Anticor a envie d’enchaîner les coups d’éclat. Après avoir mis sous le feu des projecteurs les millions que coûte l’entretien des anciens présidents de la République, l’association anti-corruption a décidé de s’attaquer à un dossier qui constitue un interminable feuilleton médiatique et politique, celui du chantier de la ligne à grande vitesse (LGV) Lyon-Turin.
Anticor compte déposer une plainte devant le procureur du parquet de Paris, constatant plusieurs écueils dans le montage technique et financier de ce chantier estimé à 10 milliards d’euros.
Petit rappel chronologique : Lyon Turin Ferroviaire, la société chargée de réaliser les études et travaux de reconnaissance liés au chantier, a passé un appel d’offre en août 2014 et a attribué le marché de certification des coûts à la société Tractebel, associée à TUC Rail.
Anticor, pour fonder sa plainte, rappelle l’engagement du Premier ministre en en matière d’indépendance et de rigueur dans la certification de ces comptes, et relève que Tractebel comme TUC Rail ne peuvent apparaître comme des tiers extérieurs et indépendants car :
- « Tractebel a été sous-traitant de Lyon Turin Ferroviaire de 2002 à 2006 et de 2009 à 2013 comme cela apparaît sur son site Internet ;
- le Président de TUC Rail siégeait au Conseil d’Administration de Réseau Ferré de France (EPIC actionnaire à 50% de Lyon Turin Ferroviaire au moment de la passation du marché) ».
Selon Anticor, cette attribution viole le traité franco-italien et l’engagement du Premier ministre, mais aussi les règles européennes en matière d’attribution de marchés publics.
L’organisme anti-corruption dénonce également une situation de conflit d’intérêt, au coeur duquel on trouve Hubert du Mesnil. Il est le président de Lyon Turin Ferroviaire, la structure qui a attribué un marché à Tractebel. Or, Tractebel est une filiale d’ENGIE ; et les dirigeants d’ENGIE ont par ailleurs élu Hubert du Mesnil président de l’Institut pour la Gestion Déléguée (une fondation oeuvrant aux partenariats public/privé).
« Nous signalons au procureur du parquet de Paris des faits graves qui nous semblent susceptibles d’être qualifiés pénalement au titre de l’article 432-12 du code pénal », explique le porte-parole d’Anticor.
Le dossier très chaud du Lyon-Turin était déjà entaché de soupçons de corruption et d’infiltrations mafieuses, sans compter l’infatigable lutte que mène des opposants chevronnés, des côtés italien et français de la frontière, estimant qu’il s’agit là d’un « grand projet inutile ».
Parmi eux, Daniel Ibanez, figure française de la lutte anti Lyon-Turin, qui porte le dossier avec Anticor.
De nombreux recours déposés devant la justice contre la ligne à grande vitesse Lyon-Turin n’ont pas abouti. Mais Anticor a bon espoir de voir une enquête s’ouvrir enfin car son statut lui permet, en cas de classement de sa plainte par le parquet, de se constituer partie civile et, par conséquent, de voir le dossier atterrir sur le bureau d’un juge d’instruction.
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