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Chez Laurent Wauquiez, la culture et sa vice-présidente absentes des radars

Un dossier « affaires culturelles » est enfin inscrit à l’ordre du jour de la prochaine commission permanente du conseil régional. Jusque là, sous la houlette de Laurent Wauquiez, la culture en Auvergne-Rhône-Alpes a été relayée au rang d’enveloppes attribuées ici et là, sans jamais revêtir l’aspect d’une politique étayée, lisible et surtout défendue.

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Florence Verney-Carron, vice-présidente déléguée à la culture et au patrimoine, en assemblée plénière (février 2017) ©Léo Germain/Rue89Lyon

On aurait aussi bien pu titrer « La culture, ce caillou dans la chaussure de Laurent Wauquiez : saison 2″. Mais cela n’aurait pas été tout à fait exact. Au début de son mandat (décembre 2016), la raison avancée de l’absence de politique culturelle claire était que l’exécutif se trouvait dans une phase technique d’analyse de l’activité sur les deux territoires, Auvergne et Rhône-Alpes, tout juste fusionnés.

Désormais, il semblerait que les dossiers culturels ne constituent plus seulement un sujet un peu embarrassant pour le président de région Les Républicains, mais carrément le dernier de ses soucis. Et c’est quasiment affiché.

Les commissions permanentes, qui permettent aux conseillers régionaux de prendre des décisions selon les thématiques, n’avaient pas audiencé les dossiers culturels depuis plusieurs mois. La prochaine, mi-mars, devrait notamment servir à entendre Serge Dorny, le directeur de l’Opéra de Lyon. Pas sûr que la pile de demandes des différents acteurs (et notamment ceux programmant des festivals dont la tenue est imminente) soient passée en revue.

Parmi les victimes de cette mise au placard de la culture, on trouve à l’évidence ceux qui la fabriquent et qui, jusque là, comptaient sur le soutien de la collectivité, mais aussi, d’une certaine manière, la vice-présidente en charge de la question, Florence Verney-Carron.

En chiens de faïence

Depuis un an, les interventions sur les questions culturelles en assemblée plénière frôlent le néant (le numérique étant abordé sous son angle éducatif par l’élue Juliette Jarry).

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Derrière la radio éteinte, on trouve Florence Verney-Carron, nouvelle venue en politique embrigadée par Laurent Wauquiez pour son aura de communicante très assise sur le territoire et sans doute aussi pour son goût personnel (et familial) pour l’art contemporain -« et pour les artistes« .

Son rôle est toutefois bien compliqué à définir.

La dernière subvention attribuée par les conseillers régionaux a été votée il y a quelques semaines, non pas au cours d’une commission « affaires culturelles » mais au cours d’une commission « finances ». Et pour cause, il s’agit d’une aide de 425 000 euros attribuée au Transfo, agence auvergnate dédiée au développement culturel sur le territoire, pour… le versement d’indemnités à ses salariés, tous licenciés.

Capture d’écran du site du Transfo en Auvergne. DR

La raison de cette coupe nette et lourde de conséquences, invoquée par Florence Verney-Carron mais aussi par Laurent Wauquiez lui-même, en forme d’avertissement et alors qu’il était en campagne pour la présidence de la Région : « il n’y aura plus d’intermédiaire » entre la collectivité et les acteurs culturels.

Si ce principe est suivi à la lettre, d’autres agences permettant la mise en réseau des acteurs culturels et la promotion de leur activité artistique et économique, peuvent commencer à trembler -comme La Nacre (dédiée au spectacle vivant) et l’Arald (dédiée au livre) en Rhône-Alpes. La première a déjà vu sa subvention amputée de 63 000 euros et la seconde de 100 000 euros.

Le Transfo a sans doute eu la tête coupée de façon plus nette notamment parce qu’on y trouvait des ex-élus socialistes, « recyclés là », nous raconte-t-on. Ce qui lui donnait des contours un peu trop politiques. L’agence a ainsi fait les frais de ses choix de fonctionnement orientés, ou encore de dysfonctionnements passés et médiatisés.

Cette agence désormais enterrée n’est pas la seule sur la liste des structures culturelles en danger, faute d’aides fléchées de la part de la Région. Laurent Wauquiez n’avait pas envie, dans un premier temps, de répondre au cliché qui voudrait que « la droite ne s’intéresse pas à la culture car c’est un truc d’électeurs de gauche ». Mais un épisode l’a échaudé et certainement vexé durablement, celui des sifflets qui ont couvert son entrée sur scène lors de la soirée d’inauguration du festival de cinéma Lumière à Lyon, en octobre 2016.

Si le microcosme de la culture a tenu à montrer son désaccord et son désamour au président de Région, notamment avec les positions qu’il avait prises à ce moment (un refus par principe d’accueillir des migrants), Laurent Wauquiez a décidé de bien le lui rendre.

Une vice-présidente sur le fil

Florence Verney-Carron, vice-présidente déléguée à la culture et au patrimoine, en assemblée plénière (février 2017) ©Léo Germain/Rue89Lyon

Nous avons sollicité Florence Verney-Carron à de nombreuses reprises, pour parler notamment de la fin du Transfo et des « intermédiaires », mais aussi plus largement de sa vision de la politique culturelle à mener dans la deuxième région de France. Une demande à laquelle elle nous avait assuré dans un premier temps vouloir répondre.

