adjoint municipal à l’urbanisme, ajoute :
« Il y a une déconnexion dans le collectif où le propriétaire n’est pas forcément l’occupant, le gestionnaire des bacs c’est une entreprise qui est missionnée par un syndic.
Les différentes couches génèrent une perte d’informations sur le système de collecte. Il faut vraiment retravailler les messages qui sont donnés aux personnes, aux locataires, par exemple. »
Raymond Avrillier formule son voeu :
« Il faut faire de l’information au pied des immeubles ».
Ramassage des encombrants : un cercle vicieux
La Ville assure donc essentiellement la prévention et l’information de proximité :
« On est dans les assemblées d’associations et donc on fait passer des messages peut-être mieux que la Métropole », estime Vincent Fristot, qui, en plus de son mandat municipal, est élu métropolitain.
Les deux collectivités, Ville et Métro, assurent travailler en bonne entente. La gestion des encombrants est par exemple assurée conjointement : les agents de la propreté urbaine municipale ramassent les petits encombrants, ceux de la Métro s’occupent des plus gros, et les deux services communiquent entre eux.
Lucille Lheureux, adjointe municipale aux espaces publics et à la nature en ville, assure :
« Nous avons mis en place un système beaucoup plus efficace depuis quelques mois avec une meilleure répartition entre les deux collectivités ».
Certains quartiers de Grenoble ont cependant un régime particulier, comme celui de la Villeneuve, au sud de la ville, où deux collectes quotidiennes d’encombrants sont réalisées.
« Le problème, estime Lucille Lheureux, c’est que c’est un cercle vicieux : les habitants jettent, ils voient que c’est nettoyé derrière, donc ils continuent de jeter. Il faut trouver un moyen d’arrêter cela. Nous avons signé un contrat avec une entreprise chargée de la collecte, qui essayera aussi de sensibiliser les habitants. »
La mairie a également mis en place des corbeilles à tri à six endroits différents de la ville.
« L’idée, c’est que les gens qui trient chez eux le fassent aussi dans les espaces publics », explique Lucille Lheureux.
Des poubelles à mégots ont notamment été installées, mais « l’expérience n’a pas été concluante, car les quantités récoltées n’étaient pas suffisantes ».
« 98% des déchets des marchés sont recyclables »
La mairie a aussi effectué un travail sur les marchés avec la mise en place de bennes différentes pour les cartons et les cagettes, les déchets putrescibles, et le reste.
« Grenoble a beaucoup de retard dans ce domaine. Or, 98% des déchets des marchés sont recyclables. On a choisi de discuter avec les commerçants, de ne pas leur imposer les choses, affirme Lucille Lheureux. Ils étaient arc-boutés au début, mais ils ont vite compris qu’ils n’avaient pas le choix. Avant, ils jetaient tout dans une seule benne, là on leur demande de trier dans trois bennes différentes, ce n’est pas la mer à boire. »
Grenoble développe également le compostage individuel, en collaboration avec la Métro.
« Il y a actuellement cinq ou six bacs de compostage répartis dans différents espaces publics de Grenoble, en plus de ceux des jardins collectifs de la Ville. Ils s’inscrivent dans cette idée d’éviter de produire des déchets. »
Toutefois, ces bacs nécessitent un entretien régulier et donc la mobilisation de cinq à six habitants pour s’en occuper.
« Dans le quartier Saint-Laurent, confie Lucille Lheureux, les gens sont frustrés car le seul bac disponible ne suffit pas pour accueillir les déchets compostables de tout le monde. Nous envisageons d’en créer un deuxième mais cela signifie forcément que des habitants doivent se mobiliser autour de ce projet. »
Dans le domaine de la réduction des déchets, Grenoble peut aussi compter sur des initiatives citoyennes, comme La Bonne Pioche, une épicerie sans emballages ouverte en septembre, où les clients apportent leurs propres contenants pour faire leurs courses.
« Sur les marchés de Grenoble, vous pouvez acheter votre miel, voire vos yaourts, en apportant votre pot en verre », ajoute Vincent Fristot.
Pour l’adjoint grenoblois, c’est tout le système de consommation qu’il faut repenser.
« Il y a beaucoup de progrès possible en matière de valorisation des déchets pour la Métropole. Mais il y a aussi une grande possibilité de progrès au niveau local, dans la production, en privilégiant les circuits courts et en limitant les emballages. »
Un vaste chantier toujours en cours, semble-t-il.
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