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Remise à la rue des SDF à Lyon : les 20 millions promis par Duflot envolés

Contrairement aux promesses de 

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Cécile Duflot, la ministre du logement, tous les SDF devront quitter les foyers d’hébergement d’urgence ouverts pour le « plan froid », au plus tard fin juin. Certains ont déjà retrouvé la rue. A Lyon, la préfecture a nommé cela la « décélération ».

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En mars dernier, la ministre du logement avait affirmé qu’il n’y aurait pas de remise à la rue à la fin des plans froids traditionnellement élaborés pour mettre à l’abri les SDF :

«Dans tous les départements, on fait remonter un plan de sortie d’hiver, qui permet de faire en sorte qu’il n’y ait aucune remise à la rue, qu’on puisse pérenniser des lieux d’hébergement».

Depuis, elle s’est montrée silencieuse sur le sujet. Et pour cause. Les structures d’hébergement d’urgence ferment progressivement leurs portes. Les sans-abri se retrouveront donc à la rue. A Lyon, ce processus se nomme « décélération » selon une note de la préfecture du Rhône que Rue89Lyon a pu se procurer (voir plus loin).

Pourtant, les demandes d’hébergement d’urgence n’ont jamais été aussi importantes. Malgré près de 1000 places ouvertes spécialement pour l’hiver (un record), le nombre de personnes qui ne trouvaient pas de places en appelant le 115 (les « sans solutions ») atteignait des niveaux exceptionnels.

Aujourd’hui, entre 300 et 500 sans-abri n’arrivent pas à trouver, chaque jour, de places par le 115.

 

Les structures hivernales ferment contrairement aux promesses

La période hivernale à Lyon avait pourtant bien commencé. On annonçait 1000 places pour l’hiver. Cécile Duflot était même venue à Lyon pour dire que ce « plan froid » s’adapterait « aux besoins ».

Au fil de l’hiver, cette annonce n’a été que partiellement suivie des faits.

A la fin de la période de froid, le ministère du logement, via les services préfectoraux, promettait (encore) une grosse enveloppe financière pour maintenir ouvertes certaines structures à la fin du froid.

Chaque association, mandatée par l’Etat pour accueillir les sans-abri en hiver, jouait le jeu.

L’association L’Hôtel social prévoyait notamment de pérenniser une centaine de places en mobil-homes. Un projet considéré comme « innovant » (voir le reportage vidéo lors de la création de ce « Village mobile »).

 

Mais les caisses de l’Etat sont vides. Ce n’est pas nouveau. Manifestement, le ministère du logement ne l’avait pas anticipé. Au lieu des 20 millions d’euros promis, la région Rhône-Alpes ne touchera que 6 millions. Cet argent ne servira qu’à maintenir ouvertes certaines structures jusqu’à la fin mai ou la fin juin. Exit, donc, les projets de pérennisation.

 

Les sans-droit et sans enfant de moins de trois ans : dehors

Concrètement, la préfecture du Rhône a opéré un tri entre les personnes « insérables » et celles qui ne le sont pas (car en situation régulière).

Dès l’entrée dans les structures ouvertes pour l’hiver, les associations ont dû répertorier la situation administratives et sociales des personnes.

Avec ces informations, la Direction départementale de la cohésion sociale (DDCS) a pu établir un « diagnostic » de la population SDF présente dans ces hébergements. Résultats :

  • 43 % sont « insérables » dans du logement classique ou autres car ils ont des papiers.
  • 57% ne relèvent que de l’hébergement d’urgence car ils sont le plus souvent en situation irrégulière ou sans aucun droit autre que celui d’être hébergé (pour les Roumains notamment).

Dans une note du 22 avril (voir pdf), le directeur de la cohésion sociale du Rhône a rappelé le calendrier des fermetures des structures d’urgence ouverte pour l’hiver.

Cliquer pour accéder à Note_DDCS69_22avril13.pdf

Parce que certaines structures ferment à la fin du mois de mai, la note liste les SDF qui ont « vocation à se maintenir » jusqu’à la fermeture définitive de ses structures à la fin du mois de juin. A savoir :

  • Les ménages avec des enfants de moins de trois ans.
  • Les ménages avec des enfants de plus de trois ans en attente d’une orientation autre qu’un centre d’hébergement d’urgence.
  • Les isolés bénéficiant d’une orientation autre qu’un centre d’hébergement d’urgence.
  • Les ménages « DALO » (qui doivent entrer dans le logement social du fait d’un dossier DALO, ndlr), ceux admis au titre d’une procédure en référé et ceux en attente d’une intégration dans l’expérimentation « Andatu » pour les Roms.

Par élimination, ceux qui n’ont pas « vocation à se maintenir » doivent partir pour permettre la « fluidité indispensable permettant la fermeture des premières structures ».

