En Belgique, suite au documentaire femme de la rue de Sofie Peeters qui montrait en caméra cachée, l’incroyable violence du machisme ordinaire, la commune de Bruxelles a mis en place des amendes administratives de 250 euros à toute personne qui aura importuné une femme dans la rue.
Sofie Peeters – Femme de la rue (Bruxelles) par Spi0n
Citation extraite du Tumblr de témoignages du machisme ordinaire de la graphiste Anaïs Bourdet, Paye ta Schnek, qui a été lancé suite au documentaire de Sofie Peeters.
Réponse pénale inexistante
En attendant une loi adaptée en France et qui puisse être appliquée (la difficulté est bien de pouvoir l’appliquer, d’apporter “une preuve” à charge de la victime), force est de constater que la réponse pénale actuelle est inexistante, comme l’explique Michel Henry dans Libération, en relatant les propos de Leila Hamzaoui et Valence Borgia, deux juristes qui ont fait la préface du livre Paye ta Schnek.
Ce type de propos n’entre pas dans les critères strictes de la définition du harcèlement sexuel, et s’ils pourraient peut-être entrer dans ceux de l’injure, force est de constater qu’aucune décision de justice n’a encore été prise en ce sens.
Bien souvent, les gens en appellent à un sursaut éducatif pour résoudre ce type de problème. Mais là encore, trop souvent, on charge l’éducation de tout ce que la société ne sait plus régler, comme si elle pouvait régler tous les problèmes. En attendant, les femmes en sont rendues à témoigner pour partager leur souffrance et à apprendre à s’autodéfendre, comme l’explique le manuel féministe d’Irène Zeilinger, Non, c’est non !
Les bonnes fifilles bien sages
Mais le problème est avant tout un problème de société, de comportement et de normes de comportements, non seulement des agresseurs, “ces crocodiles”, « ces colons testiculaires », mais également de la société, de chacun d’entre nous qui ne réagissons pas, qui nous sentons démunis face à ces formes de violences du quotidien, que ce soit celles qui les subissent comme ceux qui en sont les témoins. Voici un extrait de « Harcèlement de rue, cette épuisante banalité » (par madmoizelle.com) :
Mais il va bien falloir que ça s’arrête un jour, qu’on arrête de nous répondre “Euh bah ouais mais vous voulez faire quoi ? Les mettre en prison ? Bah nan hein, c’est bon, des cons y en a partout, c’est la vie”, qu’on arrête de nous demander de subir en silence et de faire les bonnes fifilles bien sages qui sourient et obéissent au mâle tout-puissant.
Va falloir que les spectateurs se réveillent et prennent le réflexe, eux aussi, d’exprimer leur avis – parce qu’il n’y a rien de pire que de subir les attaques d’un ou plusieurs mecs pendant que des gens regardent la scène sans rien dire, en faisant mine de ne rien remarquer d’anormal.
Ta main sur mon cul et la mienne sur ta gueule : trop violent ?
Alors comment répondre ? Comment agir ? Comment répliquer ?
L’illustratrice lyonnaise, Diglee, explique dans un vibrant billet pourquoi elle s’engage dans le collectif Stop harcèlement de rue et dans la campagne Colère : nom féminin qui relance le débat public sous le slogan “Ta main sur mon cul, ma main dans ta gueule”.
Si on comprend l’expression légitime du ras-le-bol, je suis pour ma part peu convaincu par l’impact du slogan, qui me semble plutôt un appel à l’escalade violente.
Remercier ceux qui sont intervenus
Le site Hollaback (qui est une initiative associative mondiale qui vise à “répliquer” au harcèlement) en partenariat avec l’organisation GreenDot, suggère des conseils simples à mettre en oeuvre pour inviter les gens à intervenir.
Interventions directes bien sûr, qui demandent un peu de courage, et surtout idées d’interventions indirectes consistant à perturber l’attention de l’agresseur, à faire diversion, comme l’illustrait récemment le dessinateur Thomas Mathieu dans l’une des planches de son projet Crocodiles, qui justement raconte en image des histoires de harcèlement subies par des lectrices.
« 100% des gars qui se comportent comme des crocodiles rentrent seuls chez eux »
Mais pour que ce type de comportements vertueux devienne la norme, encore faut-il les encourager, les récompenser, les mettre en avant et montrer d’ailleurs qu’ils sont la norme. D’où l’idée des points verts, des Green Dot, sur la carte, visant à remercier ceux qui sont intervenus pour défendre quelqu’un…
C’est assurément là que nous devons agir : par des programmes d’entrainement à répondre à ces incivilités (théâtre de rue, formations improvisantes…), par un rappel des normes sociales auprès des plus jeunes, par de la communication, de l’information ou de la formation (« t’arriveras jamais à pêcho comme ça garçon ! » ou des messages types “100% des gars qui se comportent comme des crocodiles rentrent seuls chez eux » ; « agresser n’est pas draguer »…) et en inventant des formes de rétributions des comportements vertueux. Alors, on fait quoi ? A quand une action d’envergure et coordonnée pour élargir les “zones sans relou » à des villes zéro macho ?
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