Pochette de l’album « Push The Sky Away »
C’est sans conteste l’un des évènements de l’année : la venue a Fourvière de Nick Cave et de ses Bad Seeds, en pleine tournée de « Push the Sky Away ». Un titre qui sied bien aux circonstances dans lesquelles l’Australien et son groupe vont jouer – sous la voûte étoilée, mais s’il pleut il sera bienvenu de demander au ciel de se pousser un peu. Un titre qui pourrait aussi faire office de résumé d’une carrière ayant toujours repoussé les limites, et même de testament, façon de dire au ciel :
«Pousse-toi de là et fais moi une petite place dans ton panthéon».
« Push the Sky Away » ressemble en effet à une splendide veillée funèbre, à un dernier gospel – le sublime Wild Lovely Eyes, à un dialogue avec des puissances qui nous dépassent, à une murder ballad dont Cave serait le personnage principal – ce Water’s Edge qui résonne du mythique Mercy Seat, merveilleusement repris en son temps par Johnny Cash, et donne des sueurs froides. Voire à une traversée du désert version genevoise (Higgs Boson Blues) où Cave croiserait Robert Johnson, Miley Cyrus et un singe pygmée.
Jubilé
On appelle souvent jubilés ces cérémonies festives censées célébrer le passé pour mieux l’enterrer et, pour tout dire, on aimerait que la moitié des chansons de « Push the Sky Away » soit jouées lors de funérailles – par exemple ce bouleversant Jubilee Street. Mais ce serait oublier que quelque soit son approche musicale et ses périodes esthétiques, du punk gothique aux crooneries féériques, Nick Cave a toujours su avancer sur ce terreau testamentaire, écrire et jouer chaque album comme s’il était le dernier, la maturité, ou devrait-on dire la maturation, faisant le reste.
Il ne faut donc pas voir en ce Nick Cave circa 2013 un homme apaisé et revenu de tout. L’Australien est toujours en tension et, derrière les nappes de violons qui flottent tels des rideaux devant une fenêtre ouverte, il n’y a que rage intime et violence tapie dans les interstices autrefois comblés par les guitares de Mick Harvey – la plus mauvaise des “mauvaises graines“ après le maître Cave. Sauf que cette fois, à travers ces rideaux, Cave entrevoit une lumière qui éclaire au plus profond, comme sur le morceau éponyme. Tout commence par ces mots :
«J’avais raison, le soleil se lève»
Et finit par ceux-ci :
«Certains pensent que c’est juste du rock‘n’roll, mais ça te chope jusqu’aux tréfonds de l’âme».
On ne donnerait pas meilleure définition de Nick Cave.
Par Stéphane Duchêne, dans le supplément Festivals du petit-bulletin.fr
Informations pratiques
Nick Cave & the Bad Seeds + Bertrand Belin + Julia Holter, aux Nuits de Fourvière, à Lyon, Samedi 27 juillet
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