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Blog du Taulard #41 : « Enfin libre ! mais mon combat contre les prisons continue »

Me voila donc dehors, enfin libre ! Mais mon combat contre les prisons continue. Si je reste anonyme, c’est juste une question de sécurité, car lorsqu’on a un casier, on est directement désigné pour qu’on vienne vous chercher des poux dans la tête, surtout après avoir fait sortir des textes malgré leur surveillance.

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Blog du Taulard #41 : « Enfin libre ! mais mon combat contre les prisons continue »

Il me faut donc attendre la prescription. Car ces gens là n’ont qu’un principe : ne plus jamais lâcher les taulards. Stigmatisés à vie, la marque au fer rouge existe plus que jamais sur l’épaule d’un ancien prisonnier. Je continue donc mes chroniques puisque Rue89Lyon m’en laisse la possibilité.

La logique punitive a éliminé les actions de prévention

Contrairement à ce que beaucoup croit, la prison n’est pas une solution. On nous la présente ainsi pour la justifier mais en vérité elle est un problème et un symptôme.
En effet, aucune des missions qu’on lui attribue n’est remplie. Elle ne protège pas la société, bien au contraire, et n’amende en rien les individus incriminés. La récidive en est la démonstration absolue.

L’accroissement faramineux des gens sous écrou, alors que les crimes, voire les délits, diminuent régulièrement, confirme l’arbitraire flagrant des polices et des tribunaux. Non seulement la logique punitive a éliminé les actions de prévention, mais la répression grandit en dépit de son inefficacité. Cette logique punitive n’est plus reliée à la réalité sociale et dévoile son caractère purement idéologique.

Les prisonniers, nous dit-on, mettent la société en péril, c’est pour cela qu’il faut les enfermer, les punir et les exclure. C’est totalement faux ! Les quelques individus qui pourraient ébranler la communauté sont rares : les serial killers, les violeurs compulsifs ne représentent même pas 0,2 % de la population carcérale (soit moins de 150 individus dans les prisons françaises). On aurait largement la possibilité de les soigner car, tout le monde le sait, les enfermer comme on le fait ne sert a rien, sinon à invoquer une dangerosité dont nos chers dirigeants veulent nous protéger, nous et notre chère liberté.

Quelle rigolade, si je peux dire, surtout lorsqu’on nous évoque conjointement l’ordre public qui va avec.

Ceux qui crient au loup ne le font que pour défendre leurs propres privilèges ou ânonne les mots (maux) de leur maître. La société n’est pas mise en danger par un braqueur de banque. Elle ne l’est pas par le trafic de stupéfiants et les quelques meurtriers le sont pour des raisons qui n’appelleront pas la récidive. Il n’y a donc pas de danger réel et récurent, quoiqu’en dise les politiques et leurs chiens de garde que sont les médias en évoquant le ras le bol de l’opinion publique.

Illustration ©Rq

Les politiques sanctionnent ceux qu’ils mettent à la marge et protègent ceux qui sont au centre

Il faut que tu le sache, lecteur, l’opinion publique n’existe pas, comme le disait Pierre Bourdieu, mais elle est fabriquée principalement pas les médias avec le choix qu’ils font de leurs spécialistes, de leurs interviews ciblés et de leurs sondages aux questions orientées. Il suffit de regarder l’actuelle manipulation pour nommer le PDG de la tété publique (en l’occurrence une pédégère) avec un CSA, prétendument indépendant, pour en être convaincu.

Quand un Eric Ciotti affirme que délinquance et misère n’ont rien à voir, les études prouvent le contraire. Depuis 2002 il y a une progression de 52  % de la population carcérale (de 48 500 à 74 000, bracelets électroniques et semi liberté compris).
Le sociologue Didier Fassin décode :

« Alors que la situation sociale se dégrade et que les inégalités sociales augmentent, on observe simultanément une stagnation des prestations sociales dans les revenus, ce qui revient à un recul relatif compte tenu de l’aggravation du chômage, et à une inflation du nombre des prisonniers, que n’expliquent pas une hausse des crimes et des délits graves ».

C’est juste un exemple parmi tant d’autres.

Donc on voit bien que d’une part que le pouvoir crée les conditions de la délinquance et que d’autre part la punit quand elle se fait jour. Les responsables politiques sanctionnent ceux qu’ils mettent à la marge et protègent ceux qui sont au centre,… dont ils font partie.

Il suffit de regarder objectivement les faits, pour constater que l’exemple même de la délinquance s’incarne dans ces dirigeants qui détournent à qui mieux-mieux ton argent et le nôtre, lecteur, dans les banquiers qui se servent du pognon de leurs clients pour des opérations sulfureuses et leur font payer les déboires de ces malversations tout en s’enrichissant encore plus en temps de crise, dans tous ceux qui se font payer de manière exorbitante des services qui ne les valent pas, à savoir les intermédiaires en tous genres, dans les dirigeants de certains pays qui alimentent le trafic de drogue et qu’on reçoit avec tapis rouge et cocktails, dans la finance où les riches perçoivent des dividendes honteux et les patrons des salaires indécents. Nietzsche avait raison : le droit procède de la force des puissants et les vrais bandits sont en costumes.

Chez les riches, la cocaïne ne fait pas l’objet de descentes de police

Allons dans les détails et prenons à nouveau un exemple. La lutte contre le trafic de stupéfiants vise officiellement à démanteler les réseaux et surtout réduire leurs chefs à néant pour éradiquer la circulation des produits illicites. Or que constate-t-on  ? Que ce sont les peines de prisons contre les consommateurs qui ont augmenté de 74 % et pas un grand chef d’arrêté.

La cocaïne et l’héroïne, drogue dure, bien plus dure que le shit, sont largement minoritaires dans les coups de filet douaniers ou de la BAC et donc dans les tribunaux. On comprend mieux lorsque l’on sait que le shit est le produit qui se vend et se fume dans les cités et zones défavorisées où, comme par hasard se retrouve la population marginalisée et étiquetée immigrés, donc contrôlée plus que de raison par les représentants de l’ordre étatique, alors que les autres drogues se consomment dans les quartiers chics et chez les riches où les descentes de police sont rarissimes et appartiennent davantage aux scénarios cinématographiques qu’au quotidien des lieux de vie huppés.

La prison, censée défendre nos libertés est une vaste carabistouille. On t’enfume, lecteur, on te ment et on te manipule. La taule sert à dissimuler la vision du monde des gens de pouvoir qui font les lois et à éviter que chacun en constate l’échec flagrant de ce même pouvoir, du point de vue humain et collectif.

Il ne faut pas rêver, la liberté ne nous est jamais donnée par les tenants du pouvoir et par les possédants. Ils nous octroient qu’une ridicule liberté conditionnelle. C’est en cela que la prison est à la fois un symptôme et un problème, mais jamais une solution.


#Prison

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Photo : Laura Steen / Rue89Lyon

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