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Les concerts de 2014 à Lyon : la loi du retour

A force de la pratiquer, on le sait, la programmation musicale n’est régie par rien d’autre que les antiques lois de l’éternel retour. Nouvelle année, nouveau printemps, perpétuel recommencement.

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Les concerts de 2014 à Lyon : la loi du retour

On peut, en cette période d’Epiphanie généralisée et à la manière de Nietzsche dans le Gai Savoir, voir l’«éternel retour du même» comme une malédiction ou une bénédiction. C’est tout l’enjeu de l’expérience humaine. Pour ce qui nous intéresse ici, gageons qu’il faille prendre le mouvement renouvelé des saisons musicales, la succession des « cycles de manifestation », pourrions nous-dire en tordant un concept si cher à l’essayiste Pacôme Thiellement, comme une chance de (re)vivre des instants essentiels.

« Réjouissez-vous, fidèles et impies ! »

Fauve

A ceux pour qui rater un concert équivaut à passer à côté de sa vie, quelle belle saison s’ouvre devant vous après un automne de carême : auriez-vous loupé, en vrac, le lutin démiurgique Woodkid (le 21 février à la Halle), les exorcistes de la «Mauvaise Nouvelle» Fauve («Ne crains rien, car je suis avec toi. (…) Je te fortifie, je viens à ton secours, je te soutiens de ma droite triomphante», Esaïe 41 : 10, ce n’est rien d’autre que du Fauve d’Ancien Testament), le 26 mars au Radiant ; la Sainte Trinité branchée London Grammar (1er mars au Transbo) ; le Jésus Van Christ de la 9e heure, Stromae («Papaoutai ? Ne me quitte pas ! Pourquoi m’as-tu abandonné ?») en passe d’évangéliser Halle Tony Garnier puis Fourvière les 26 avril et 12 juin ; auriez-vous pleuré le non envol de Phoenix (correspondance prévue le 28 juin à Fourvière) dans le grand vide de l’abattoir Garnier ; grimacé à la transfiguration ratée de Sarah Bettens (ex-K’s Choice), back au Transbo le 15 janvier ?

Réjouissez-vous, fidèles et impies !

Pensée magique

De quoi se consoler de n’avoir pas anticipé la venue de Depeche Mode le 23 janvier à la Halle, où Saint Dave Gahan jouera une fois de plus les prêcheurs primordiaux d’électro-Delta Machine-blues ? Ou du testament de Philip Glass au Théâtre de la… Renaissance le 18 janvier ? Pas sûr.

Mais il y aura, à l’Epicerie notamment, les 18 et 19 février – jours bénis –, d’autres sommets à (re)gravir, tel l’infranchissable Thee Silver Mount Zion, d’autres rivières à rêver debout, comme la Dream River de l’immense Bill Callahan.

D’autre retours aussi, multiples : la gorgone du Tennessee Valerie June (même lieu, 9 avril) ; le Lazare de l’asphalte Kavinsky (7 février, Transbo) ; un Matt Elliott régénéré, qui disputera au Marché Gare la date du 19 mars aux frères Lawrence de Disclosure (Transbo) ; les éternelles arlésiennes que sont condamnés à être les Coming Soon (25 janvier au Sonic) ; une poignée d’hérétiques pop – sorciers anglais de Tunng (7 février, Marché Gare), électrons teutons The Notwist et philistins d’Of Montreal (24 février et 11 mars à l’Epicerie) et alchimistes de la danse, à savoir Breton (11 février au Kao) et Metronomy, le 30 avril dans un Radiant mis à sac par le Black Rebel Motorcycle Club le 10 février.

Sans oublier, le 6 mars au Périscope, les très lostiens lyonnais des Marquises pour la sortie de Pensée magique, titre qui laisse forcément augurer le meilleur.

Chansons de l’Innocence

Excellents augures également pour les quelques révélations de ce printemps illuminé : pâtre folk bolivien déraciné (David Lemaître le 6 février, Epicerie Moderne) ou (black) sabbat rock-psyché-yéyé façon Limiñanas (15 février, Clacson).

Côté francophone, «la multiplicité règne partout» : du protée québécois Pierre Lapointe (11 février, Radiant) au mystique Rodolphe Burger pour un Cantique des cantiques pré-pascal livré à la Renaissance le 15 avril. Julien Doré continuera, lui, le 28 février à la Bourse du travail, de jouer les métamorphes de l’état amoureux (Bichon devenu lion qui s’écrit louve sur (Løve)), tandis que Vincent Delerm s’attaquera au parallélisme des amants au Théâtre de Villefranche (31 janvier) et que Michel Cloup rêvera en duo de Minuit dans tes bras (le 14 mars au Sonic).

Et puis, le 18 juillet, ressuscitera Saint-Etienne (Daho), sur la scène des martyrs de Fourvière, au son de ses blakiennes Chansons de l’Innocence retrouvée. Tout cela bien sûr si la fin du monde ne s’opère pas dès le 15 février sous les coups de boutoir antéchristiques de JC Satan.

Ou le 24 mai, en l’avènement lyonnais de la nouvelle satrape du mainstream, Miley Cyrus. Nom d’Empereur perse, langue si spectaculairement serpentine qu’elle pourrait parler l’araméen et, non pas comme l’a dit Andrew Loog Oldham de Marianne Faithfull, «un visage d’ange avec les seins d’un démon» mais l’inverse, tel que recraché par le miroir déformant d’une société du spectacle où, pour reprendre Nietzsche, «toutes les choses dansent d’elles-mêmes» et «le chemin de l’éternité est courbe». Courbe comme les ondulations malignes du twerk en sa tentative de damner l’Eden pop pour l’éternité.

Par Stéphane Duchêne, à retrouver sur petit-bulletin.fr dans le panorama culturel de l’année 2014.


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