1. Oh mon métro
2. Le 1er arrondissement : réélire son maire, ok, mais lequel ?
3. Elections à la lyonnaise : des scrutins de listes et des femmes pour la façade
4. Lyon, terre du Milieu
5. Pour qui vont voter les nouveaux habitants de Lyon ?
6. Ski à Gerland, ménage à trois… Comment les candidats ont-ils débattu ?
7. Une campagne « de proximité », sans Métropole
8. Merci la pollution qui revigore la campagne
Les premières annonces de campagne ont lancé les hostilités. Michel Havard, candidat UMP-UDI a très tôt (re-re-re)parler de son projet de métro reliant la Part-Dieu à Saint-Paul, ou l’axe des gares. Gérard Collomb, maire PS sortant, lui a emboîté le pas avec, sortie du chapeau, nouvelle et jamais évoquée jusqu’alors, une ligne qui s’étirerait de Vieux-Lyon à l’Alaï sur la commune de Tassin (en passant par Trion, le Point du Jour, Ménival).
Michel Havard estime son métro à 500 millions d’euros ; Gérard Collomb le sien à 800 millions d’euros. Tout doux bijou, dans ce dernier cas, en réalité, l’annonce de campagne a tout à coup été revue à la baisse : il s’agirait plutôt de lancer des études faisabilité pour un métro qui ne serait pas lancé avant, au bas mot, 2020.
Christophe Boudot, candidat FN, n’est pas en reste avec une ligne tracée entre Part-Dieu et Montchat (800 millions d’euros dans cette hyptohèse) et éventuellement jusqu’à Grange-Blanche (jusqu’à un milliard d’euros dans celle-là). Eric Lafond, candidat centriste (ex-Modem), a voulu calmer le jeu avec un aerotram étendu entre les collines de Fourvière et de la Croix-Rousse à environ 60 millions d’euros (10 millions d’euros le kilomètre, soit dix fois moins cher qu’un métro).
Dans l’hebdo Les Potins d’Angèle, Jean Murard, président de l’association Déplacements citoyens, dézingue les projets de lignes au coeur de la ville, estimant qu’elles sont toutes redondantes avec les lignes déjà existantes (A et D). Pour irriguer mieux l’Ouest, il préconise une ligne de bus forte entre Oullins et Gorge-de-Loup (Lyon 9e).
2. Le 1er arrondissement : réélire son maire, ok, mais lequel ?
« J’aime bien mon maire, je veux bien qu’il reste ». Mais duquel parle l’électeur ? Si l’on part du postulat qu’existe bel et bien une prime au sortant (qui donne l’avantage a celui qui est déjà assis dans le fauteuil, un sondage dit que 63% des Français sont satisfaits de leur maire), la situation inédite du 1er arrondissement de Lyon pose question. Nathalie Perrin Gilbert y a été élue sur les listes de Gérard Collomb, en 2001 et en 2008, sous les couleurs du PS. Mais entre 2008 et 2014, les rebondissements n’ont pas manqué.
La maire désormais connue sous le sigle « NPG » s’est émancipée : elle a été exclue de son parti, elle a monté son groupe de réflexion ou laboratoire pré-municipales, le Gram, puis, pour consommer définitivement le divorce avec le maire, elle a monté face à lui une liste commune avec le Front de gauche.
Dans cet arrondissement réputé très à gauche, on la dit populaire. Sa garde à vue suite à l’occupation temporaire du collège Truffaut a renforcé ses soutiens dans le monde militant des Pentes de la Croix-Rousse.
NPG joue son va-tout. Un éventuel rapprochement des listes Front de gauche-Gram avec celles de Gérard Collomb entre les deux tours est inimaginable pour elle dans le 1er.
Gérard Collomb a de son côté longtemps gambergé son casting, pour missionner finalement sur ce territoire Odile Belinga, avocate franco-camerounaise de 55 ans, ancienne présidente de la Ligue des Droits de l’Homme à Lyon.
Et pour faire dire aux médias qu’une guerre des femmes qui n’aurait rien à envier à la parisienne existe aussi à Lyon, on trouve dans le 1er une candidate EELV, Emeline Baume, qui connaît bien NPG pour être conseillère d’arrondissement de sa majorité.
Les mauvaises langues ou peut-être NPG elle-même disent qu’Emeline Baume joue le rôle de sniper pour Gérard Collomb, afin de sortir définitivement NPG des radars de la vie politique.
3. Elections à la lyonnaise : des scrutins de listes et des femmes pour la façade
Le zoom sur le 1er arrondissement permet de rappeler que le mode d’élection à Lyon est particulier, tout comme à Marseille et à Paris. Paris-Lyon-Marseille, donc, ou « PLM » est le nom de la loi électorale du 31 décembre 1982 qui fixe le mode de scrutin pour les trois plus grandes villes de France. On n’y vote pas au niveau de la commune mais par arrondissement.
