C’est la fin d’une longue aventure. Qui propulse la France dans le futur : mercredi, la loi sur la transition énergétique a été adoptée à l’Assemblée. Et avec elle, la perspective de voir fleurir partout sur le territoire des compteurs dits « intelligents » (à Lyon, les compteurs Linky ont été testés par ERDF). Autrement dit, capables de dire en temps réel l’énergie que vous consommez. Et d’aboutir à une facture qui ne serait plus seulement fondée sur une estimation.
Dans les faits, ce déploiement est imposé [PDF] depuis 2009 par Bruxelles. Le texte voté ce mercredi (et son article 7) prévoit simplement de sanctionner le fait de ne pas se conformer à cette exigence.
Néanmoins, ce vote relance les craintes soulevées depuis des années par ces compteurs : sont-ils dangereux pour la santé ou pour notre vie privée ? Permettent-ils vraiment aux consommateurs de faire des économies ?
Difficile à dire.
Pour envoyer leurs infos, les compteurs électriques Linky se servent du circuit électrique classique. Ils le doublonnent, en quelque sorte, d’un réseau informatique – c’est la technique des « courants porteurs en ligne ».
Le problème, c’est que cette communication génère des ondes radio. Ce qui inquiète les associations qui alertent sur les dangers de ce genre de technologies. Robin des toits évoque par exemple un « surcroît de pollution électromagnétique ».
Certains parlementaires ont donc demandé à ce que l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation) scrute de près ces compteurs intelligents. Ce qu’elle a fait succinctement à l’occasion d’une vaste étude de 2013 [PDF] visant à trancher l’inextricable débat sur l’impact des technologies sans fil sur la santé.
2. « Ça craint pour notre vie privée »
Si c’est mal fait, ça sent en effet mauvais.
Sur ce point, pas de doute : si aucune précaution n’est prise, les compteurs intelligents peuvent en dire long sur notre vie privée. Sa gardienne, la Cnil (Commission nationale de l’informatique et des libertés), a d’ailleurs été l’une des premières à le faire valoir, expliquant sans détour en 2010 :
« Les informations de consommation d’énergie transmises par les compteurs sont très détaillées et permettent de savoir beaucoup de choses sur les occupants d’une habitation, comme leur horaire de réveil, le moment où ils prennent une douche ou bien quand ils utilisent certains appareils (four, bouilloire, toaster…). »
Une sacrée lorgnette, donc, dans notre quotidien. Qui a forcé la Cnil à formuler de nombreuses recommandations sur la collecte et l’utilisation de ces données.
Bonne volonté vs piratage
De son côté, ERDF se veut rassurant. Sur le site dédié à Linky, la filiale d’EDF garantit :
- « un cryptage » des données ;
- le fait que les compteurs n’ont ni accès au détail de consommations, ni aux données personnelles ;
- une certaine transparence : « Les données de consommation appartiennent au client et ne peuvent être utilisées sans son accord » ;
- et, faute de mieux en la matière, un « code de bonne conduite » engageant les salariés d’ERDF.
3 « C’est chouette pour l’environnement »
A voir…
Reste la question de l’environnement, utilisée comme faire-valoir de ces compteurs : ces derniers permettent-ils vraiment de faire des économies d’énergie ?
Selon l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), ils représentent clairement « de nouvelles opportunités » [PDF], pour peu que les Français s’en emparent. Le problème, c’est que ça ne semble pas vraiment être le cas.
4. « C’est bonnard pour le porte-monnaie »
A voir…
Mais là encore, cette économie fait débat. Et dépend en tout premier lieu de l’investissement des abonnés. C’est également un argument qu’a fait valoir l’Allemagne en rejetant l’adoption des compteurs intelligents.
L’association des consommateurs UFC-Que Choisir va même plus loin, qualifiant l’opération de « mauvais tour pour les consommateurs ». Et concluait en 2013 :
« En l’état actuel du projet, le compteur Linky ne favorisera pas les économies d’électricité : il est conçu avant tout dans l’intérêt d’ERDF et des fournisseurs d’électricité, EDF en tête. »
Des économies pas redistribuées aux consommateurs
L’un des reproches adressés à ERDF est le coût des compteurs, évalué entre 120 et 240 euros l’unité – le déploiement étant estimé aux alentours de 6 milliards d’euros. L’entreprise et l’Etat l’assurent : rien de tout cela ne sera facturé au consommateur. A un détail près selon l’UFC-Que Choisir, citée par Le Parisien :
« Au lieu d’être répercutées sur l’abonnement, les économies permises par le compteur seront conservées par ERDF. Le compteur n’est donc pas gratuit : les économies de consommation ne sont pas redistribuées au consommateur mais plutôt sans surcoût pour celui-ci. »
A l’époque, ERDF avait contesté l’étude de l’association.
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