ViaRhôna peut être un plan rêvé pour se balader en vélo. Cette voie verte aux allures de carte postale s’étire du lac Léman, longe le Rhône jusqu’à la mer Méditerranée : 700 kilomètres au total ; 445 kilomètres se trouvent en région Rhône-Alpes dont 273 kilomètres praticables actuellement. Voilà pour les chiffres. Le circuit se faufile dans tous les recoins de la région, 8 départements et 118 communes.
Gilles Vesco, vice-président du Grand Lyon et adjoint au maire de Lyon en charge des nouvelles mobilités urbaines et des nouveaux modes de vie urbains, fait la description d’une toile :
« ViaRhôna, c’est l’épine dorsale alpino-rhôdanienne pour le vélo. Cela contribue à structurer des territoires. Un territoire n’est que la somme des réseaux qui le font. A force de faire des réseaux, on a un territoire ».
Mais voilà la zone des risques technologiques
Jeudi 22 mai, lors d’un point avec Elizabeth Ayrault, PDG de la CNR (Compagnie Nationale du Rhône), Jean-Jack Queyranne, président PS de la région Rhône-Alpes, s’est félicité des « 47 nouveaux kilomètres réalisés cette année ». Il en manque encore 167. Mais il tient à être rassurant :
« L’ensemble sera bouclé d’ici deux à trois ans ».
La ViaRhôna traîne en longueur car une zone pose problème : le couloir Sud de Lyon, entre la ville centre et Givors. Un premier itinéraire avait été inauguré le 4 juillet 1998 par le Grand Lyon, permettant, depuis Lyon, de rejoindre l’Île de la Table Ronde (entre Vernaison et Solaize). Il a été fermé brutalement au printemps 2001 puis démantelé. Depuis, plus rien. Gilles Vesco explique :
« La zone se trouve dans le périmètre de protection des risques technologiques (PPRT) ».
Les PPRT constituent la mesure phare de la loi du 30 juillet 2003. Ils visent à améliorer la coexistence des sites industriels à haut risques existants avec leurs riverains, en améliorant la protection de ces derniers tout en pérennisant les premiers. Après une phase de réduction des risques à la source, le PPRT est prescrit sur un périmètre évalué à partir de l’étude des dangers du site. Après instruction technique, concertation et enquête publique, le PPRT est approuvé. Aujourd’hui, cela concerne 407 bassins industriels et plus de 800 communes en France.
Sous l’autorité du préfet, les services de l’inspection des installations classées (DREAL) et le service de l’équipement (DDT) sont les principaux services de l’Etat impliqués dans l’élaboration du PPRT. Dans l’histoire, ce sont eux qui ont interdit le passage de la ViaRhôna dans le couloir sud de Lyon.
Par ailleurs, le périmètre est considéré comme stratégique. Pour un attentat terroriste, la zone chimique pourrait être une zone privilégiée.
A quand une ouverture au public ?
Frédéric Rollet, administrateur de Pignon sur Rue, association de promotion du vélo, ne méconnaît pas la difficulté à réaliser un itinéraire dans ce secteur, très réglementé. Il s’interroge pourtant :
« A proximité on trouve une autoroute avec 100 000 véhicules par jour dans cette fameuse zone. On a aussi la ligne de train Lyon-Marseille et Lyon-Saint Etienne ; le stade de Gerland également, sans oublier les gens qui habitent à Feyzin. L’itinéraire cyclable, lui, poserait davantage problème ? »
Aujourd’hui, les associations, tout comme le Comité régional de tourisme, sont obligés de conseiller aux cyclistes de prendre le train, avec leurs vélos, pour rejoindre Givors ou Vienne et la ViaRhôna.
Ce vendredi 30 mai, l’association française pour le développement des véloroutes et des voies vertes (AF3V) organisaient une sortie en vélo, partant du pont Raymond Barre à Lyon, pour rejoindre Vienne, Givors et Valence, afin de montrer l’importance de l’axe. L’AF3V demande aux élus de proposer un programme de financement et de réalisation précis, « pour une ouverture rapide au grand public ».
Passage obligé par la rive droite
Alors comment faire pour contourner cette zone ? Jean-Jack Queyranne reste assez flou :
« Nous pensons réaliser le tracé sur la rive droite ».
Gilles Vesco confirme cette idée. Pour y accéder, trois idées tiennent la corde : le Pont de la Mulatière, la future passerelle de Gerland-Oullins et le pont de l’A7 au niveau de Pierre Bénite. Si l’on suit le délai fixé par le président de la Région, seule la dernière possibilité s’avère crédible. Ce que confirme Gilles Vesco.
« Dans 2/3 ans, on sait que la passerelle Oullins-Gerland ne sera pas faite tout comme l’aménagement sur le Pont de la Mulatière ».
Un jour, il n’est pas exclut que la ViaRhôna n’emprunte ces deux voies. Mais pour l’heure, aucun planning, aucun chiffre n’est encore définie. Pour Gilles Vesco,
« Le mandat redémarre. Les services se réorganisent par rapport à la Métropole qui percute de plein fouet l’organisation interne. Aujourd’hui, donner des chiffres, ça n’a pas de sens. Ça serait de la science-fiction ».
A titre de comparaison, la passerelle de la Paix, inaugurée le 17 mars dernier, a coûté au total 15,7 millions d’euros après deux ans de chantier.
Rappelons que ViaRhôna a été subventionnée par la Région à hauteur de 12,5 millions d’euros (dont 180 000 euros de crédits d’impôts européens) et par la CNR avec 11,1 millions d’euros.
Plus largement, Jean-Jack Queyranne souhaite raccorder la ViaRhôna au réseau d’EuroVélo. Il s’agit d’un réseau de quatorze itinéraires cyclables ou vélo-routes de longue distance, à travers l’Europe. L’année dernière, ViaRhôna a fait acte de candidature. Si la réponse est favorable, le raccordement devrait être effectif dès 2015 (à partir de Genève vers l’Allemagne). De quoi mettre un bon coup de pédale à la recherche de solutions pour le point noir du couloir Sud lyonnais.
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