Logiquement, l’équipement des ménages en voiture se réduit également. Tandis que ceux qui continuent à l’utiliser plébiscitent les parcs-relais. Alors que Lyon a connu un nouveau pic de pollution début décembre, la ville sans voiture relève d’un vrai choix politique.
Gérard Collomb aime comparer Lyon aux grandes villes européennes. Il a lancé à la rentrée des études pour mettre en place un péage urbain comme à Londres ou à Milan. Pourquoi ne concurrencerait-il pas Bruxelles et ses 50 hectares de zone piétonne qui en font la plus grande d’Europe ? Ou Dublin qui a décidé en juin de bannir la voiture du centre-ville ? Oslo s’y met également. La capitale norvégienne va interdire son coeur aux autos d’ici 2019. Sans parler de Paris qui va rendre des kilomètres de quais aux piétons et autres cyclistes l’an prochain.
Alors à quand Lyon sans voiture ? Cela irait en tout cas dans le sens de l’histoire comme le montre l’enquête « déplacements » réalisée entre octobre 2014 et avril 2015 auprès de 28 000 habitants de l’aire métropolitaine de Lyon. Le Sytral, l’autorité organisatrice des transports en commun, commence à travailler sur les premiers résultats de cette vaste consultation qui permet de mieux connaître les habitudes et les besoins de la population.
Le dernier état des lieux datait de 2006. Voici en avant-première les principaux enseignements du cru 2015.
LE PÉRIMÈTRE DE L’ENQUÊTE
Les ménages ont moins de voiture
C’est peut-être là que se situe la vraie rupture. En 2006, l’automobile continuait à progresser dans l’ensemble par rapport à 1995, sauf à Lyon-Villeurbanne où elle stagnait. Cette année c’est fini. Sur l’ensemble du périmètre, on est passé de 1,30 à 1,25 voiture par ménage en une décennie. L’entité Lyon-Villeurbanne est évidemment… moteur : là, on passe de 0,93 à 0,75. Soit une baisse de près de 20% en dix ans !
On compte aujourd’hui 390 véhicules pour 1 000 habitants à Lyon-Villeurbanne et 520 pour 1 000 habitants dans le reste de la Métropole de Lyon.
Pas de secret, évidemment : mieux une zone est desservie par les transports collectifs (bus, tram, trains), moins les gens ont de voiture. Sur le périmètre d’étude, c’est sur la partie Heyrieux – Saint-Jean-de-Bournay – qui ne compte pas de communes importantes et donc de transports en commun importants – que l’on trouve le plus d’automobiles : 720 pour 1 000 habitants.
Le Beaujolais, l’Ain ou le Pays viennois sont mieux lotis. Sur l’ensemble de l’aire métropolitaine de Lyon, 20% des ménages ne possèdent pas de voiture.
Des citoyens qui se déplacent moins… du fait d’internet ?
Si le total des déplacements (7,6 millions pour un jour moyen de semaine) a progressé de 10% par rapport à 2006, il augmente moins vite que la population du territoire. Cela se retrouve lorsque l’on ramène le chiffre par habitant. Chaque personne de plus de cinq ans effectue en moyenne 3,55 déplacements par jour contre 3,75 en 2006. Cette baisse se retrouve chez les « très mobiles » (cinq déplacements et plus par jour) : leur part passe de 29,3% à 25,8% en dix ans.
Parmi les motifs de déplacement, la partie loisirs et achats est plus particulièrement touchée par ce reflux. L’étude émet l’hypothèse d’une meilleure optimisation des déplacements. On peut également imaginer que le développement du commerce en ligne n’est pas étranger à cette tendance.
Il y a évidemment des exceptions dans cette baisse générale. Les habitants de l’Est lyonnais et de l’Ozon se déplacement autant qu’auparavant. Ceux de l’agglomération viennoise se déplacent même plus qu’il y a dix ans.
L’automobile continue de reculer
La conséquence logique de ces constats est que, dans la suite de 2006, la part de la voiture dans les modes de déplacement régresse. Elle représentait 58% il y a dix ans sur l’aire métropolitaine de Lyon. Ce chiffre est aujourd’hui tombé à 53%. Dans le même temps, les « modes doux » passent de 29% à 31% et la part des transports collectifs de 11% à 13%.
La tendance touche tous les territoires de l’enquête. Reste qu’elle est encore plus impressionnante dans la Métropole de Lyon :
La part de la voiture est passée 51,9% en 1995 à 42% aujourd’hui sur le territoire du Grand Lyon.
Et à Lyon et Villeurbanne :
Il faut mettre ces évolutions en regard de la très grande stabilité des motifs de déplacements : 24% pour aller au travail, 16% pour accompagner quelqu’un, 10% pour l’école… Seule l’université progresse sensiblement, passant de 1,5% des déplacements à 3,1%. En revanche, les parties achats et loisirs (18,5% à 17,3%) et « autres dont visite » (29,3% à 27,9%) baissent.
Moins de temps dans des déplacements pourtant plus longs
Ceux qui sont quotidiennement pris dans les bouchons ou l’engorgement des transports en commun vont avoir du mal à le croire : chacun consacre en moyenne 62 minutes par jour à se déplacer. Soit 6 minutes de moins qu’en 2006. Pour les actifs, ce chiffre monte à 75 minutes… dont 27 pour les déplacements domicile-travail (soit trois minutes de plus qu’en 2006).
En revanche, chacun parcourt en moyenne 23 kilomètres (km) contre 21 il y a une décennie. Les actifs avalant environ 34,5 km. Ces moyennes quotidiennes recouvrent évidemment de fortes disparités. Cela va d’environ 13 km à Lyon-Villeurbanne à près de 35 quand on habite dans l’Ain. Le déplacement moyen est passé de 5,80 km en 2006 à 6,67 km aujourd’hui.
L’intermodalité, une solution d’avenir ?
Si 4 millions des 7,6 millions de déplacements quotidiens s’effectuent à l’intérieur de la Métropole de Lyon, il y a quand même 650 000 déplacements qui entrent ou sortent de ce territoire chaque jour.
Pour ceux-ci, les transports collectifs (TER et cars) progressent (8 à 17% contre 8 à 10% en 2006) mais la voiture reste utilisée dans plus de 80% des cas.
Il faut toutefois noter que l’intermodalité explose : + 50% entre 2006 et 2015. En pourcentage c’est alléchant mais en fait « seuls » 157 000 déplacements combinent voiture, train, car et / ou TCL.
La fréquentation des parkings de gare, des parcs-relais et du stationnement destiné à l’intermodalité est quant à elle passée de 20 000 à 35 000 véhicules.
Devant la saturation des équipements, le Sytral a inauguré en novembre dernier son 25e parc-relais à Mermoz.
La seule vraie question qui reste : vaut-il mieux adapter les infrastructures au sens de l’histoire ou effectuer des choix politiques forts pour influer sur le cours des évènements ?
A Oslo, la municipalité a annoncé l’interdiction de la voiture à l’intérieur du périphérique d’ici à 2019.
Les modalités et l’intendance suivront.
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