Ce qui se joue à Paris à partir du 30 novembre et localement avec le Plan climat lancé par ce qui était à l’époque le Grand Lyon (désormais Métropole), c’est un constat précis sur l’ampleur des changements qui nous attendent.
Un diagnostic réalisé par la Métropole de Lyon pointe les conséquences prévisibles de ces modifications climatiques dans une agglomération mettant résolument le cap au Sud. Nous vous en révélons le contenu en avant-première.
> A l’occasion du lancement de la COP21 ce jour à Paris, nous replions cet article initialement édité le 10 novembre dernier.
Lyon 2050. Au pied de la statue de Louis XIV, impossible de manquer la basilique de Fourvière. Mais la place Bellecour prend des allures de Puerta del Sol. La ville vit au rythme du soleil madrilène.
Lyon 2100. On distingue toujours la basilique de Fourvière depuis la statue de Louis XIV, mais la place Bellecour possède quelques ressemblances avec la Médina. La ville s’est convertie à la touffeur algéroise.
Quels que soient les résultats de la Cop21 qui s’ouvre le 30 novembre à Paris, il ne sera pas possible d’inverser les conséquences du changement climatique. On ne pourra influer que sur son ampleur. Après tout, comme l’a montré l’Inra avec le projet Climfourel, il fait aujourd’hui aussi chaud à Lyon qu’à Montpellier en 1980.
Alors, rafraîchi par le vent d’automne, vous vous dites que si le soleil dardait ses rayons entre Rhône et Saône comme à Madrid ou à Alger ça ne ferait pas de mal. Certes, mais ce ne sera pas sans conséquences. Canicule, sécheresse, raréfaction de l’eau ou crues: dans le cadre de son Plan climat, la Métropole de Lyon détaille les évolutions que ce réchauffement va engendrer. En voici quelques aspects.
Canicule : la double peine
Coups de chaud, déshydratation, problèmes respiratoires et cardiovasculaires: la minéralité propre au milieu urbain démultiplie les conséquences d’un épisode de chaleur. Être entouré de pierre, de béton et de macadam qui emmagasinent cette chaleur fait en effet grimper le thermomètre là où la verdure apporte une relative fraîcheur.
Selon le document de la Métropole, on a constaté à Lyon en 2003 avec la canicule une hausse de 80% du nombre de décès. Les plus vulnérables se trouvant parmi les personnes âgées. Or, selon les prévisions démographiques, le nombre de plus de 85 ans devrait augmenter de… 80% d’ici 2030.
Inutile de détailler les conséquences de ce vieillissement de la population combiné à l’augmentation programmée du nombre de jours de canicule.
Pollutions : de l’ozone aux pollens
Lyon est aussi connue pour sa pollution que pour ses bouchons. Les conséquences peuvent être mortelles. Selon une étude de la Cire (Cellule de l’Institut de veille sanitaire en région) Rhône-Alpes portant sur Lyon et 18 communes périphériques (soit un million d’habitants), on a dénombré en 2001 et 2002, 424 « décès anticipés attribuables à la pollution atmosphérique (…) ce qui représente 22 décès par an pour 100 000 habitants ».
Depuis, la lutte contre la pollution commence-t-elle à porter ses fruits ? Des efforts, certes, mais qui pourraient être ruinés par le réchauffement climatique. On quantifie aujourd’hui son impact sur la pollution à l’ozone dont les pics surviennent l’été, favorisés par une hausse des températures et un ensoleillement important.
L’Ineris (L’Institut national de l’environnement industriel et des risques) a publié en août dernier une étude européenne qui montre l’augmentation des concentrations en ozone. L’Institut national de l’environnement industriel et des risques note :
« Cette élévation n’est pas uniforme selon les régions (…) Les impacts les plus forts se feront sentir sur la France, l’Espagne, l’Italie et l’Europe centrale (…) cet effet pénalisant ne serait toutefois pas suffisant pour annuler les bénéfices de politiques ambitieuses de gestion à long terme de la qualité de l’air et du climat ».
Le changement climatique en cours a également des conséquences auxquelles on pense moins : modification des zones de végétation, allongement des périodes de pollinisation et donc d’exposition à des allergènes… plus allergisants.
Le document de la Métropole prend l’exemple de l’ambroisie :
« Dans le département du Rhône, près de 17 % de la population est allergique à son pollen. De 2008 à 2011, les dépenses de santé liées à l’ambroisie ont augmenté de plus de 90% et représentent entre 14,2 et 20 millions d’euros en 2011 (coûts en soins ambulatoires) ».
Ressources : non mais à l’eau, quoi
95% de l’eau potable de la Métropole de Lyon provient de ses nappes souterraines alimentées par le Rhône. Problème: cette ressource n’est pas inépuisable.
Sur ce point, le diagnostic est clair :
« Les capacités d’approvisionnements du captage ont néanmoins atteint leurs limites. Au regard des perspectives d’accueil de populations, d’urbanisation du territoire, des risques de pollutions accidentelles et dans un contexte de baisse de la ressource disponible, la recherche de ressources alternatives mobilisables par le Grand Lyon devient une problématique émergente. D’après des travaux du Sage (Schéma d’aménagement et de gestion des eaux) de l’Est lyonnais, les besoins en eau potable à l’horizon 2020 augmenteraient de 10 à 15 % ».
L’agglomération dispose bien de captages périphériques à l’Est, mais la présence de nitrates rend l’eau de moins bonne qualité. Dans une Métropole de Lyon en plein développement où les robinets étaient jusqu’ici grand ouvert, la question du partage d’une ressource moins abondante se pose.
Traitement accru, rareté : le prix de l’eau va augmenter. En cause, la baisse des précipitations, la hausse de l’évapotranspiration et la baisse des apports neigeux dus au changement climatique. Selon les travaux du Plan Bleu Méditerranée cités par la Métropole :
« Aux horizons 2050 et 2100, les écoulements du Rhône pourraient baisser de 15 à 30 % en moyenne, et de 30 à 40 % en été ».
Bonjour l’impact sur la production hydroélectrique et sur le système de refroidissement des centrales nucléaires.
Les sécheresses estivales vont également se multiplier. Selon Météo France, on passerait de 22 à 28 jours par an d’ici 2085. Avec les conséquences que l’on connaît déjà sur l’agriculture. Environ 30% de la surface agricole de la Métropole est équipée de systèmes d’irrigation.
La guerre de l’eau n’en est qu’à ses prémices.
Parallèlement, en hiver, les changements climatiques tendent plutôt vers une augmentation des risques de crues. Même si ces hypothèses demandent à être validées. Pour mémoire, le bassin de vie de Lyon (136 communes) est considéré comme un TRI (Territoire à risque important d’inondation). 38% de la population et 49% des emplois y sont classés en zone inondable (voir les cartes de synthèse). La Vallée de la chimie, par exemple, en fait partie…
Toute la problématique est résumée en une phrase dans le diagnostic de la Métropole :
« Face à la modification du régime hydrologique du Rhône, les systèmes actuels de protection et de prévention contre les crues seront-ils adaptés ? »
On craint que la réponse ne soit pas positive.
Chargement des commentaires…