Laurent Wauquiez, à la tête du conseil régional d’Auvergne-Rhône-Alpes, a confirmé ce lundi devant l’assemblée réunie pour la première fois depuis les élections de décembre, une ligne politique qui fait, pour le moment, peu de cas des compétences de cette collectivité et qui se fonde surtout sur « des valeurs ».
Premiers pas pour Laurent Wauquiez dans le conseil régional, ce gros cube de verre planté au coeur du quartier Confluence à Lyon, qu’il a tant critiqué pour la dépense qu’il représentait.
Dans les faits, son élection définitive par les conseillers régionaux n’était qu’une formalité, réglée en 113 voix sur 204 exprimées. Dans la manière, le nouveau président de région a martelé ses volontés pour ce mandat, avec une pointe d’agacement pour le protocole imposé. Des moulinets avec les mains, des accélérations pour limiter le temps passé dans l’hémicycle.
« La suspension de séance d’une heure pour que vous puissiez former vos groupes politiques ne peut pas être plus courte, elle est fixée par la loi, ça fait partie des réjouissances de notre pays ».
Ou encore :
« Bon, il faudra voir comment on va fluidifier tout ça ».
Plus vite, plus fort, voudrait faire Laurent Wauquiez. « Dépoussiérer », faire des élus de la gauche notamment, ceux à qui il a pris la collectivité, des dinosaures qui n’ont pas été capables de répondre aux défis d’aujourd’hui, cela a été l’objectif principal du quadra devenu numéro 2 de son parti Les Républicains.
Les 100 jours de Laurent Wauquiez
Pour commencer, des signes de modification cosmétique : Laurent Wauquiez a tenu un petit point presse avant même que son nom ne sorte définitivement des urnes, et son aspect peu protocolaire a réjoui le nouveau président de région, devant une troupe de journalistes au moins aussi ravis de pouvoir boucler ses sons/papiers/vidéos à temps.
Puis s’en sont suivis des votes à main levée plutôt que dans l’isoloir, pour « gagner trois heures de temps ». De quoi en éblouir plus d’un, ou la gloire à peu de frais. Ce qui devait se terminer aux alentours de minuit voire davantage, a été clos vers 20h30.
Pour le contenu et le plan de mandat, Laurent Wauquiez n’a pas d’un iota modifié, pas plus qu’il n’a mieux explicité, ses propositions de campagne.
On a donc retrouvé, entre autres, la non-augmentation des impôts, malgré le fait que la Région n’ait quasi pas de prise directe sur ces recettes (en dehors de la taxe relative au carburant) ; ou encore la préférence faite aux entreprises locales pour les marchés publics, au mépris des directives européennes en la matière.
Là encore, Laurent Wauquiez nous avait déjà prévenu : des carcans juridiques, il fera son affaire, en présentant des choix « emballés dans du papier cadeau avec de gros rubans rouges », afin de duper l’oeil de la justice administrative.
Il a promis que tout serait enclenché en 100 jours, soit trois mois si l’on compte bien. Le rendez-vous est pris.
Le principal argument de sa campagne a également été repris ce lundi, soit celui des économies qu’il doit en partie trouver dans les dépenses de fonctionnement. Là, Laurent Wauquiez a voulu se montrer sévère, en direction de ses élus précisément.
Aux oubliettes les téléphones portables gratis
« J’ai une mauvaise nouvelle », leur a-t-il ainsi annoncé, sur le ton d’un proviseur qui réprimande des lycéens jusque là abandonnés à leurs exagérations adolescentes.
Les conseillers régionaux fraîchement élus n’auront pas d’abonnement de téléphone portable payé par l’administration publique. C’est dit. Laurent Wauquiez a calculé pouvoir ainsi faire une économie d’un million d’euros.
Par ailleurs, il compte baisser les indemnités des élus de 10%, afin de « montrer l’exemple, d’en haut ». Il estime que l’ensemble de ces coupes devrait aboutir à une économie de 19 millions d’euros.
Si le Parti communiste, en la personne de l’élue Cécile Cuckierman, a jugé que ces propositions contenaient une pointe de populisme, tout comme Jean-Charles Kohlhaas, élu écologiste, qui a estimé qu’elles n’allaient pas dans le sens du bon exercice de la démocratie « qui a un coût », Laurent Wauquiez a surenchéri sur ce qu’il considère comme « une grande avancée ». Sans doute du fait de ce qu’il appelle lui-même son « tempérament auvergnat » (un sou est un sou, si l’on doit résumer) :
« Imaginez tout ce qu’on peut faire avec 19 millions d’euros. »
Certes. Rappelons toutefois que le budget global de la nouvelle grande région Auvergne-Rhône-Alpes est de 3 milliards d’euros.
