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2012 : Thibaut votera Sarkozy… même s’il le voit perdant

« Parcours d’électeurs » est une série à suivre sur Rue89Lyon, qui devrait nous mener jusqu’aux prochaines élections. Le principe : des portraits d’individus réalisés à travers le prisme de leurs votes passés et de leurs intentions pour 2012. Thibaut, 26 ans, vote par tradition à droite. Il votera à nouveau Nicolas Sarkozy sans vraiment croire que la politique peut s’opposer au dysfonctionnements économiques. Ni même que le président gagnera.

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Comme en 2007, Thibaut sait déjà pour qui il va voter. Il votera UMP, même si la défaite lui semble de plus en plus probable. La fidélité à ses propres valeurs lui impose d’aider le président jusqu’au bout par son vote. Il fait partie des 28% de Lyonnais qui constituent le socle potentiel de Nicolas Sarkozy sur Lyon, à en croire un sondage publié dans Tribune de Lyon le 8 mars. Il est, selon ses propres mots, « un mec de droite ».

Thibaut est comptable en CDI. Sur son temps libre, il étudie l’expertise-comptable pour embrasser une carrière plus ambitieuse. Son père est médecin généraliste. Chez lui, tout le monde vote à droite. « Mes parents observent le jeu politique depuis longtemps. Et même s’ils ont pu être déçus par le passé, ça n’a jamais suffi à les faire changer de camp. » Quelle valeurs les animent ? « Le travail qui paie, qui paiera toujours »

« Je ne sais pas s’il a réussi, mais Sarkozy a tenté d’incarner ça en 2007, explique Thibaut. Cela va au-delà du « travailler plus pour gagner plus ». Je suis totalement convaincu par exemple qu’il ne faut pas avoir peur de la mondialisation. Il n’est tout simplement pas envisageable pour moi de dire : je vote contre le capitalisme. Pour moi, on n’a pas le choix. Il faut aller de l’avant. »

 

« J’aurais voté DSK »

N’a-t-il jamais songé à s’encarter ? Un ami de l’UMP lui avait proposé après 2007, mais il avait décliné. « Moi je regarde la politique avec intérêt, comme un Français moyen, sans plus », décrypte-t-il. Cette posture lui permet d’évaluer en toute liberté le niveau de la campagne actuelle.

« C’est très différent des campagnes antérieures, remarque Thibaut. Les propositions sont totalement masquées par un ensemble de petites attaques diverses, gauche et droite confondues. Je ne sais pas qui a commencé à lancer les piques, mais on n’a pas le véritable débat d’idées auquel on devrait avoir droit. »

Il aimerait entendre parler d’économie et de dette publique. Pour le satisfaire, nous lui proposons de regarder un morceau choisi de l’émission « Des paroles et des actes » du 6 mars 2012, consacrée à Nicolas Sarkozy. Au programme : le storytelling du « président-candidat », son positionnement à droite et son ambition économique pour la France (la fameuse compétitivité). En prime : un débat global avec deux pontes, Laurent Fabius puis Franz-Olivier Gisbert. C’est ce dernier aspect de l’émission qui attire spontanément Thibaut : l’incarnation du débat gauche-droite. Il regarde l’intégralité de la séquence. Après plus de quarante minutes d’échanges, il constate :

« Je crois que le charisme joue dans une élection. Hollande, je ne le vois pas du tout dans le rôle du président. C’était encore pire avec Royal. Alors que Fabius et Sarkozy, on voit bien qu’ils en ont sous le pied. »

 

Extrait du débat Fabius-Sarkozy le 6 mars 2012 sur France 2

 

La conversation débouche sur Dominique Strauss-Kahn, le candidat de gauche un temps favori des gens de droite, avant d’être désintégré par ses affaires de mœurs. « Je le voyais président, assure Thibaut. J’aurais voté pour lui ! Face à Sarkozy à l’heure actuelle, j’aurais écouté très attentivement ses propositions sur la croissance. Pour moi, il avait une vraie valeur économique. Il aurait eu une vision de l’évolution du pays supérieure à Hollande et peut-être même à Sarkozy. »

 

« Une question d’éducation parentale »

S’ensuit une discussion sur les meilleurs leviers pour endiguer la dette française : hypothétique croissance, réduction des dépenses, augmentation des impôts… « Les médias ont clairement montré le drame grec. Pour l’éviter, on peut effacer une partie de notre ardoise. C’est difficile, il faut trouver un subtil dosage dans les dépenses pour soutenir la croissance, mais on peut », assène Thibaut.

Entre Chirac et Sarkozy, il a d’ailleurs choisi :

« Pour moi, Chirac était un très bon président à l’étranger. Mais en France, il a beaucoup parlé sans jamais agir. Alors que Sarkozy, même si ça n’a pas forcément plu, il a vraiment agi. Pour faire des réformes, il faut accepter de voir son projet évoluer, s’écarter du but recherché, et essuyer des plâtres, tout un tas de conservatismes. Mais on ne doit pas reculer. »

Il y a dans la discussion comme une atmosphère d’acceptation de l’alternance. Exemple au moment d’aborder la réforme de l’éducation, fer de lance du programme de François Hollande (confié à Vincent Peillon et ses équipes) : « Embaucher 60.000 fonctionnaires me semble infaisable », lance d’abord Thibaut, sûr de ses valeurs. Moi, je fais 38 heures déclarées. Mais réellement, j’en fais beaucoup plus. Les profs doivent faire pareil. Il y en a qui ne font même pas 35 heures. » Avant de nuancer :

« Je ne suis plus à l’école depuis longtemps. S’ils sont désormais 30 à 35 élèves par classe, ça change peut-être la donne. Les ados ne sont plus pareils aujourd’hui. Mais je crois que c’est plus une question d’éducation parentale qu’un problème du nombre d’enseignants. »

Sa conclusion : il faut probablement faire au moins une pause dans le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux dans l’éducation nationale. Précisément la phrase que Nicolas Sarkozy n’a pas osé prononcer à Montpellier dans son discours sur la question.

 

« L’échec » de Nicolas Sarkozy

Face aux « extrêmes » frontistes, qu’il rejette en bloc, Thibaut se dit finalement que la droite et la gauche se retrouvent sur l’essentiel : la modération. Il accepte donc spontanément l’hypothèse d’une présidence Hollande, qui ne changerait « pas grand chose ». Dans son schéma, François Bayrou fait pour l’instant office de figurant malgré son discours sur la dette.

 

Débat Valls-Bayrou le 8 mars 2012 sur France 2

 

Dans le quinquennat écoulé, Thibaut ne trouve rien à redire sur le style Sarkozy. Mais ces cinq ans lui auront démontré que la politique « ne peut pas tout » face aux enjeux économiques. C’est là que réside véritablement « l’échec » de Nicolas Sarkozy à ses yeux. D’où un certain désenchantement, une acceptation du possible changement de cap dicté par la majorité des Français, et un intérêt vif pour l’ailleurs et l’émergence des nouveaux géants, la Chine et l’Inde.


#Élection présidentielle

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