¿ Dónde está Kim Basinger ?, un film d’Edouard Deluc récompensé en 2009 par les Lutins.
Petit rappel historique
Les Lutins du court métrage sont créés en 1998 par Stéphane Saint-Martin. Avec certaines maladresses, ils répondent à un manque : le court métrage n’est primé que lors des César, par une seule statuette, et est constamment et aussitôt oublié.
Qui connaît le César 2013 ? Et qui connaît le Lutin 2012 ?
Cependant, les Lutins étant « les César du court », ils ont permis de faire découvrir, bien avant leur carrière dans le long métrage, des comédiens et réalisateurs tels que Delphine Gleize & Ludivine Sagnier (1999), Eric Guirado (2000), Julien Boisselier (2001), Emmanuel Bourdieu & Alain Guiraudie (2002 – tiens, lui il était à Cannes cette année), Sophie Quinton (2002 & 2003), Juan Solanas (2004 – un p’tit gars qui vient de diriger Kirsten Dunst), etc.
Interview d’Eric Guirado dans le cadre des « Lutins 2011 ».
Par le Tour de France des Lutins, projections des primés accueillies par les cinémas Pathé et Gaumont, le public avait enfin l’occasion de voir des films qui n’existent sinon qu’en festivals.
La démarche a des imperfections (les deux collèges de votants ont par exemple été revus, les choix des lieux de diffusion avaient l’avantage de la concentration – c’est plus facile à mettre en place, mais n’étaient peut-être pas les plus opportuns…), mais l’intention était louable.
Les Lutins du court métrage dérangent
Et puis, peu à peu, les Lutins ont connu des difficultés financières. Et, l’Académie des César, quant à elle, a décidé de promouvoir davantage le format court, peut-être parce que les Lutins empiétaient sur ses plates-bandes (quelle insolence !), peut-être parce que l’Académie a pris conscience de son importance, de son intérêt.
Ont vu le jour Les Nuits en or, Tour de France version César de séances de courts métrages, mais avec des films du monde entier (ce qui pour une Académie qui récompense les films français est plutôt surprenant).
En 2011, le CNC se prend soudainement d’affection pour le court métrage et met en place Le Jour le plus Court, manifestation nationale copiée sur la Fête de la musique : du court partout pour tous pendant une journée, le 21 décembre.
Les cinémas Pathé-Gaumont ont réduit la voilure. La SACD, la Sacem, France Télévisions (des partenaires historiques et, bien sûr, très indépendants) ont quitté le navire. Et, les Lutins sont un peu devenus le village gaulois qui résiste ou le vilain petit canard qui fait du tort au beau tableau que les dominants, César et consorts, essaient de nous vendre.
Le coup de grâce du CNC
Depuis 2009, les électeurs doivent désormais participer financièrement, mais le militantisme des professionnels du format court en a vu d’autres. La profession et le CNC continuent de soutenir et contribuer à cette initiative. Dans l’édito de 2013, son directeur Eric Garandeau « souhaite une nouvelle édition couronnée de succès ».
Mais 2013 est une année encore plus délicate. Les Lutins, faute de soutiens, toquent à la porte du CNC qui, grand méchant loup bien content de croquer le petit cochon, propose un deal : les Lutins du court métrage deviennent partie prenante du Jour le plus Court. Et donc, pas de Nuit des Lutins ce 10 juin 2013.
Sous l’apparence d’une intelligence, d’une pertinence à faire converger des projets, c’est bien ici d’une concentration et d’une négation de l’indépendance que décide le CNC. En l’obligeant à rejoindre son événement national de décembre, le CNC annihile les particularités du projet et le condamne d’ici peu à disparaître.
Si les Lutins deviennent un temps du Jour le plus Court, qu’adviendra-t-il demain des festivals ? Va-t-on conditionner les aides à leur participation à cette manifestation ?
Et comment demander aux diffuseurs audiovisuels de promouvoir le court métrage tout au long de l’année quand le CNC, lui-même, ne l’envisage qu’une fois l’an ?
Le CNC a fait clairement le choix de l’événementiel, de la paillette et de la poudre aux yeux. Le court métrage n’est plus qu’un objet de communication, un flux pour remplir des cases et publier des chiffres flatteurs.
Est-ce que les professionnels et les spectateurs souhaitent une telle politique pour le court métrage ?
Evidemment, non. Mais, pour s’en rendre compte, il faudrait peut-être que le CNC sorte de ses bureaux et de Paris…
Chargement des commentaires…