Ce lundi après-midi, ils ont déposé les 49 noms à la préfecture du Rhône qui dispose de quatre jours pour vérifier la conformité de cette liste d’extrême droite.
Liste #Venissieux Fait Front déposée à l’instant à la préfecture du #Rhône ! #Municipales2014 #Lyon #Gabriac #Benedetti
— Alexandre GABRIAC (@Gabriac) February 24, 2014
Le préfet du Rhône saisit le procureur
La préfecture s’est penché sur les conditions d’obtention de certaines signatures. Le Progrès (payant) affirmant que certains colistiers âgés ont été abusés.
Ce vendredi 28 février, le préfet du Rhône, Jean-François Carenco a validé les listes car, dit-il dans un communiqué, « les formalités nécessaires ont été remplies ».
Cependant, le préfet rebondit sur les soupçons d’abus de confiance et a saisi le Procureur de la République au titre de l’article 40 du code de procédure pénale :
« Il appartiendra au procureur d’apprécier si les faits (des « fausses candidatures, ndlr), s’ils sont avérés, sont constitutifs d’une infraction pénale, relate un communiqué de la préfecture du Rhône. (…) Au regard des éléments factuels communiqués sur ce dossier, Jean-François Carenco a saisi le procureur de la République sur le fondement de l’article 40 du code de procédure pénale, et ce d’autant plus que des lettres de personnes figurant sur la liste semblent corroborer cet état de fait ».
Pacte de non-agression entre les ultranationalistes et le FN du Rhône
Alexandre Gabriac et Yvan Benedetti se sont fait élire sous l’étiquette FN. L’un est toujours conseiller régional élu en Isère et l’autre est conseiller municipal de Vénissieux.
Ils ont tous les deux été exclus du parti après l’arrivée à la présidence de Marine Le Pen : Yvan Benedetti, pour s’être déclaré « antisémite, anti-sioniste et anti-juifs » et Alexandre Gabriac pour plusieurs photos où on le voit effectuant le salut nazi.
Alexandre Gabriac et Yvan Benedetti ont continué leurs activités à la tête de deux groupuscules de l’extrême droite radicale (l’Oeuvre française et les Jeunesses nationalistes) jusqu’à leur dissolution en juillet dernier.
Malgré leur exclusion du FN, les relations entre les deux élus et la direction départementale du parti semblent plutôt bonnes. Quand Jean-Marie Le Pen vient en visite à Lyon, ils sont là et toute la famille est de nouveau réunie.
Malgré les bons scores réalisés par le FN en 2012 (38% au second tour des législatives) et par la liste conduite par Yvan Benedetti aux municipales de 2008 (11% des voix), le FN n’y a pas monté de liste pour 2014. Ce qui laisse le champ libre aux exclus, qui ne collent pourtant pas avec la ligne de Marine Le Pen.
La figure tutélaire de Bruno Gollnisch, conseiller régional FN, peut expliquer ce pacte local de non-agression. Yvan Benedetti, Alexandre Gabriac, comme Christophe Boudot (tête de liste FN aux municipales à Lyon) sont des proches de l’ancien patron du FN à Lyon et en Rhône-Alpes, challenger malheureux de Marine Le Pen à la présidence du parti frontiste.
En prime, les ultranationalistes ont choisi l’ambiguïté pour séduire l’électorat de Marine Le Pen.
- Leur liste « Vénissieux fait front » porte le même nom que la liste FN de 2008.
- Sur les tracts et les affiches, on peut lire en gros caractères : « Alexandre Gabriac conseiller régional, élu sur la liste Front National ».
Marine Le Pen demande l’invalidation de la liste
Entre la direction locale et la direction nationale du FN, on ne tient pas le même discours.
Répondant aux questions de Lyon Capitale, le patron de la fédé du Rhône, Christophe Boudot, a expliqué l’absence de liste FN à Vénissieux par le fait qu’« (le parti) n’avait pas réussi à constituer de liste » dans la commune. Il évoque l’idée d’un « recours » contre la liste. Sans plus s’étendre.
Rappelons que la présence d’une liste formée de dissidents du FN à Saint-Priest, autre commune de la banlieue est de Lyon, n’a pas empêché le parti de Marine Le Pen de boucler une liste.
Naturellement, Christophe Boudot n’«appelle pas à voter » pour la liste des ultranationalistes.
Au niveau de la direction nationale du FN, le ton n’est pas tout à fait le même. Stratégie de « dédiabolisation » oblige.
Dans un courrier adressé mercredi au préfet du Rhône, Marine Le Pen demande l’« invalidation » de la liste.
«Il est clair que la dénomination de cette liste constitue un acte de parasitisme du nom Front national, parasitisme autant juridique que politique», écrit celle-ci dans un courrier dont l’AFP (via RTL.fr) a eu copie.
«Il est tout aussi clair que le Front national n’a rien de commun avec les parasites qui animent cette liste», ajoute la présidente du FN qui demande au préfet «pour cette raison de refuser le matériel électoral de cette liste».
Ce recours gracieux sous forme de lettre au préfet semble mort-né si l’on se réfère aux propos de Nicolas Bay, le secrétaire général adjoint du FN, cité par le Progrès :
« On a étudié la possibilité d’effectuer un recours juridique. Mais ça me paraît difficile ».
Ce n’est pas la première fois que le discours local du FN est plus arrangeant à l’endroit de l’extrême droite radicale. Christophe Boudot n’avait pas été particulièrement scandalisé par la une de Minute sur Christiane Taubira alors que le bras droit de Marine Le Pen s’employait à qualifier le journal de « torchon ».
Quelle efficacité de la dissolution des groupuscules de l’extrême droite radicale ?
L’existence de cette liste pose la question de l’efficacité des procédures de dissolution de l’Oeuvre française et des Jeunesses nationalistes, décidées en juillet dernier par Manuel Valls, ministre de l’intérieur.
- L’Oeuvre française, qui comptait quelque 200 membres, était l’une des plus vieilles formations d’extrême droite française. Pétainiste, ce groupuscule s’affichait antisioniste pour mieux diffuser des messages à caractère antisémite.
- Quant aux Jeunesses nationalistes, c’est la branche « jeune » de l’Oeuvre. Le groupuscule a été fondé en 2011 par Yvan Benedetti et Alexandre Gabriac.
Depuis la dissolution, les deux ultras ont multiplié les réunions publiques. Yvan Benedetti et Alexandre Gabriac continuent une activité militante en ayant simplement perdu leur « marque » d’origine. Ils pourraient donc potentiellement être poursuivis pour reconstitution de ligue dissoute.
> Article mis à jour le 26 février à 13h avec les propos de Christophe Boudot et Nicolas Bay.
> Mis à jour le 26 février à 14h15 avec le courrier de Marine Le Pen au préfet du Rhône.
> Mis à jour le 27 février à 11h15 suite à l’enquête du Progrès sur l’obtention des signatures de certains colistiers.
> Article actualisé le 28 février à 16h30 suite au communiqué de la préfecture du Rhône
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