Les élections à Lyon revêtent une autre particularité : le candidat que vous croisez sur le marché ou sur le pas de votre porte ne sera pas nécessairement le maire qui mènera la barque dans l’arrondissement. On relèvera ainsi que les trois femmes têtes de liste de Gérard Collomb sont deux avocates, Myriam Picot, ancienne bâtonnière à Lyon pour le 7e arrondissement et Odile Belinga pour le 1er. Mais aussi une chirurgienne, Elvire Servien, pour le 6e arrondissement.
Toutes avenantes, représentantes de la gente féminine active voire brillante, en tout cas estampillées société civile et surtout pas grenouilles de parti. Seulement, aucune d’elle ne sera maire de l’arrondissement sur lequel elle fait campagne, quand bien même elle le remporterait. « Inimaginable à Marseille », nous confiait une journaliste qui a officié dans la ville du sud de la France.
Michel Havard a lui aussi des têtes de proue pour sa campagne qui ne seront pas nécessairement les maires des arrondissements s’ils les remportent. Le candidat UMP-UDI avait toutefois présenté sa possible brochette de maires à la presse en cas de grand chelem -un scénario peu probable. Gérard Collomb quant à lui garde précieusement les noms des maires qu’il envisage de placer.
4. Lyon terre du Milieu
Le choix de candidats bêtes de campagne n’est pas le seul point commun entre Gérard Collomb et Michel Havard. Tous les deux ont affiché des propositions souvent très proches. Le premier accusant le second de plagiat, le second concédant s’appuyer sur la réalité lyonnaise, estimant qu’il peut la poursuivre mais en mieux.
Concernant le tissu culturel et artistique à Lyon, entre autres exemples, Michel Havard a déclaré : »il n’y a pas de trou dans la raquette ». Il imagine mieux faire travailler ensemble les acteurs du territoire. C’est surtout sur le mode de gouvernance que le candidat de la droite entend se démarquer : il promet que le sien sera moins autoritaire, plus transparent.
« On poursuit », « on continue », « encore » : ce sont les mots, les verbes qui ressortent le plus dans la bouche de Gérard Collomb et de ses colistiers et que l’on lit aussi à chaque ligne de ses documents de campagne. Son programme pour un troisième mandat est donc entièrement fondé sur un bilan de 13 années de mandature. Le slogan « Evidemment Lyon » résonne comme une consigne de vote pour qui vit dans la ville.
Michel Havard a trouvé la formule pour répondre à l’écrasant avantage de Gérard Collomb : une élection locale n’est « pas la récompense du passé mais le choix de l’avenir ». Rappelant au passage que, du haut de ses 47 ans bien portés, 20 années le sépare de l’actuel maire, âgé de 67 ans. Pour autant, le candidat de la droite souffre d’un déficit de notoriété. En outre, le vote qui sanctionnerait un gouvernement socialiste décrié est de moins en mois probable, les plus hauts cadres de l’UMP butant à la veille de ces élections sur des affaires retentissantes. France 3 relève que 32% des sympathisants UMP et 46% de ceux du FN estiment que les enjeux nationaux feront partie de leur choix.
En cette terre du Milieu qu’est Lyon, Eric Lafond, le candidat centriste, ex-Modem (qui a gardé les codes couleurs orange malgré son éviction du parti de François Bayrou), veut lui aussi passer pour le « modéré » pour ne pas pas dire le « raisonnable », ce qui semble convenir à une ville cossue dont on dit qu’elle aime rester discrète.
5. Pour qui vont voter les nouveaux habitants de Lyon ?
Ils sont, avec le taux d’abstention (notons qu’il pleuvra ce dimanche et que, paraît-il, cela incite les gens à aller voter pour égayer une journée grise), la grande inconnue de cette élection. Lyon n’a cessé d’accueillir de nouveaux habitants pendant les deux mandats de Gérard Collomb. C’est même ce qui, entre autres facteurs, a fait basculer en 2008 le 3e arrondissement en sa faveur, passant donc des mains de la droite à celles de la gauche. C’est donc sur cet arrondissement que la victoire dès le premier tour a pu se faire, face à un dépité Dominique Perben. En 2014, il sera encore très observé par les candidats.
Le 2e, traditionnellement à droite (l’actuel maire est Denis Broliquier, divers droite, sur les listes de Michel Havard) a accueilli de nouveaux foyers au sein du quartier de Confluence. Ces nouveaux habitants, qui ont misé sur un territoire neuf, vont-ils voter différemment de ceux du quartier très cossu d’Ainay ? Des programmes immobiliers ont aussi vu le jour dans le 7e, dans la ZAC du Bon Lait notamment. Michel Havard qui, lors de primaires à droite ouverte à tous les Lyonnais, avait réalisé un très bon score dans le 5e arrondissement, s’y présente désormais en tant que candidat et imagine bien le faire basculer à droite.
Les équipes du maire socialiste du 8e ne cachent pas leur crainte d’un fort taux d’abstention habituel sur cet arrondissement, qui profiterait à un candidat dont la notoriété n’a cessé d’augmenter durant cette campagne, le FN Christophe Boudot.
