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Philippe Layat, l’icône du combat contre le Grand Stade de l’OL

Depuis quelques jours, les images de sa ferme naviguent dans les médias, sur les réseaux sociaux. Une pétition de soutien vient d’exploser à plus de 80 000 signatures. Philippe Layat donne son visage à un combat qui avait du mal à être aussi médiatisé qu’un Notre-Dame-des-Landes, celui du Grand Stade de l’OL. Pourtant, le « petit paysan » de Décines avait commencé par renvoyer dans leurs cordes les opposants qui voulaient l’inclure dans la lutte.

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Philippe Layat, le paysan qui résiste au Grand Stade de l'OL. Crédit : DD/Rue89Lyon.

Philippe Layat, le paysan qui résiste au Grand Stade de l’OL. Crédit : DD/Rue89Lyon.

Il les accueillait tous sans distinction : les agents du Grand Lyon qui tentaient de lui faire signer les documents d’expropriation d’une part, les opposants au projet du Grand Stade qui tentaient de faire grossir son groupe d’autre part. Le fusil à portée de main.

Lorsque nous l’avions rencontré, l’un des membres d’une association historique dans le combat contre le Grand stade, Carton rouge, nous accompagnait. Tandis que Philippe Layat pestait contre « toutes ces conneries avec les journalistes », alors qu’il avait mieux à faire, comme désherber son champ, le militant tentait de le raisonner :

« On a besoin de médiatiser tout ça, Philippe, arrête ».

Désormais, « Philippe » vient d’être exproprié, sur 9 hectares, pour un euro le mètre carré. Les courriers du Grand Lyon qu’il n’avait pas ouverts au moment de notre visite le notifiaient. Depuis, de l’encre a coulé. Des caméras sont passées. Et les pelleteuses sont arrivées sur place, divisant en deux sa parcelle de terre.

 

Une maquette du futur Grand Stade de l’OL.

 

Petit Journal, blogs en pluie et pétition

Une pétition de soutien en ligne vient d’atteindre plus de 83 000 signatures. Grossissant de plusieurs dizaines de milliers de signatures en quelques heures ce 14 octobre. Ce mardi, plusieurs centaines de personnes lisaient en même temps nos différents articles sur Philippe Layat et le Grand Stade. La page Facebook dédiée au paysan de Décines a atteint plus de 98 000 mentions « j »aime ». De nombreux blogs ont vu le jour, comme les moutons enragés.

Tout s’est accéléré ces dernières heures, et ces derniers jours.

Le Petit Journal de Canal Plus s’est même fendu d’un déplacement jusque dans la campagne lyonnaise. Les animateurs télé semblent s’être donnés un mal de chien pour résumer la situation :

« La bonne nouvelle c’est que Lyon va avoir un tout nouveau stade de foot. […] C’est cool. Et la mauvaise nouvelle c’est que pour construire un stade il faut de la place, et quand il y a du monde autour, il arrive que ça pose problème. »

En dehors de cette courte analyse, le reportage a le mérite de montrer sur place la tranchée de 300 mètres qui coupe désormais la parcelle de Philippe Layat.

De la protestation d’habitants de Décines, dans les lotissements alentours, le combat contre le Grand Stade semble prendre la tournure d’un symbole, porté par la figure du paysan exproprié, écrasé pour un projet dédié au football.

 

« Menaces de mort »

Avant cela, des groupes altermondialistes habitués des luttes contre les grands projets (comme le tunnel Lyon-Turin, l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes…) avaient tenté, en se baptisant Les Fils de Butte et en installant un campement sur les terres de Philippe Layat de faire barrage au « business d’Aulas ». Notamment parce que la cohabitation avec le berger n’a pas été simple (un reportage à écouter ci-dessous), le combat n’a pas duré très longtemps, contrairement au modèle de la ZAD (zone à défendre) de Notre Dame des Landes.

 

Les pelleteuses ont fini par arriver, à la rentrée de septembre. Alors même que le 14 mai dernier, la cour administrative d’appel a annulé les déclarations d’utilité publique autorisant les expropriations. Mais le Grand Lyon a commencé les travaux dans le champ de l’agriculteur. Motif invoqué : un pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat a été déposé et la décision n’est donc pas définitive.

Philippe Layat a passé une nuit en garde à vue, suite à une altercation avec des techniciens du chantier.

Au journal Le Monde, Odile Pagani, chef de projet au Grand Lyon, déclare :

« Quatre-vingts expropriations ont eu lieu. Philippe Layat crie plus fort que les autres. Une expropriation est toujours dure mais certains ont fini par comprendre qu’il était préférable de négocier ».

Elle ajoute :

« Cela fait quatre ans que l’on a affaire à ce monsieur. Des armes ont été enlevées de chez lui. Il est violent et a proféré des menaces de mort ».

Des menaces de mort et de suicide également, qu’il avait proférées devant nous. L’avocat des opposants au Grand stade et élu Europe Ecologie les Verts, Etienne Tête, a déposé un recours devant le juge de l’expropriation ce 17 septembre, pour stopper en urgence les travaux, en attendant la décision du conseil d’Etat.

Et le juge de l’expropriation a finalement rendu sa décision, un peu plus tôt que prévu : le paysan décinois, dont la ferme est possédée par sa famille depuis 400 ans, ne récupérera pas ses terres.

Il rencontre régulièrement les services du Grand Lyon qui lui proposent des solutions, pour continuer à faire vivre ses brebis sur zone :

« Quasiment chaque jour depuis plusieurs semaines, soit dans les bureaux du Grand Lyon, soit sur place chez lui, selon les besoins du rendez-vous », nous précise-t-on à la communauté urbaine.

Après et en plus de la défense de la faune et la flore, la dénonciation de l’argent public investi pour un projet privé (le coût des voies d’accès et des aménagements de transports jusqu’au stade), c’est désormais derrière la personnalité de ce paysan que toute l’opposition au projet s’est rangée.

> Mise à jour le 15 octobre à 11h avec la décision de justice et les rendez-vous entre Philippe Layat et les services du Grand Lyon.

 


#Grand Stade

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