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Robert Vaughn, le dernier des 7 est tombé

Il était le dernier encore en vie. Le dernier des 7 mercenaires réunis par John Sturges en 1960 pour un film mythique, point de départ, pour le comédien récemment décédé, d’une étonnante carrière aussi longue qu’hétéroclite.

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Robert Vaughn, le dernier des 7 est tombé

Une consécration précoce

Le plus ambigu des Sept mercenaires, celui qui jouait les cadors mais tremblait comme une feuille aux premiers coups de feu, Robert Vaughn l’incarna avec toute la subtilité dont il était capable, à mille lieues du jeu archi stéréotypé de ses partenaires Yul Brynner et Steve McQueen. Cette capacité à se fondre aussi bien dans des rôles de héros sympathique que d’ordure patentée s’est développée dès le tout début de sa carrière.

Fils d’un couple d’acteurs, Vaughn, né en novembre 1932 à New York, entame des études de journalisme à l’université du Minnesota où il remporte en 1951 un prix de meilleur acteur débutant dans un concours radiophonique.

Cette petite reconnaissance lui fait prendre, avec maman, la route de l’ouest et plus précisément celle du City College de Los Angeles où il étudie la comédie. A partir de 1955, il se fait les dents sur quelques séries télévisées avant de se voir ouvrir les portes des plateaux de cinéma dans des rôles non crédités, le plus fameux d’entre eux consistant à tenir une hallebarde dans un coin de décor des Dix Commandements (Cecil B. DeMille, 1956).

Vaughn avec Barbara Rush et Paul Newman dans Ce monde à part, 1959

Encore quelques séries télé (Mike Hammer, Gunsmoke, Alfred Hitchcock presents, Zorro…), une poignée de westerns et c’est déjà la consécration : une nomination aux Oscars en 1959 pour Ce monde à part, de Vincent Sherman, dans lequel il incarne un jeune homme accusé de meurtre défendu par son ami avocat (Paul Newman, grâce à qui Vaughn obtint le rôle).

Il est ainsi repéré par John Sturges qui le déguise en mercenaire pétochard aux côté de Steve McQueen qui deviendra un ami proche et qu’il retrouvera dans Bullitt (Peter Yates, 1968) puis dans La tour Infernale (John Guillermin, 1974). Pourtant, Vaughn avouait au Guardian que sa meilleure année fut 1956 :

« Cette année-là, un mois après être sorti du collège, j’ai joué dans une pièce et lors de la première, j’ai rencontré Natalie Wood avec qui je suis sorti quelques temps. Et une semaine plus tard, je suis tombé sur Burt Lancaster qui m’a proposé deux rôles ! »

Deux mercenaires au repos, McQueen et Vaughn en 1960

A peine s’est-il fait un nom sur le grand écran que Robert Vaughn s’en fait également un sur le petit grâce au succès planétaire de la série Des agents très spéciaux (The man from UNCLE) lancée en 1964 et dans laquelle, incarnant le fougueux agent secret Napoleon Solo, il fait équipe avec le taciturne David MacCallum.

La série surfe sur le succès des films de James Bond mais curieusement, elle ne démarre véritablement qu’à partir de la deuxième saison. Adulé par les fans féminines de Solo, Vaughn est un peu chamboulé :

« A la fin de la première saison, confiait-il au site SFGate, j’ai du faire installer une clôture électrique autour de ma maison pour éloigner les admiratrices. J’ai même essayé d’utiliser des enregistrements de bruits d’animaux pour effrayer les visiteurs mais je n’ai jamais su faire fonctionner l’appareil. »

Trois ans à manipuler des gadgets idiots avec David McCallum dans Des agents très spéciaux

Délirante et quasi-parodique, elle va générer un véritable culte et donnera lieu à plusieurs adaptations pour le cinéma jusqu’à un ultime téléfilm en 1983, Le retour des agents très spéciaux, dans lequel viendra cachetonner l’ex-007 George Lazenby.

Au milieu des années 70, Vaughn s’installe en Angleterre, le temps de jouer dans la série Poigne de fer et séduction (The Protectors), dont il réalisera par ailleurs deux épisodes. Bien que conçue par le légendaire Brian Clemens (Chapeau melon et bottes de cuir, Amicalement vôtre…), cette production avant tout destinée au public américain, d’un format de 26 minutes par épisode, n’atteindra jamais le succès de ses illustres ainées et disparaitra après deux saisons.

