Je vais pourtant te décrire ma cellule. Quartier maison d’arrêt. 9m2 oui, encombrés d’un lit simple ou superposé (double), d’un meuble, d’une table avec sa chaise, d’un frigo et d’un espace toilette avec lavabo et WC, et dans les nouvelles taules, douche. Même si tu te cloîtres dans ta chambre une journée, tu ne pourras pas inventer le sordide du lieu qui rétrécit déjà l’espace.
Vue sur l’extérieur quadrillée et luminosité contrôlée
Il y a une fenêtre, avec barreaux, évidemment. Mais se rajoute, fixé à ces tubes d’acier scellés, le caillebotis. C’est une grille où les ajours forment des carrés de 2 cm sur 2 et viennent quadriller tous les regards vers l’extérieur (comme tu peux le voir, lecteur, sur la photo de mon blog). Un technocrate pervers a fait mesurer la luminosité pour conclure qu’elle était suffisante pour ne pas nuire à la santé standardisée. Ces caillebotis sont pourtant dénoncés par le Contrôleur général des prisons.
La porte de la cellule ne s’ouvre pas de l’intérieur, tu t’en doutes. Elle possède un œilleton qui se soulève du dehors à n’importe quel moment, quoi que tu fasses, quelle que soit ta tenue. Il te reste les toilettes pour t’abriter du regard inquisiteur, enfin dans les prisons pas trop anciennes. Dans les vieilles, il n’y a que deux parois dans un angle, posées sur des pieds et qui s’arrêtent aux deux tiers de la hauteur de la pièce. Les prisonniers sacrifient une serviette de bain pour fabriquer un semblant d’intimité avec une porte factice.
Échapper à l’œil de la prison
Ha oui ! On sort deux fois par jour pour ce qu’on appelle cyniquement « la promenade », des cours de 40, 50, 60 mètres carrés, entourées de grillages sur lesquels trônent des rouleaux de fils barbelés qui déchirent une partie du ciel quand le regard se porte au-delà du mur d’enceinte.
Et partout, des caméras, directes ou à 180 °. La première chose que l’on fait en y allant est de repérer l’angle mort. Il y en a toujours un. Même si la sécurité est le credo sacré au point d’éliminer toute humanité, les moyens ne suivent pas toujours. Malgré la disposition rectiligne des structures, les architectes ne peuvent éviter ces petits endroits que l’œil électronique n’arrive pas à saisir.
Tu apprends vite à utiliser ces espaces infimes où tu n’es pas sur l’écran de l’autre invisible. Non pour préparer je ne sais quel coup tordu, mais simplement pour éprouver le plaisir d’échapper quelques minutes au système. C’est un réflexe, juste une pulsion de survie.
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