Ah oui, lecteur, pour les familles et pour les proches c’est une épreuve plus que douloureuse et une peine massive qu’on leur inflige. Après les regards méprisants des bien pensants dans leur environnement, le parloir en révèle la déchirante réalité.
Je te laisse d’abord imaginer la pénurie matérielle qui déboule car outre l’argent qui ne rentre plus qu’à moitié, quand les deux travaillaient, (sinon c’est plus du tout d’argent), toutes les dépenses que déclenche la prison : les voyages pour les visites, les fringues à acheter, les mandats pour la cantine, les avocats qui vivent sur le malheur des gens en faisant semblant d’assurer la défense… puisque l’écrasante majorité des taulards ne peut travailler faute de poste et subvenir eux mêmes à leurs besoins, sans parler des livres, des revues et des CD qui ne peuvent être achetés qu’à l’extérieur.
En collusion avec l’incarcéré ?
Mais surtout l’humiliation que tous ces gens subissent, qui ne tient pas au seul fait que leur mari, leur fils, leur frère ou ami ont été condamnés, mais par la façon dont ils sont traités lorsqu’ils arrivent au parloir, comme si c’étaient eux-mêmes qui avaient été condamnés.
Les matons considèrent qu’on leur octroie un privilège et qu’en conséquence ils doivent se taire et obéir. La menace de suppression du parloir est permanente si jamais ils émettent une critique, aussi justifiée soit-elle.
Le chantage ne cesse jamais. Et par les temps qui courent, avec cette saloperie d’état d’urgence, tu peux te ramasser une perquisition dite administrative ou une assignation à résidence comme qui rigole, surtout quand tu as ton foulard sur la tête. La délation va bon train et il suffit d’une parole de maton pour devenir un ou une radicalisée.
Systématiquement, ils sont suspects et méprisés comme complices potentiels, en tout cas en collusion avec l’incarcéré.
L’attente, toujours elle
D’abord c’est l’attente pour que le sac de vêtements qu’ils apportent soit fouillé, les fringues affectueusement pliées remises en vrac sans considération, puis la façon dont on vient les chercher dans ces cahutes qu’on appellent pompeusement accueil famille où ils entendent les voix des uniformes énoncer les consignes comme des robots indifférents.
A nouveau l’attente, le portique où des armatures de soutien gorges, de chaussures, où les montres et autres bijoux sonnent et qu’au bout de 3 sonneries ils sont refoulés sans aucun état d’âme, même si ils ont fait 300 ou 600km pour venir.
Puis c’est à nouveau l’attente de la répartition des prisonniers qui arrivent.
Enfin le parloir commence, 45 minutes sans confort, sans intimité, avec les matons qui passent sans arrêt regardant dans ces box misérables.
Le déchirement de la séparation, et à nouveau, l’attente pendant que les prisonniers sont, soit fouillés à nu malgré l’interdiction du systématique, soit passent eux aussi sous un portique, au cas où ils auraient donné des objets illicites, et enfin ressortent le cœur lourd.
Je ne parle même pas des enfants qui pleurent et de l’inquiétude qui ronge : 3 heures (en dehors du voyage) pour 3/4 d’heure de retrouvailles !
La parano du prisonnier
Celles et ceux qui travaillent en sont réduits à quoi pour obtenir une visite le samedi, jour évidemment très recherché et bondé ? C’est respecter la dignité, ça ?
Attention, il faut vraiment être là avant l’heure car une seule minute de retard et le parloir est supprimé, peu importe le bouchon, la panne de véhicule, le transport en commun qui a été bloqué ou même le bus raté.
Il y a aussi toutes ces incompréhensions pendant les parloirs car ceux qui viennent ont quelquefois du mal à comprendre qu’un détail devienne un Himalaya, et malgré tout ce dévouement que la parano du prisonnier prenne le dessus tant il est en manque d’affectif et d’humanité. Il attend tout de l’extérieur, notamment l’amour total, inconditionnel, et ses demandes sont d’une exigence absolue.
Il suffit d’un atome invisible manquant pour qu’il en fasse un cataclysme, car cette torture qu’est la prison le rend fou quand elle ne le tue pas et la famille, les proches sont les seuls à qui ils peuvent demander quelque chose.
Le café, les machines pour réserver les parloirs…
Lecteur, si tu ne me crois pas, sans déconner, va, trouve quelqu’un à aller voir au parloir, et tu verras. Teste ce parcours du combattant et reviens me dire comment c’était. Et ne viens pas me parler d’un minimum de surveillance et de sécurité logiques car c’est faux. Ce n’est que du baratin de maton.
Alors, dans ce cloaque qu’est le parloir, tu as les associations bénévoles qui veulent faire croire qu’elles sont là pour soutenir les familles et guettent celles et ceux qui pleurent en silence pour leur sauter dessus et justifier ainsi leur présence mielleuse de collaborateur, ceci malgré que depuis quelques années, elles n’ont plus aucune marge de manœuvre et ne s’occupe, même plus de la garde d’enfants.
Du coup, elles passent la plupart de leur temps à papoter dans leur bureau.
La GEPSA gère tant les machines électroniques à réserver les parloirs que les coins des gamins. Heureusement, l’écrasante majorité des familles et des proches les évitent et les ignorent.
Leur seule tâche c’est de donner des clefs pour les casiers, si elles manquent sur la serrure, où ranger les affaires qui sonnent et les sac à main avec les papiers personnels.
La famille et les proches y sont aussi, en prison
Et elles viennent nous jouer les sœurs Emmanuelle parce qu’elles proposent du café quand les machines à fric sont inexistantes, (ce qui est de plus en plus rare car il n’y a pas de petits bénéfices) ou en panne ?
Ces personnes n’ont juste rien d’autre à foutre quand elles n’ont pas la messe, c’est tout, et elles s’offrent à bon compte une fausse identité d’humanité dans leur ennui de retraitées. Elles sont juste utiles à elles mêmes pour se persuader qu’elles auront leur petit coin de paradis. Viendraient-elles dire quelque chose quand un maton parle de façon méprisante et grossière à un visiteur et l’envoie promener comme une merde ?
Bien sûr que non, car elles verraient aussitôt leur accréditation retirée et iraient tourner en rond ailleurs et les subventions données par la pénitentiaire disparaître.
Alors oui, ma copine a raison, quand quelqu’un est mis en taule, la famille et les proches y sont aussi.
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