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5 choses à savoir sur le congrès du FN à Lyon

Comment s’organise un congrès qui suscite autant d’opposition ? Lyon est-elle une place forte du FN ? Les identitaires bossent-ils pour ce parti ? Que va-t-il se passer dans la ville ? Des réponses aux questions que vous vous posez, à la veille d’un événement politique dont Marine Le Pen attend beaucoup.

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Des suporters de Marine Le Pen lors de son meeting de campagne à Lyon, en avril 2012. Crédit : T. Francillard/Rue89Lyon.

 Par Laurent Burlet et Dalya Daoud

1. Les médias non grata

2. Ce que Marine Le Pen va (probablement) dire et faire

3. Lyon, fief de Bruno Gollnisch… et des groupuscules de l’extrême droite radicale

4. Le FN sous-traite aux identitaires la gestion de la rue

5. Forte mobilisation contre le congrès du FN

Des suporters de Marine Le Pen lors de son meeting de campagne à Lyon, en avril 2012. Crédit : T. Francillard/Rue89Lyon.

1. Les médias non grata

Les demandes d’accréditation des journalistes de Médiapart et du Petit Journal blackboulées. Raison invoquée et transmise aux journalistes par le FN :

« Nous ne pouvons donner suite à votre demande d’accréditation au congrès du Front national en raison du grand nombre de journalistes et photographes pour des raisons de sécurité ».

Pourtant nous, à Rue89Lyon, nous avons fait une demande d’accréditation, tardive, quatre jours avant le congrès, qui a été validée. La justification de la cohue semble bien être un faux prétexte. Certains journalistes restent plus particulièrement dans le viseur du bureau de la communication du parti. Pour rappel, en mai dernier, Le Point rapportait les propos de Philippe Martel, directeur de cabinet de Marine Le Pen, rendu fou par « ces connards de journalistes institutionnels » et lançant à la journaliste du magazine :

«On va vous marcher dessus. De toute façon, les Français vous détestent. Notre plan média, c’est de vous attaquer à mort. La presse nous est défavorable, pourquoi continuer à collaborer avec elle ?».

LeLab a relevé la véritable raison, donnée sans plus de complexe sur I-télé par Florian Philipot, vice-président du FN, qui considère que ces journalistes sont des « militants anti-FN ». Le Front national a déposé plusieurs plaintes en diffamation à l’encontre du site lancé par Edwy Plenel suite à des enquêtes étayées sur le parti. Son service d’ordre avait également viré la même journaliste de Médiapart lors de sa dernière université d’été en septembre dernier.

Au FN, on est obsédé par les rédacteurs qui travaillent spécifiquement sur le parti. Quand se lance le site lentente.net, qui se charge de scruter sur les réseaux sociaux les dérapages ou démonstrations racistes et homophobes du FN, dans le parti de Marine Le Pen on imagine immédiatement que deux journalistes spécialistes de l’extrême droite, Guillaume Daudin (AFP) et Abel Mestre (Le Monde) en l’occurence, sont à la manoeuvre et, ce, dans le plus grand secret. Ce qui s’avère faux.

2. Ce que Marine Le Pen va (probablement) dire et faire

2017 dans le viseur, gargarisée par son succès aux élections européennes. La présidente du Front national a chaque jour une nouvelle formule pour parler de 2017 et de ce qu’elle veut désormais prouver : son parti serait désormais structuré et prêt pour gouverner. Le congrès à Lyon a dans ce sens son importance : Marine Le Pen y sera réélue et réaffirmée dans son rôle de cheffe absolue du FN. Mais, pour son apparence, le parti devrait présenter un nouveau bureau, « avec de nouvelles personnalités ».

En dehors des considérations structurelles, le FN se prépare donc aux prochaines échéances électorales. Pour les cantonales, par exemple, le FN compte avoir des candidats partout en France, d’où sa conférence du samedi, présentée comme un jeu de « questions/réponses » sur « l’implantation locale ».

Le congrès du FN se structure sur deux jours et aura pour point d’orgue le discours de clôture (dimanche vers 15 heures) de sa présidente. Mais avant cela, des tables rondes thématiques doivent donner l’image d’un parti qui sait sortir de ses thèmes de prédilection, abordant entre autres les libertés numériques, la fraude fiscale, ou encore l’écologie.

Dans son discours final, Marine Le Pen devrait toutefois reprendre les termes obsessionnels de son parti, et qu’elle a largement évoqués lors de ses dernières interventions médiatiques (dans l’émission CPolitique sur France 5, notamment, à voir ci-dessous). Soit l’immigration ou encore, plus dans le détail, l’abrogation de la loi Taubira qui serait alors remplacée par « une amélioration du Pacs ». Le programme pour 2017 ? Il n’en sera pas question. Bruno Gollnisch, élu FN régional et figure historique du parti, l’a d’ailleurs regretté.


Marine Le Pen – 23 novembre 2014 par hurraken75

3. Lyon, fief de Bruno Gollnisch… et des groupuscules de l’extrême droite radicale

Marine Le Pen fait donc son congrès dans le fief du Lyonnais Bruno Gollnisch, qui a été son challenger malheureux pour prendre la succession de Jean-Marie Le Pen à la tête du parti au congrès de Tours en 2011. Il n’est désormais plus dans le premier cercle des dirigeants frontières.

Car Bruno Gollnisch, c’est l’anti-Marine Le Pen. Celui qui a tenté de freiner la « débiabolisation du parti » à laquelle Marine Le Pen tient tant. Lui, c’est le canal historique façon Le Pen père, avec lequel on a pu le voir poser pour une photo, faisant une quenelle.

