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Centrifugeuse de visionnage, épisode 4

Pendant ce temps, dans la langueur putesque du mois d’août, les critiques des dernières choses vues pointent à nouveau le bout de leur nez.

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1313 : Night of the Widow de David DeCoteau

Après l’indispensable 1313 : Cougar Cult, le projet de David DeCoteau se précise : dessiner les fondations d’un univers parallèle homo-érotique à deux de tension et limité à la même villa, théâtre d’homicides exagérément lents – histoire de permettre aux futures victimes de déambuler en slip ou de prendre des douches. Après les cougars décaties, place à la veuve noire au couteau, infâme meurtrière à la démarche désespérément languide. Entièrement recouverte de noir, elle arpente les recoins de la splendide villa. Pas à pas. Encore et encore. Quand l’escalier approche, on est terrorisés à l’idée qu’elle va se le payer marche après marche, sur la même musique atrocement générique de petites angoisses télé-filmiques du vendredi soir. De temps en temps, elle occit un éphèbe en blouson de cuir ou torse nu. Au bout d’une heure, David DeCoteau force le point de rupture : Night of the Widow est en réalité le whodunit le plus con de la création – trois gars et une fille débarque dans une villa, parmi eux, qui est la mystérieuse veuve ? Une pelletée de retournements de situation débiles et plusieurs plans de mec en slip plus tard, le cerveau fond.

Jusqu’à ce que la fin du monde nous sépare de Lorene Scafaria

Depuis sa mémorable composition de prof de philo dépressif dans Little Miss Sunshine, tout le monde sait à quel point Steve Carrell peut être un immense acteur. Tout le monde sauf lui. Ou son agent. Ou les Illuminatis, pour ce qu’on en sait. De petits rôles en grosses purges, sa carrière ne ressemble qu’à une série de rendez-vous manqués avec son réel potentiel. Aussi, il est plutôt plaisant de le retrouver dans cette petite chose à mi-chemin entre le grand public (dans la mise en scène) et l’indépendant tendance (dans l’écriture). Cette déclinaison solaire de Melancholia (un astéroïde nommé Mathilda y fonce vers la Terre) crée même un univers pré-apocalyptique audacieux dans sa première partie, jongle habilement avec les émotions avant de succomber aux sirènes mélodramatiques en fin de course. Dans une version mieux dessinée qu’à l’accoutumée de son personnage de Droopy paumé, Carrell brille de mille feux, parvient même à rendre crédible sa romance avec Keira Knightley. Et c’était pas gagné.

Coriolanus de Ralph Fiennes

Bien dosé, le post-modernisme peut avoir ses avantages – notamment, proscrire toute mention de l’expression « aux résonances contemporaines troublantes » des futures critiques. Mal branlé, le post-modernisme effondre n’importe quelle œuvre sur ses bases. Que Fiennes souhaite passer à la réalisation avec ce texte complexe et méconnu de William Shakespeare, grand bien lui en prenne : sa mise en scène est tout à fait honorable, jusque dans ses tics adorablement ringards (zooms agressifs, caméras à l’épaule parkinsonienne…). Mais n’est pas Simon McBurney qui veut : autant le meneur de l’aventure théâtrale Complicite peut s’emparer de n’importe quel matériau, lui coller de la vidéo, des projections à plusieurs niveaux et des sous-textes politiques à tire-larigot sans jamais larguer son spectateur, autant Fiennes s’embourbe dans ses partis pris. Des GI’s qui défendent une Rome uchronique sous les regards des caméras de télévision, sans jamais dévier du texte original ? Bitch please. Même avec un casting solide (y compris Gerard Butler, qui décrispe la mâchoire), le résultat flirte trop souvent avec le grotesque pour convaincre.

Eddie the sleepwalking cannibal de Boris Rodriguez

Une très agréable variation autour du Colore-moi rouge sang d’Herschell Gordon Lewis, avec un peintre inspiré par les déchaînements sanglants, interprété par le danois Thure Lindhardt. Cette touche d’exotisme permet au réalisateur de s’imprégner de cette distance dont les scandinaves raffolent. Empathie pernicieuse, ironie à froid, baisses de rythme piégées, Eddie the sleepwalking cannibal est un greffon astucieux entre cette approche pince-sans-rire et une intrigue typiquement américaine – au point d’entrer dans le folklore des légendes urbaines (outre le film du pape du gore, c’est également le postulat de La Peinture au Sang, un épisode des Contes de la Crypte avec Tim Roth). Et si en plus l’épilogue louvoie avec celui de Taxidermie, rien à faire, on rend les armes.

Grave encounters des Vicious Brothers

Ses auteurs et (quelques spectateurs égarés) ont présenté le film comme le found footage movie définitif, le truc radical qui allait enterrer tous les Paranormal Activity et autre Projet Blair Witch en une seule bobine. De fait, il se passe plus de choses dans Grave Encounters que dans toute la saga “ portes qui claquent et ses lustres qui bougent“ d’Oren Peli. Cela rend-il le film meilleur pour autant ? Pas sûr. Les ressorts horrifiques sont finalement les mêmes, les dialogues sont toujours aussi indigents, et les Vicious Brothers sont tellement fans de leurs effets spéciaux qu’ils les refourguent jusqu’à les vider de leur efficacité.

Dark souls de César Ducasse et Mathieu Peteul

Si chaque possesseur de caméra numérique se met en tête de réaliser un film, le futur du cinéma pourrait bien ressembler à cet océan de vide, cet interminable voyage dans le néant pseudo-stylistique qui ne raconte rien, ne va nulle part, et semble en être très content. Seule la perceuse dévolue aux meurtres en sort grandie.

Alyce de Jay Lee

De la part du réalisateur du formidablement crétin Zombie Strippers, rien ne laissait présager cette singulière réussite, introspection dans la psyché perturbée d’une junkie en plein bad trip après la chute “accidentelle“ de sa meilleure amie. Avec un budget qu’on devine rachitique et des thématiques assez rebattues, Jay Lee gagne ses galons de metteur en scène avec un panache que ne laissaient absolument pas prévoir ses joutes de stripteaseuses mortes-vivantes. Tous les partis pris se justifient au fil de ce récit tortueux, en immersion dans un esprit en pleine éruption incontrôlée. Les changements d’ambiance rendent claustro, les scènes à l’hôpital sont terrifiantes, les seconds rôles, du flic suspicieux au dealer inquiétant, sont tous excellemment castés, et la fin est l’une des meilleures vues récemment dans une fusion entre cinéma d’horreur et cinéma d’auteur.

Cross de Patrick Durham

Une série Z produite, interprétée, portée à bout d’épaule câline par Brian Austin Green – oui, de Beverly Hills ; cet immonde têtard dont le dernier fait d’armes remonte à son humiliation dans Domino de Tony Scott (et encore, il partageait le mérite avec le putride Ian Ziering). Pour ce come-back de la dernière chance, Brian s’entoure bien : Michael Clarke Duncan, Danny Trejo, C. Thomas Howell, Vinnie Jones… même Tom Sizemore vient faire coucou avant un autre tour en rehab. Claquer toute la thune dans le casting est un choix qui se respecte. Sauf si on essaie de réaliser un film de super-héros un minimum épique. La disproportion entre les ambitions du script et le rendu exige la suspension d’incrédulité d’un enfant de quatre ans, même avec quelques saupoudrages de second degré. En fait, on passe plus de temps à s’inquiéter pour l’état de santé de Tom Sizemore qu’à suivre l’intrigue.


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