La jeunesse, c’est l’âge de l’enthousiasme, des grands projets, de la vie libre et insouciante. Et puis le train-train quotidien s’installe, la routine du travail, des jours qui se ressemblent et des amis que l’on ne regarde plus.
En cinq minutes déjà formidables, Shaun le mouton raconte ainsi comment un fermier passe de la joie d’élever son cheptel de moutons à l’application machinale d’un planning abrutissant pour lui, mais aussi pour ses animaux, proches de la dépression.
À la faveur d’une publicité entrevue sur le flanc d’un bus, les moutons se prennent à rêver d’évasion, échafaudant un plan pour échapper à la surveillance de leur berger et de son chien Bitzer, lui aussi en plein relâchement. Commence alors une aventure débridée et impossible à décrire tant elle fourmille de trouvailles visuelles.
On n’est pas des moutons !
Car Shaun le mouton, adaptation d’une série animée autour d’un personnage apparu dans Rasé de près, une des aventures de Wallace et Gromit, est avant tout un défi de mise en scène : raconter une histoire sans avoir recours aux dialogues, remplacés par des borborygmes et une gamme presque symphonique de bêlements.
Mark Burton et Richard Starzac font mieux que le relever ; leur travail relève de l’orfèvrerie comique, soutenant d’un bout à l’autre un tempo où chaque paramètre compte : l’animation — en plasticine et images par images — mais aussi les cadres et le découpage.
Aussi généreux en gags que varié en registres d’humour — du clin d’œil parodique au pur slapstick — le film transforme en autant d’idées burlesques son arborescence centrale, où tous les personnages sont confrontés à des situations improbables — le fermier amnésique devenu coiffeur star, Shaun et Bitzer emprisonnés par un ennemi déclaré des animaux errants, le reste du troupeau faisant les quatre cents coups dans la grande ville…
Mais c’est finalement l’ambiance joyeusement anar de Shaun le mouton qui lui confère son statut de petit classique instantané.
Que ce soit dans cette accumulation délirante de péripéties loufoques ou dans l’appel à sortir de son enclos pour semer la pagaille, renverser les murs de notre société trop propre sur elle et mordre les chevilles des sinistres empêcheurs de brouter en rond, les studios Aardman font preuve d’un esprit de sales gosses ô combien fondamental par les temps qui courent.
Shaun le mouton
De Mark Burton et Richard Starzac (Ang, 1h25) animation
Par Christophe Chabert sur petit-bulletin.fr.

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