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Les syndics abusent en 5 étapes

Immo / Quatre syndics de copropriété seulement respectent les lois et règlements en vigueur. C’est la conclusion que tire « 60 millions de consommateurs » qui a publié ce mercredi 25 janvier une enquête nationale décortiquant 280 contrats en provenance de leurs abonnés. Cinq grands abus reviennent quasi systématiquement.

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La revue de défense des consommateurs a analysé plus finement les sept grands réseaux nationaux (Foncia, Lamy-Nexity, Urbania, Citya, Immo de France, Oralia et Sergic). Verdict : aucun ne dépasse la note « insuffisant ». Quatre écopent même de la mention « très insuffisant ».

« 60 millions de consommateurs » a particulièrement ciblé l’agglomération lyonnaise en passant au crible 50 contrats de ces professionnels de la gestion des copropriétés. Le constat est identique : tous sont hors-la-loi et seulement trois sont jugés « globalement conformes ».

Dans les colonnes du Progrès, le vice-président de l’UNIS Lyon (Union des syndicats de l’immobilier) a qualifié de « palmarès à charge » cette enquête, en avançant comme argument que les « petits syndics, pâtissent de certaines pratiques des groupes ».

Malheureusement, comme le souligne encore une recommandation de la Commission des clauses abusives (CCA) du 15 septembre 2011, qui pointe vingt-quatre types de clauses abusives ou illicites, ces mauvaises pratiques sont généralisées.
Contacté par Rue89Lyon, le président de l’Association de Responsables de Copropriétés (ARC) Rhône-Alpes, Luc Delcroix, ne se dit pas « surpris » :

« C’est ce qu’on constate tous les jours. On se fait tondre par les syndics. La loi doit se faire plus protectrice pour les copropriétaires ».

 

1/ La Gestion courante : Double facturation assurée

La pratique repérée par « 60 millions de consommateurs » consiste à baisser les frais de gestion courante d’une part pour, d’autre part, augmenter les frais de gestion exceptionnels.
Il faut en effet faire la différence entre les “prestations de gestion courante” et les “prestations de gestion exceptionnelles”. Les premières sont des tâches que doit réaliser le syndic et pour lesquelles il est payé au forfait. Une liste du Conseil National de la Consommation (CNC) reprise par un arrêté entré en vigueur en juillet 2010 (arrêté Novelli), énumère les tâches de base minimales qu’un syndic doit effectuer. Pour un bon prix, compter 120 euros (TTC) par lot et par an selon l’ARC. Comme leur nom l’indique, les “prestations exceptionnelles” varient d’une année sur l’autre et ne peuvent pas faire l’objet d’une forfaitisation. Or, dans la plupart des contrats, on relève notamment des « frais administratifs » qui, par nature, reviennent chaque année et sont facturées donc en plus d’un forfait de base. C’est une ligne qui n’a rien à faire dans le contrat.

 

2/ Vie de la copro : des surfacturations exorbitantes

« 60 millions de consommateurs » dresse une liste non exhaustive des tâches réalisées par le syndic et facturées au prix fort.

  • Les photocopies : à Lyon par exemple, Foncia a pu facturer 0,80 euros la photocopie alors que l’Agence Centrale SAS (à Meyzieu), qui fait partie des trois syndics les mieux classés dans le Grand Lyon, fait payer ses photocopies 0,10 euros.
  • L’état daté. C’est le questionnaire qui doit être rempli par le syndic à destination du notaire lorsqu’il y a une vente. Cela nécessite, selon les auteurs de l’enquête, environ deux heures de travail mais il est facturé entre 200 et 600 euros.
  • La mise en demeure. C’est une nouvelle mauvaise pratique, relevée par l’enquête, que l’on trouve surtout dans les grands réseaux. Au lieu d’envoyer une simple lettre de relance quand le copropriétaire n’a pas payé, le syndic préfère directement lui faire parvenir une mise en demeure qui est facturée entre 15 et 50 euros.
  • Frais pour rejet de paiement. Cela entre également dans la catégorie des nouvelles pratiques. En cas de rejet de paiement, outre les frais bancaires que le copropriétaire va payer, il doit au syndic des frais de rejet. Comptez entre 20 à 50 euros.

 

3/ Le compte séparé : le syndic joue avec l’argent de la copropriété

Tous les copropriétaires connaissent bien les “avances de charges”, ces sommes que le syndic vous demande de verser avant d’entamer des travaux. Depuis 2000, dès la signature du contrat, le syndic a l’obligation d’ouvrir un compte séparé pour placer ces sommes souvent très conséquentes. Mais il peut obtenir une dérogation à l’AG, ce qu’il obtient souvent en arguant que cela permettra de faire des (petites) économies sur les frais bancaires et de gagner du temps dans le paiement des prestataires. Un problème que soulève le président de l’ARC :

« Entre 500 et 1 000 euros sont facturés en plus pour l’ensemble des copropriétaires s’ils optent pour un compte séparé. Il faut changer de réglementation pour interdire toutes dérogations possibles ».

En l’absence de compte séparé, finie la transparence sur l’usage de l’argent des copropriétaires. L’affaire Urbania en est l’illustration. Le réseau est suspecté d’avoir ainsi collecté près de 500 millions d’euros, soit plus de trois fois son chiffre d’affaires annuel, et réussi grâce à des “comptes miroirs” à emprunter une somme équivalente pour racheter des concurrents et se hisser au troisième rang français. Urbania a connu quelques problèmes à rembourser les fameux 500 millions. Le groupe a dû son salut à l’arrivée du fonds d’investissement IPE et à l’abandon par les banques de la moitié de leur créance.

 

4/ Le suivi des travaux : un engagement qui ne vaut rien

Lorsque des travaux sont décidés, le syndic est rémunéré pour en assurer le suivi. Ses honoraires sont libres et doivent, depuis la loi Boutin, du 27 mars 2009, être votés à part, pour chaque chantier engagé. Or c’est une pratique « quasi unanime » relevée par « 60 millions de consommateurs » : les syndics appliquent un taux fixe, identique pour tous les chantiers alors que le montant de la rémunération en cas de travaux doit se négocier chantier par chantier.

 

5/ Les filiales de syndic : des tarifs sur-mesure

Les gros groupes comme les petites régies ont des filiales, notamment dans l’assurance. À chaque assemblée générale, le syndic peut proposer un assureur. Mais, il ne fait généralement pas la démarche de préciser, dans une résolution, s’il y a un lien capitalistique entre cette société et le syndic. Le risque est que la facture soit plus salée. Lionel Maugain, co-auteur de l’enquête, explique un phénomène classique :

« Que ce soit pour une société qui appartiendrait au même groupe que le syndic ou pour toute autre entreprise, s’il n’y a pas de mise en concurrence, il y a de fortes chances pour que les copropriétaires payent le prix fort la prestation. Dans une saine gestion, il faut au moins que les copropriétaires aient à leur disposition trois devis ».


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