Entre temps, au moins un article la concernant, récemment paru dans la presse, lui aura certainement fait renoncer à un échange avec un journaliste : le mensuel Lyon Capitale est revenu dans son numéro du mois de mars sur la position on ne peut plus inconfortable de la vice-présidente.

Florence Verney-Carron est l’ex-directrice de la communication de l’agence Communiquez, qui travaille entre autres au service du leader mondial de l’événementiel basé à Lyon, GL Events. Et en février dernier, la vice-présidente à la culture, qui a lâché son poste chez Communiquez (mais dont la direction a été confiée à son fils), s’est retrouvée dans une situation pour le moins embarrassante : elle a voté en commission permanente une subvention de 40 000 euros au profit de… GL Events.

Aurait-elle dû se retirer du vote, pour éviter cette situation assez probable de conflit d’intérêts ? « Pas du tout », assurent Florence Verney-Carron tout comme Olivier Ginon, patron de GL Events, qui ne voient pas en quoi des relations passées avec l’entreprise d’événementiel posent problème.

Très agacée par les questions du journaliste de Lyon Capitale, la vice-présidente aurait, selon lui, lancé au téléphone : « Je raccroche et j’appelle Wauquiez pour démissionner. »

« Faut pas qu’elle craque »

Depuis sa prise de fonction au conseil régional, ce n’est pas la première fois que Florence Verney-Carron montre une forme de fébrilité. Lors d’une « concertation régionale du spectacle vivant », qui s’est tenue à la Comédie de Saint-Etienne en octobre 2016, elle a aussi craqué.

Interrogée par une personne du public, composé en grande majorité de professionnels, sur la fin des CDDRA (contrats de territoires, lesquels possédaient tous un volet culture), elle était restée dans un flou très artistique :

« Il est nécessaire de revisiter les dispositifs et les uniformiser entre Rhône-Alpes et Auvergne ; nous allons reprendre l’argent sur la culture et voir comment faire. »

Au sujet d’éventuels financements croisés pour les structures, Florence Verney-Carron a lâché : « c’est effectivement une réflexion que j’ai ».

Au sujet de la fin des aides au fonctionnement et le choix de généraliser les appels à projets, elle avait été tout aussi évasive : « une réflexion est en cours ».

Avant de perdre pied :

« J’adorerais être entendue quand je parle. Ça doit être systématique chez vous de ne pas vouloir entendre. J’avais dit que je viendrai et je savais que ce serait ça. Est-ce que vous, vous répondez à tout ? Et bien pas moi. J’ai peut-être eu tort de ne pas utiliser une langue de bois politique. Vous savez que je ne viens pas du monde politique, mais de celui des arts plastiques ; j’y ai placé beaucoup d’argent personnel. »

La vice-présidente aurait très mal vécu ce qui lui a semblé être une séance de lynchage.

« Faut pas qu’elle craque », estiment pourtant plusieurs acteurs culturels qui craignent que, en cas de démission de Florence Verney-Varron, plus aucun rempart n’existe au sein du conseil régional en leur faveur.

Un futur festival pour toute politique ?

La position de la vice-présidente semble intenable. L’élue a dû négocier auprès du président dans le but de sauver du naufrage certaines structures, à Lyon notamment, pour lesquelles des coupes de subventions très lourdes étaient programmées.

Jusqu’à mettre sur la table la menace de sa démission. Mais ni Florence Verney-Carron ne peut rendre public ce type d’engagement, au risque de se mettre en porte-à-faux avec son président, ni elle ne peut prendre la parole sur une feuille de route qu’on lui demande à peine.

« «On n’est pas un guichet de distribution de subventions», a-t-elle déclaré à Libération.

Pourtant, c’est jusque là de cette façon que son enveloppe budgétaire a été utilisée, avec des subventions distribuées sans annonce de ligne globale. Le principe appliqué à la culture, comme à quasi tous les autres champs de compétences de la collectivité, est de ne plus attribuer d’argent public pour le « fonctionnement » mais uniquement pour des « projets ». Mais peuvent-ils seulement naître sans un cadre et sans personnes dédiées, sans un « fonctionnement » donc ?

Florence Verney-Carron veut encore croire qu’une « vision rénovée » est en train de se mettre en place.

Dans le numéro de mars de Lyon Capitale, l’hypothèse d’un festival rock en région est de nouveau évoquée. Le cabinet de Laurent Wauquiez nous avait assuré qu’un événement de ce type, avec cette couleur artistique précisément, ne se tiendrait pas. « Mais autre chose, oui, étendu en Auvergne et en Rhône-Alpes ».

Laurent Wauquiez semble donc vouloir marquer son mandat d’un format spectaculaire largement floqué « Auvergne-Rhône-Alpes ». C’est au moins à cette occasion qu’il devra sans doute parler de culture, même s’il n’a pas montré beaucoup d’intérêt pour le mot ni pour le concept.

 


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