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Blog du taulard #10 : le détenu n’est jamais écouté, entendu, cru

Au commencement était le verbe. Et oui lecteur, la parole est vitale, créatrice et fondamentalement humaine. Si on la censure de manière récurrente on refuse à l’être son humanité en le désespérant. Et c’est exactement ce qui se passe dans les prisons : on prive l’individu de sa parole.

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Un Prisonnier romain (peinture 18e).

Un Prisonnier romain (peinture 18e).
Un Prisonnier romain (peinture 18e).

Presque incessamment le taulard n’est jamais écouté, entendu, cru. Ça commence avec les flics en garde à vue. Ils tiennent quelqu’un et qu’importent les protestations, il faut des chiffres, des résultats, ça fait des primes. Chez le juge ou au tribunal, dans la tête des magistrats, celui qui y est confronté cherchera seulement à nier, à minimiser, à se défiler de ses responsabilités, à se décharger sur d’autres. De toutes façons il n’est pas là par hasard.

Et lorsqu’il arrive en prison, les matons n’ont plus aucun gant à prendre, son sort est réglé. Il n’y a même plus besoin de vernis pour dissimuler le mépris dans lequel on l’a plongé. Les bourreaux peuvent se donner à fond. Aux quelques mots écrits, ils ne répondent pas, claquent les portes des cellules au nez, quand ils l’ont ouverte, crachent leur « non » avec délectation.

Et si tu te dis, lecteur, qu’ils ne sont pas tous comme ça, je ne peux que te rétorquer : l’exception confirme la règle. Ne te voile pas la face avec l’extrême minorité (1 pour 100). La maltraitance, avant d’être physique, elle commence par la négation de l’autre, le poussant au désespoir, ce cancer de l’âme. Les blessures sont à chaque fois plus grandes et plus profondes. Et tu peux croire, lecteur, Yasmina Khadra quand il affirme que les anges meurent de ces blessures pour devenir démon. Cette haine que subit le taulard dans ce lieu clos s’étend, se répand, comme un air empuanti qu’il respire, qui rentre par ses narines et lui envahit le cœur et le cerveau. A traiter les hommes comme des chiens, on en fait des loups.

 

Chauffé à blanc jusqu’au pétage de plombs

Alors, par voie de presse, les syndicats corporatistes peuvent gloser et se faire plaindre de la dangerosité de leur travail. C’est comme si le pyromane venait montrer ses brûlures pour s’acharner sur les allumettes et leur souffre.

Quand un journaliste fait vibrer cette fameuse ménagère de 50 ans et sert la soupe au politiques sécuritaires en faisant un article, neutre ou pas, sur l’agression d’un maton, jamais il ne cherche à en comprendre les ressorts. Mieux, il ne veut surtout pas savoir comment le taulard a été chauffé à blanc, poussé dans ses retranchements jusqu’au pétage de plombs. On ne dit jamais qu’il n’a fait que répondre à la violence par la violence car il n’a pas d’autre solution, sauf à ramper comme une larve.

Je sais, lecteur, que tu as du mal à me croire. Je sais déjà ton refus silencieux qui se cache derrière ton réflexe qui me qualifie d’excessif. Alors pense par exemple aux petits chefaillons que tu as déjà croisés, dans une administration, dans un quelconque service, et imagine-le dans un uniforme avec la garantie de ne presque jamais être sanctionné pour ses exactions. Là tu peux commencer à entendre que je n’exagère en rien. Je ne fais que parler droit.

 


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