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Laurent Wauquiez élu président de région : apprenez à le connaître

Il a été élu ce dimanche soir pour prendre la tête de la nouvelle grande région Auvergne-Rhône-Alpes. Laurent Wauquiez, député-maire Les Républicains, a damé le pion au candidat socialiste et président sortant de Rhône-Alpes, Jean-Jack Queyranne.

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Laurent Wauquiez à la préfecture du Rhône cet dimanche 13 décembre. Crédit : Eric Soudan.

Petit rappel de ses sorties, positions et « valeurs » -puisqu’il aime ce mot- en 7 points.

Laurent Wauquiez à la préfecture du Rhône cet dimanche 13 décembre. Crédit : Eric Soudan.

1. Les élections de 2017 pour horizon ?

C’est d’une victoire large dont Laurent Wauquiez peut se vanter. Il la doit en partie à une dynamique de départ qu’aucun de ses adversaires n’a réussi à enrayer. C’est la première personnalité d’envergure nationale qui revient sur le territoire régional depuis Dominique Perben, si on prend en compte le passage éclair de ce dernier à des élections municipales, perdues en 2008 face à Gérard Collomb. Il faut sinon remonter jusqu’à Raymond Barre, maire de Lyon jusqu’en 2001.

Laurent Wauquiez est une personnalité observée, ses sorties excessives, provocatrices et assumées sont quasi toutes relevées ou raillées sur les réseaux sociaux. Preuve de l’intérêt médiatique qu’il suscite, Raphaëlle Bacqué, journaliste au Monde, est venue jusqu’à Lyon pour suivre son second tour.

Pas de quoi le déstabiliser : il a martelé ce dimanche soir qu’il comptait bien se mettre au travail « immédiatement ». Plus précisément à partir du 4 janvier, date à laquelle il sera élu officiellement à la tête du conseil régional.

Depuis cette collectivité retaillée (7,7 millions d’habitants et un PIB de 230 milliards d’euros), Laurent Wauquiez aura la volonté de rester plus que jamais visible. Bien qu’il ne s’agisse pas d’une entité en capacité d’investir ou encore de bâtir à partir de ses compétences (renforcées avec la nouvelle organisation territoriale), Laurent Wauquiez ne manquera pas l’opportunité de se placer dans le débat national en amont de 2017.

Pendant la campagne, il nous avait dit :

« C’est normal qu’à 40 ans, je pense à l’avenir ».

2. La stratégie (payante) de la droite dure

Ce sont des expressions et qualificatifs qui l’agacent assez vite lorsqu’il les entend chez les journalistes : « droite dure » ou encore « droite de la droite ».

« Ceux qui disent ça n’ont rien compris à ces élections », a-t-il répondu dimanche soir.

Pour lui, « remettre la France la tête à l’endroit » ne peut pas être un mauvais projet, tout comme celui de vouloir, notamment, ne plus augmenter les impôts -sur lesquels la Région n’a pourtant quasi pas de prise directe. Il en veut pour preuve son score.

C’est bien sur le terrain des « valeurs » que Laurent Wauquiez n’a cessé de se positionner, aux dépends de propositions programmatiques adaptées aux compétences régionales. Ses tracts d’entre deux tours, au-delà de ses propos, montrent qu’il a non seulement absorbé la rhétorique mais aussi l’esthétique graphique FN.

A la sécurité, aux impôts, il a ajouté une position anti-immigration et anti-européenne qu’on ne lui connaissait pas.

 

Christophe Boudot, candidat du FN pour la région, avait dit de Laurent Wauquiez avant le premier tour qu’il était son faire-valoir, avant de le traiter de « guignol », entre les deux tours, puis de lui reprocher d’avoir « pillé son programme », à l’issue des résultats finaux.

3. En osmose avec les anti-mariage gay

Laurent Wauquiez a volontiers accepté l’invitation faite par les représentants de la Manif pour tous aux candidats, pour un débat animé par Geoffroy Lejeune, journaliste de Valeurs actuelles, dénonçant tout au long de la soirée un « lobby LGBT ».

Le candidat Les Républicains s’y est illustré. On vous laisse (re)lire le compte-rendu qu’en avait fait le magazine Heteroclite.

Pour rappel, il y a de nouveau exprimé son rejet de la loi autorisant le mariage à tous les couples, son attachement à l’enseignement privé et aux établissements hors contrat, « pour autant qu’ils fassent la promotion de l’assimilation à la France ». Catholiques, doit-on donc entendre (voir le point suivant, n°4).

Le Monde a pourtant relevé que le député Les Républicains s’est montré à plusieurs reprises dans des soirées parisiennes courues, « où se retrouve deux fois par an, autour d’un buffet au champagne, l’élite homosexuelle de la capitale ».

Mais ça, c’était avant. Pour ces élections, Laurent Wauquiez a intégré sur ces listes Anne Lorne, fervente militante catholique anti-mariage gay. La secrétaire nationale « en charge de la petite enfance » au sein des Républicains a déclaré vouloir remplacer complètement le mariage civil par le mariage religieux. Et à l’église, on suppose.