Il en faudra plus pour ternir l’histoire d’amour qui unit Vaughn avec Londres (il y rencontrera d’ailleurs sa femme). Il y reviendra régulièrement, d’abord pour apparaître de 2004 à 2012 dans Les Arnaqueurs VIP (Hustle), gros carton de la BBC boudé en France où seules les deux premières saisons seront diffusées dans l’anonymat, puis en 2012 dans la cultissime, interminable et so british série Coronation Street. En 2014, on le retrouve sur les planches de l’ouest londonien dans l’adaptation de 12 hommes en colère, encensée par la critique.

Avec la joyeuse équipe des Arnaqueurs / Hustle

Le pire et le meilleur

Durant les années 60 et 70, sa filmo s’étoffe de grands rôles dans des classiques tels que Le pont de Remagen (John Guillermin, 1969), Jules Cesar (Stuart Burge, 1970) ou encore La cible étoilée (John Hough, 1978). Il est même nominé aux BAFTA pour son rôle de politicien glacial et douteux dans Bullitt.

Mais vers la fin des années 70, sa carrière vire un peu au cauchemar : alors qu’il a débuté en même temps que d’autres pointures telles que James Coburn, Charles Bronson et Steve McQueen, on s’étonne de le retrouver, contrairement à ses illustres collègues, dans un nombre effrayant de téléfilms improbables et autres séries télévisées indigentes, le genre de productions dans lesquelles se terminent les carrières, le genre de séries télé, comme La Croisière s’amuse (dans laquelle il s’embarque en 1981) où l’on s’attend plutôt à retrouver de vieilles gloires oubliées alors qu’il a tout juste un peu plus de cinquante ans.

Est-ce pour changer de Mercedes ou pour agrandir sa piscine qu’il s’est fourvoyé dans les téléfilms Doctor Franken (1980) ou Intimate agony (1983) dans lequel il n’a qu’un second rôle ?

Les exemples de ce type se comptent par dizaines dans cette étonnante filmographie. Et lorsqu’il participe à la franchise Superman, il arrive cinq ans trop tard et se retrouve dans le très raté Superman III (1983) entre deux épisodes de L’agence tous risques. Cet apparent manque de clairvoyance, Vaughn sera le premier à le reconnaitre :

Fin de carrière sur les planches à Londres avec 12 hommes en colère

« J’ai tourné environ cent vingt films, racontait-il au journal The Guardian en 2007, parmi lesquels il s’en trouve peut-être six de bons. J’étais persuadé que Les sept mercenaires serait très mauvais et j’ai refusé quatre fois de tourner dans Bullitt. Je me disais : voilà encore un film idiot avec une poursuite en voitures. »

Parmi ces curiosités, il obtient cependant un Emmy en 1977 pour son rôle dans la mini-série Washington : behind closed doors, tandis qu’en 1978, il s’impose comme l’un des meilleurs méchants confondus par l’inspecteur Columbo (Peter Falk) dans un épisode culte de la série, En eaux troubles.

Parallèlement à sa carrière, le très engagé Robert Vaughn se passionne pour la politique. Il est le premier acteur américain à s’opposer publiquement à la politique du Président Johnson au sujet de la guerre du Vietnam. Sa thèse sur la liste noire instaurée à Hollywood durant les années 50 donne même lieu à un livre, Only victims, qui remporte un franc succès.

Il est également un ami proche de Robert F. Kennedy et sera particulièrement atteint par son assassinat en 1968, seulement deux mois après celui de Martin Luther King qu’il admirait également et qui lui fut présenté lors d’une soirée. Sa désaffection pour l’Amérique fut d’ailleurs l’une des raisons de son exil en Angleterre au milieu des années 70.

Vaughn affronta Columbo dans un des meilleurs épisodes de la série

Malgré des choix curieux, avec sa mort à l’âge de 83 ans s’achève une longue, très longue carrière qui couvrit tous les genres avec des fortunes diverses. Cantonné vers la fin dans des rôles de militaires et d’homme politiques pas très fréquentables, il fit oublier à quel point il pouvait jouer de cette froideur élégante qui faisait merveille dans les classiques de ses débuts.

Il a malgré cela incarné suffisamment de rôles inoubliables dans des films devenus des classiques pour demeurer dans les mémoires cinéphiles comme l’un des plus grands de sa génération.

« Avec de modestes atouts physiques et talentueux, disait-il, je suis parvenu à faire de mes 15 minutes de célébrité, un parcours plutôt chanceux de plus d’un demi-siècle ».


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