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Laurent Wauquiez va contrôler le niveau de langue française des ouvriers BTP

La lutte contre le travail détaché va se muer sur les chantiers de la Région commandés par Laurent Wauquiez en test du niveau de Français des ouvriers étrangers. Le FN applaudit l’ensemble de la démarche, l’opposition à gauche condamne dans l’opération la présence d’une « clause discriminante ». Do you speak français, monsieur l’ouvrier ?

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Laurent Wauquiez

C’est elle qui a fait débat : une « clause de langue française » intégrée dans un projet plus vaste de lutte contre le travail détaché, voté lors de l’assemblée plénière du conseil régional de ce jeudi. Elle oblige les entreprises de BTP à employer des ouvriers « maîtrisant le français ». Et cela, « pour s’assurer de la bonne compréhension des règles de sécurité sur le chantier. »

Les opérations en travaux publics commandées par la collectivité régionale sont au nombre d’environ 120 chantiers ou 1200 lots par an.

Le président de Région imagine ainsi opérer des contrôles sur les chantiers, via ses agents territoriaux qui devront donc vérifier le niveau de langue de l’ouvrier tandis qu’il est en train de pelleter.

« Nous nous abritons derrière des motifs de sécurité, oui, et ils sont parfaitement légitimes », a lancé Laurent Wauquiez, avec une pointe de provocation.

Patrick Mignola, son vice-président en charge des Transports a tenté de faire baisser la tension :

« C’est en tant qu’entrepreneur que je parle : le travail détaché est le cancer du monde du BTP car il induit un véritable déséquilibre économique. Nous assistons à un effondrement des compétences dans le secteur du BTP, alors que nous avions des leaders mondiaux. »

L’élu UDI a voulu tenir comme à son habitude le rôle d’une voix modérant la radicalité d’un président sur pile, mais il s’est enfermé dans un propos consistant à considérer que les ouvriers européens et étrangers travaillent nécessairement moins bien que des ouvriers « français ».

Car c’est bien la distinction entre « français » et « étrangers » induite par cette clause qui, abordée de façon musclée dans les échanges, a donné au débat une dimension politique sulfureuse.

Une « police de la langue » illégale ?

Il s’agit de la clause dite « Molière », déjà brandie comme un moyen de faire de la préférence locale par différents élus territoriaux (inventée par un élu Les Républicains d’Angoulême, elle a été adoptée en régions Normandie et Hauts-de-France).

Une clause qui implique un contrôle des ouvriers et une obligation faite à l’entreprise de payer la présence d’un interprète. Elle concerne donc les personnes employées étrangères dans le cadre du travail détaché ; mais elle est relativement factice puisque des ouvriers embauchés non pas dans le cadre de cette mesure ne parlent pas mieux le français que les européens « détachés ».

Jean-François Debat, président du groupe socialiste, s’est offusqué de la présence de la clause Molière dans un projet de lutte contre le travail détaché  :

« La rédaction de cette clause est discriminatoire. De tout temps, la France a accueilli des travailleurs qui ont aidé le pays à se construire et à se reconstruire, notamment après-guerre. Leur demandait-on alors de parler français ?

Est-ce à la Région de la faire la police de la langue ? Elle ne peut pas s’ériger en brigade de contrôle à la place de l’employeur qui doit s’assurer des règles de sécurité. Cette clause nous la trouvons floue et inapplicable. Ou dangereuse. »

De quoi agacer Laurent Wauquiez, qui a rétorqué :

« Vous ne pouvez pas dire que vous êtes contre le travail détaché et vous insurgez quand nous, nous luttons contre. Vous n’avez rien fait, votre seule réponse, c’est on ne peut pas.

Quand 25% des travailleurs sont détachés sur les chantiers, on se demande dans quel pays est-ce qu’on a fini. »

Ce projet de lutte contre le travail détaché que Laurent Wauquiez qualifie de « longue haleine » a par ailleurs été rattaché au contrat de plan Etat/Région (CPER) qui vient d’être signé entre les services régionaux et ceux de l’Etat.

Mais cela n’aura pas été sans quelques difficultés, liées notamment à la présence de cette clause Molière. Ajoutée dans le CPER, sa mention aurait créé quelques tensions avec les services de l’Etat.

Si cette maîtrise de la langue devient une condition d’attribution du marché public, n’entre-t-elle pas en opposition avec un article du code pénal qui affirme que :

« Toute distinction opérée sur le fondement de la capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français constitue une discrimination ».

On peut se demander si un travailleurs français serait capable, quant à lui, de répondre à une telle exigence à l’étranger, quand on sait le niveau des élèves français en langues étrangères.

Invitation à Laurent Wauquiez à rejoindre le FN

Laurent Wauquiez à l’Ecole centrale de Lyon, juillet 2016. Crédits : SS/Rue89Lyon.

C’est dans cette même session plénière que Laurent Wauquiez a également fait voter la mise en place d’une « préférence régionale » dans l’attribution des marchés publics, reprenant à son compte la marotte de la préférence du « chez nous » opposé au reste, qui jusqu’alors apparaissait principalement dans le champ lexical du FN.

C’est l’une des propositions qu’il avait faites lors de sa campagne, en 2015, provoquant l’incompréhension : cette posture dans sa forme ne répond pas au code des marchés publics ni au droit européen.

Christophe Boudot, président du groupe FN, a rappelé que « cela fait 30 ans » que son parti d’extrême droite milite pour la mise en place de ce type d’encadrement du marché public territorial.

Comme à de nombreuses reprises lors des sessions publiques, sa voisine, la conseillère régionale FN Sophie Robert, a invité Laurent Wauquiez à intégrer son parti tant les prises de position et décisions politiques concordent, selon elle.

 

 


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