4. Un budget aux associations sabré

Lors de son meeting à Lyon, avant le premier tour, il a évoqué son attachement aux « racines chrétiennes de la France ». Sans y voir de contradiction, il aime rappeler qu’il se montrera intransigeant vis-à-vis de la laïcité. Et juste derrière ce type de propos, le voilà souhaitant lutter contre « les communautarismes ».

Mais surtout, qu’on ne lui dise pas qu’il oppose certains contre d’autres.

Il compte donc sabrer sévèrement les subventions aux associations qu’il jugera « hors des valeurs de la République ». Sans plus de détails.

En revanche, il l’a déjà annoncé : sur un budget actuel d’environ 200 millions d’euros dédié aux associations, il supprimera 100 millions d’euros, soit la moitié si l’on a bien compté.

Laurent Wauquiez à l’annonce des estimations à son large avantage dimanche 13 décembre. Crédit : Eric Soudan.

5. La sécurité, un thème très à propos en plein état d’urgence

Les premiers mots de Laurent Wauquiez, à l’issue de sa victoire de ce dimanche 13 décembre, sont allés vers les thèmes qu’il a portés principalement pendant sa campagne. Celui de la sécurité, « dans les TER, les gares, les lycées » ; celui de la « lutte contre l’assistanat ».

Ce qu’il n’avait pas prévu, ce sont des attentats, commis en France le 13 novembre dernier, qui ont plongé la France dans un état d’urgence… et d’angoisse. De quoi lui permettre de remettre le paquet dans sa campagne sur ce thème chéri de la sécurité (qui n’entre pas dans les compétences régionales), après toutefois une courte et relative trêve -puisqu’il a pu prendre la parole non pas en tant que candidat mais comme député à l’assemblée nationale dès le mercredi qui a suivi.

Il a proposé de faire de la région un « bouclier de sécurité », non pas en la mettant sous cloche mais via de la vidéosurveillance et/ou des portiques dans les TER et dans leurs gares, à l’entrée des lycées. Pour un total de 45 millions d’euros. C’est l’une des propositions qu’il compte mettre en place dès sa prise de fonction, a-t-il juré.

Dans la foulée des attentats, il avait aussi proposé de placer en détention, dans des centres administratifs, l’ensemble des personnes fichées « s ». Une forme de Guantanamo à la française, « la torture en moins », avait-il malgré tout précisé. Il a pu se réjouir la semaine passée, à quelques jours du second tour, car une note a circulé place Beauvau annonçant la consultation du Conseil d’Etat pour savoir si cette proposition est envisageable ou pas.

6. Un story-telling en béton… ou presque

Dans le portrait que Le Monde avait dressé de lui, « Laurent Wauquiez, le bad boy de la droite », on découvrait plusieurs incohérences ou petits arrangements avec la réalité dans les propos de l’ancienne plume de Nicolas Sarkozy.

Comme cette volonté de se rapprocher des classes populaires, le poussant à modifier légèrement son histoire familiale. Cet énarque sorti major de promo a prétendu que son père était un « petit employé de banque ». Monsieur Wauquiez senior était en réalité l’un des dirigeants d’Indosuez, une banque française privée filiale du Crédit agricole. Directeur de la banque, à Lyon, le papa de Laurent est ensuite devenu responsable de sa filiale suédoise.

Laurent Wauquiez raconte aussi qu’une amitié avec Soeur Emmanuelle serait née tandis qu’il faisait de l’humanitaire au Caire, en Egypte. Les journalistes du Monde assurent avoir posé la question à son entourage, et personne n’a souvenir de rencontres privilégiées avec la religieuse.

C’est lelab.europe1 qui refait la liste des éléments de sa bio réécrits par ses soins.

7. Le « cancer de la société française » : sa sortie la plus improbable

Si le député s’est dit ouvert à la transparence des parlementaires sur les biens qu’ils possèdent, sur la question des pauvres, il devient beaucoup plus rigide et poussiéreux.

Sur le RSA, il imagine en 2011, tandis qu’il est ministre de l’Enseignement supérieur, une solution qu’il juge miracle, faire travailler les bénéficiaires de la prestation sociale:

« Cette question de la différence entre le travail et l’assistanat est aujourd’hui l’un des vrais cancers de la société française parce que ça n’encourage pas les gens à reprendre un travail ».

La lutte contre « l’assistanat », c’est son dada. Il a d’ailleurs lancé en 2010 un club de réflexion qui devient motion au congrès de l’UMP de 2012, la Droite sociale, justement affublée de la punch line : « Droite Sociale : défense des classes moyennes – lutte contre l’assistanat ».

Quelques temps plus tard, Laurent Wauquiez propose de privilégier les personnes actives pour l’obtention de logements sociaux, plutôt que les chômeurs. Du même tonneau, en 2011, il déclarait qu’être payé par la sécurité sociale lorsqu’on est malade « n’est pas très responsabilisant« .

Ce dimanche 13 décembre, il l’a répété : il aidera les personnes qui veulent « vraiment travailler », et pas celles qui refusent les formations. Pour ces dernières, fin de la gratuité dans les transports régionaux.

Rendez-vous le 4 janvier 2016 pour comprendre comment Laurent Wauquiez déploiera ses « valeurs » dans sa politique territoriale, en Auvergne-Rhône-Alpes.

 

 

 


#Auvergne-Rhône-Alpes

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