Il s’agit des étrangers en situation irrégulière, seuls ou avec des enfants de plus de trois ans. Car, faute de papiers, ils ne peuvent pas accéder à d’autres structures qu’un centre d’hébergement d’urgence. Ils représentent près de 600 personnes.

Interrogée sur cette sortie du plan froid, la préfecture du Rhône a confirmé qu’elle se fait actuellement « progressivement » mais a refusé de nous apporter plus de précisions.

Plusieurs responsables de centres d’hébergement nous ont confirmé que depuis le début du mois de mai, des SDF sont remis à la rue.

 

« La politique du thermomètre continue »

Les associations de l’urgence sociale ont salué l’effort important en matière d’hébergement pour mieux souligner les manquements.
Dans un communiqué, le réseau des professionnels de l’urgence sociale parle d’une « politique du thermomètre qui continue » alors que Cécile Duflot avait annoncé l’inverse :

« Sur le terrain, nous ne pouvons accepter que les centaines de personnes que nous avons accueillies et accompagnées tout l’hiver soient remises à la rue comme les années précédentes. »

Ces professionnels soulignent que ces remises à la rue « bafouent la loi » puisque, le droit opposable à l’hébergement prévoit que toutes les personnes accueillies dans une structure d’hébergement d’urgence doit pouvoir y rester.
Ce tri effectué entre personne insérables et celles qui ne le sont pas remet également en question l’inconditionnalité de l’accueil prévu par la loi.

Par ailleurs, les dotations versées aux associations par personne hébergée ont diminué pour permettre une ouverture jusqu’à fin juin. Il a donc fallu réduire les coûts. Dans certains centres d’hébergement, par exemple, on ne sert plus de repas à midi.
Le responsable d’une structure d’hébergement d’urgence, qui a souhaité garder l’anonymat, analyse :

« Nous ne sommes plus en capacité de faire ce que nous demande l’Etat : accueillir plus longtemps mais avec moins de personnel ».

Dans un courrier envoyé au ministère, la Fédération nationale des associations de réinsertion sociale (Fnars) s’inquiète également du « lancement d’appels à projet pour la création de places d’hébergement (…) à des prix de journées très faibles (entre 4 000 et 10 000 euros/place/an) » :

« Ces prix ne permettent pas de garantir le principe de continuité de l’accueil, ni l’accompagnement social global nécessaire pour l’accès aux droits sociaux et la sortie vers un logement pérenne ».

 

La Fondation Abbé Pierre veut mettre un billet

La Fondation Abbé Pierre (FAP) comptabilise à Lyon près de 3 000 personnes qui seraient dehors ou en passe de l’être (car dans des structures d’hébergement d’urgence).

Faute de place dans les structures d’hébergement d’urgence, des familles sont amenées à squatter. Ce qui peut déboucher sur le drame que l’on a connu il y a dix jours, avec la mort de trois Roms dans l’incendie de leur squat.

Pour faire face à cette « situation exceptionnelle », comme la qualifie le directeur régional de la Fondation Abbé Pierre, Marc Uhry, les associations doivent dépasser « l’anathème » et tenter de trouver des solutions avec les collectivités locales et l’Etat, s’ils se montrent « volontaires ». La fondation est même prête à mettre de l’argent sur la table :

« S’agissant de l’Etat et des collectivités, c’est une question de moyens mais aussi de priorité. Par exemple, dans les accueils collectifs, les prix de journées sont très élevés car il faut davantage de travailleurs sociaux. On pourrait imaginer utiliser la réserve foncière des bailleurs sociaux. C’est à dire, des bâtiments achetés par les bailleurs destinés pour en faire du logement social. On pourrait héberger quelques centaines de personnes, avant que ne commencent les travaux ».

En matière de volonté politique, Gérard Collomb, le maire (PS) de Lyon et président du Grand Lyon, semble déjà avoir répondu.

Quelques heures après la mort de trois personnes dans l’incendie du squat du 8e arrondissement, il avait mis en avant les « trois millions d’euros » d’aides aux associations d’hébergement d’urgence, en soulignant que cette initiative se faisait alors que l’urgence « n’est pas la compétence de la municipalité ». Il s’était gardé d’appeler à un effort exceptionnel en matière d’accueil des nécessiteux. Au contraire, il s’était interrogé plutôt sur le droit au logement :

« L’inconditionnalité de l’accueil pose un certain de nombre de problèmes. (…) On ne peut pas accueillir tous ceux qui, à travers le monde, se trouvent en difficulté ».

Ce à quoi, la Fondation Abbé Pierre répond qu’il ne s’agit finalement que de 3 000 personnes à rapprocher des 1,2 millions d’habitants du Grand Lyon.

 


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