6. Ski à Gerland, ménage à trois… Comment les candidats ont-ils débattu ?
Etienne Tête, candidat EELV en binôme avec Emeline Baume, et Aline Guitard, candidate Front de gauche-Gram ont souvent été sur la même longueur d’onde, sur de nombreux sujets. Finalement, tous les trois n’ont pas caché leur volonté de faire alliance avec Gérard Collomb entre les deux tours. Même si, châtelain, l’actuel maire a déclaré pendant le débat du Progrès qu’il avait déjà réuni auprès de lui tous ceux qui pouvaient poursuivre sa politique.
C’est à peine si Etienne Tête a évoqué le combat qui l’oppose le plus fortement à Gérard Collomb : le Grand Stade de Décines, déjà en chantier et prévu, si Jean-Michel Aulas est exaucé, avant l’Euro 2016. La poursuite de la construction du tronçon ouest du périphérique (TOP ou Anneau des sciences), contre laquelle l’écologiste s’est souvent fait entendre, ne semble même pas être un point de discorde suffisant pour ne pas rejoindre Gérard Collomb.
Au soir du premier tour, chacun comptera ses voix, regardera ce qu’il pèse pour prétendre à des places au sein de l’exécutif.
Eric Lafond a pour sa part maintenu une stratégie élaborée depuis le début de la campagne : rester calme, se montrer amusé par les petites joutes dans lesquelles il n’est pas allé, n’évoquant quasiment jamais les autres candidats, déclinant des propositions de façon à ce qu’elles paraissent toujours les plus simples et les plus pleines de « bon sens ».
Christophe Boudot a beaucoup amusé ou encore indigné la galerie lors du débat du Progrès dans un amphithéâtre de l’IEP, en plaçant les mots-clefs préférés du FN, « aux Français d’abord », « trop d’immigration », « voiture ». Il a également fait rire. En proposant notamment de faire du stade de Gerland un lieu dédié aux sports extrêmes, « au ski pourquoi pas ».
Municipales 2014: Lyon par TLM
7. Une campagne de proximité, sans Métropole
« Au cul des vaches » disait-on pour Jacques Chirac. Les candidats des six principales listes (certaines comme Lutte ouvrière ne se présentent pas dans tous) ont misé sur « le lien avec le lyonnais ». Christophe Boudot, candidat FN, a résumé sur France 3 une critique formulée par l’ensemble des adversaires de Gérard Collomb :
« Il faut penser aux Lyonnais au lieu de vendre Lyon à l’international et d’en faire un centre économique ».
Le maire sortant avait bien prévu la critique et il a donc décliné un programme par arrondissement, donnant dans le détail des projets (dont certains déjà votés en conseil d’arrondissement, cela dit en passant), comme la réhabilitation d’écoles.
La plupart des projets, tels que les transports qui ont beaucoup occupé les débats, ne relève pourtant pas de la compétence municipale, mais plutôt de la compétence communautaire. Occasion de rappeler que, ce dimanche, on votera pour le conseiller municipal mais aussi pour le conseiller communautaire qui sera, dès 2015, conseiller métropolitain. Le Grand Lyon se transforme en Métropole à cette date et sera une collectivité surpuissante, absorbant les compétences du Département.
Malgré son importance, d’elle on aura très peu parlé. « Pas sexy », « pas le moment », « trop compliqué« , le sujet de la Métropole n’a pas été celui du président actuel du Grand Lyon, qui a pourtant conçu entièrement et sans consultation ce projet de modernisation institutionnelle. Seuls les écolos et le Front de gauche-Gram ont tenté de mettre en débat ces questions.
Michel Havard voudrait par ailleurs rappeler que le vote est à double détente : à la suite de l’élection des maires, ceux-là désigneront les sénateurs (mandat que possède aujourd’hui Gérard Collomb), à la manoeuvre pour amender les lois. Pour lui, le débat doit être national. Pour Gérard Collomb, qui se garde bien d’indiquer toute appartenance au parti socialiste sur ses documents de campagne ou encore d’inviter ses amis ministres, l’élection doit à tout prix rester locale.
A noter : l’élection se fait au scrutin de liste, en choisissant un bulletin avec des candidats municipaux, on désigne automatiquement des conseillers communautaires fléchés sur ce même bulletin.
8. Merci la pollution qui revigore la campagne
L’un des derniers événements de campagne, indépendants de la volonté des candidats, a été suscité par un épisode de pollution que l’agglomération lyonnaise a subi pendant dix jours en mars.
Pour la première fois à Lyon et alors que l’agglomération a déjà subi de nombreux pics de pollution au moins aussi importants ces dernières années, les transports en commun ont été rendus gratuits tout un week-end, puis aux heures de pointe le lundi et le mardi suivants.
L’UMP s’est retrouvée à promouvoir des options très écolos, tout à coup, par la voix de son candidat UDI Christophe Geourjon, assurant avoir toujours milité pour la gratuité des transports lorsque le pic atteint le seuil d’alerte (on ne l’avait jamais entendu pour notre part).
Les écologistes auraient pu en profiter pour relancer leur propre campagne puisque, eux, en revanche, militent pour des transports gratuits toute l’année et la circulation alternée pendant les pics de pollution. Ils l’ont fait mais dans la roue des décisions prises par les autres villes de France. L’entre deux tours se prépare donc déjà, évidemment.
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