L’opposition a tenté pendant cette première après-midi partagée avec Laurent Wauquiez de lui donner le change, sans verve particulière. Pas d’agressions, uniquement quelques piques de part et d’autre.
Jean-François Debat, qui prendra la tête du groupe PS et remplace de fait dans le rôle de leader socialiste Jean-Jack Queyranne, le président déchu (mais qui siège), a tenu à noter :
« Nous approuverons ce qui va dans le bon sens et nous nous opposerons dans le cas contraire. »
Il a prévenu qu’il s’insurgerait contre la possibilité de voir l’assemblée devenir « le réceptacle de propositions populistes et démagogiques, de propos de tribune sur des sujets nationaux souvent sans lien avec les politiques régionales ».
Une vidéo de LyonCapitale dans laquelle on trouve les propos de JJQ :
Et la vice-présidence surprise : « chasse, pêche et sécurité »
Pour la faire paraître toujours plus moderne, Laurent Wauquiez a décidé de doter la collectivité d’un exécutif un peu allégé : 15 vices-présidents au lieu des 29 qui officiaient sous le dernier mandat du socialiste Jean-Jack Queyranne. Et 45 autres conseillers régionaux pour former les membres d’une commission permanente.
Dans les attributions des vice-présidences, Laurent Wauquiez a fait des choix politiques, de partis et de territoires. Elles se découperont comme suit :
- Etienne Blanc : Finances et administration générale
- Brice Hortefeux : Aménagement du territoire et solidarité avec l’Auvergne. Laurent Wauquiez n’a pas voulu (trop) trahir son propos consistant à dire qu’il privilégie une nouvelle génération , il n’a par conséquent pas offert à son collègue, ex-ministre de Nicolas Sarkozy, la première vice-présidence. Mais la seconde, pour Brice Hortefeux qui devient donc numéro 3 de la Région.
- Béatrice Berthoux : Lycées
- Eric Fournier : Environnement et développement durable
- Juliette Jarry : Economie de proximité, commerce, artisanat et numérique
- Martial Saddier : Entreprise. Avec un grand « e », d’après Laurent Wauquiez. Emploi et travail, mais aussi lutte contre l’assistanat, peut-on supposer aussi, puisque le président d’Auvergne-Rhône-Alpes a rappelé qu’elle était sa priorité.
- Patrick Mignola : Transports. A cet élu de Savoie, étiqueté Modem et qui a permis à Laurent Wauquiez de mettre en avant pendant sa campagne une union « de la droite et du centre », a donc été confiée une vice-présidence de taille, celle des Transports. Une forme de récompense car le dossier des TER et des relations avec la SNCF est l’un des plus gros de la Région.
- Emilie Bonnivard : Agriculture, viticulture, monde rural. Laurent Wauquiez s’est montré très fier de confier les questions rurales et agricoles à une femme, jeune.
- Philippe Meunier : Sécurité, chasse et pêche, partenariats internationaux. Une vice-présidence aux contours pour le moins étonnants, avec la chasse et la pêche sorties du champ de l’agriculture. Et, par-dessus tout ça, un petit peu de sécurité -et de portiques.
- Martine Guibert : Social, santé. Elle devra se pencher sur ce qui a principalement intéressé Laurent Wauquiez pendant sa campagne, en dehors des propositions sécuritaires, c’est à dire la lutte contre la désertification médicale.
- Yannick Neuder : Enseignement supérieur
- Stéphanie Pernod-Beaudon : Formation professionnelle et apprentissage
- Nicolas Daragon : Tourisme, montagne
- Florence Verney-Carron : Culture et patrimoine. Elle fait partie des figures que Laurent Wauquiez a envie de mettre en avant. Elle est l’une des personnalités stratégiques de l’entreprise d’événementiel d’Olivier Ginon, elle est spécialiste de la communication, bénéficiant d’un réseau lyonnais large et bien fourni.
- Marie Camille Rey : Jeunesse, sport et vie associative. Elle était la plus jeune colistière de Laurent Wauquiez et le nouveau président a voulu lui confier une mission et un statut dans l’exécutif. Pour le symbole, car rappelons aussi que le nouveau président a annoncé que, pour parvenir à faire des économies, il supprimerait de moitié les subventions allouées aux associations, soit 200 millions d’euros.
> A lire aussi « Ces trois polémiques qui ont suivi l’élection de Laurent Wauquiez à la présidence de Rhône-Alpes-Auvergne« , paru le 5 janvier sur lelab.europe1.
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