Il a été, jusqu’à peu, enseignant à l’université Lyon III. Il en a été exclu pour des propos jugés négationnistes, pour lesquels il a finalement été blanchi par la Cour de cassation. Le jour de la reprise des cours, il a pu compter sur une vingtaine de supporters, des membres du GUD, pseudo syndicat d’extrême droite reformé à Lyon et qui n’hésite pas à faire le coup de poings à l’université et ailleurs.

Le président du groupe FN à la région Rhône-Alpes entretient toujours de bonnes relations avec Alexandre Gabriac, conseiller régional alors que celui-ci a été exclu par les instances marinistes pour des photos le montrant faisant un salut nazi. Même s’il a créé son groupuscule « les Jeunesses nationalistes » (interdit en juillet 2013 par le ministère de l’Intérieur).

Deux autre de ses proches ont également été exclus du FN : l’ancien élu de Vénissieux et ancien président de l’Oeuvre française (également dissoute) Yvan Benedetti et le conseiller régional Olivier Wyssa.

Liliane Boury, pourtant proche d’Yvan Benedetti, siège toujours comme conseillère régionale. C’est elle qui a dénoncé les subventions versées à certaines associations pendant que Bruno Gollnisch montrait ses fesses lors d’une assemblée plénière de Rhône-Alpes (voir la vidéo).

Bruno Gollnisch n’est plus lyonnais. Il est parti dans le Var mais reste toujours conseiller régional Rhône-Alpes. Un des ses lieutenants, Christophe Boudot, l’a remplacé à la tête de la fédération FN du Rhône.

Il conduit la même politique de non agression vis-à-vis des groupuscules de l’extrême droite radicale qui ont fait de Lyon une place forte de leurs idées et méthodes de terrain.

  • C’est lui qui a décidé de ne pas placer de liste FN à Vénissieux face aux ultranationalistes Benedetti et Gabriac, pourtant présentés officiellement commun infréquentables , qui avaient réussi à monter une liste. L’élection a depuis été invalidée par le tribunal administratif. Plusieurs colistiers -et notamment des personnes âgées- auraient été abusés.
  • Comme sur le plan national, les liens avec les identitaires sont désormais assumés mêmes s’ils ne sont pas encore officiels. Le FNJ du Rhône se positionne comme « complémentaires » de l’action des jeunes identitaires. Dernièrement, l’un des chefs des identitaires lyonnais, Damien Rieu, qui a été embauché par le maire FN de Beaucaire pour s’occuper de la communication de la ville.

4. Le FN sous-traite aux identitaires la gestion de la rue

Le Front national s’est montré peu disert sur le week-end de mobilisation contre son congrès, monté à l’initiative de plusieurs organisations de gauche.

Tout juste le secrétaire départemental du FN, Christophe Boudot a-t-il lâché quelques pics :

  • Au conseil municipal de Lyon, le 24 novembre, il a lancé à Gérard Collomb une invitation au congrès. « Vous y serez sûrement plus en sécurité qu’en centre-ville », a-t-il déclaré, faisant allusion à la manifestation organisée contre le congrès.
  • Dans les colonnes de Metronews, Christophe Boudot a précisé sa vision de cette manifestation : « L’extrême gauche groupusculaire cherche à faire parler d’elle. C’est une tribune facile pour eux. Mais cela n’entame en rien notre dynamique. »

Le cadre est fixé : manif anti-FN est à l’initiative de « l’extrême gauche » sera « violente ». S’agissant de l’agit-prop, le Front national la sous-traite aux identitaires, habitués à ce type de communication-provocation. Déjà en juin dernier, après les incidents liés aux matchs de l’Algérie, ils avaient tenté d’organiser une manifestation à la Guillotière, lieu de rassemblement des supporters de l’Algérie.

Cette fois-ci, le Bloc identitaire revêt son habit de sortie, celui de la milice privée. Dans un trac d’abord distribué dans les rues de Lyon puis mis en ligne sur leur site, les identitaires proposent « gratuitement ses services aux commerçants » pour « assurer la sécurité de leurs magasins le jour de cette journée de casse et d’émeute anarchiste ». Car, expliquent-ils, « il y a tout lieu à penser que les commerçants lyonnais vont être une nouvelle fois victimes de la racaille et du manque de volonté politique de l’arrêter ».

Ce tract a eu son petit effet car le préfet du Rhône a finalement évoqué les identitaires lors d’un point presse pour expliquer qu’il craint des affrontements. Mais sur le dispositif de sécurité mis en place dans la ville, CRS et/ou hélico : rien ne fuite.

5. Forte mobilisation contre le congrès du FN

Rassemblement contre le Front national à Lyon le 29 mai, au lendemain des élections européennes. © LB / Rue89Lyon

Les communiqués de presse des représentants locaux de plusieurs partis de gauche, comme Europe-Ecologie-Les-Verts, le Parti radical de gauche, tombent les uns derrière les autres pour dénoncer la tenue du raout frontiste à Lyon.

Le « week-end de mobilisation » s’articulera donc en deux temps :

  • Le samedi, une manifestation au départ de la place Jean Macé (à 14 h) jusqu’à la place des Terreaux.
  • Le dimanche, de « l’éducation populaire » avec huit ateliers à la mairie du 8e arrondissement et à la MJC Laennec-Mermoz.

Les organisations signataires de l’appel se donnent notamment pour objectif de « montrer le vrai visage du FN » et de témoigner de leur solidarité « à ceux qui luttent dans les villes occupées par le FN » (sic). A lire : notre article sur cette mobilisation.


#Bruno Gollnisch

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Photo : LB/Rue89Lyon

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