Mercredi soir, la place Carnot a été prise d’assaut. Objectif : sensibiliser sur la situation sanitaire des personnes à la rue, toujours plus nombreuses avec la fin du plan hivernal. A la manière des Enfants de Don Quichotte durant l’hiver 2006, Médecins du Monde a déployé une banderole et investit de tentes la place Carnot, lieu symbolique de la pauvreté à Lyon. En un instant, une cinquantaine de personnes ont déployé leur tentes sous les slogans « pas de santé sans toit ni droits » et « nous soignons toutes les maladies, même l’injustice », créant la surprise parmi les passants. Les militants comptaient y passer la nuit à condition de ne pas être « délogés ».
Un peu plus tôt, dans l’après midi, l’association s’était installée place Antonin Poncet pour un événement de sensibilisation autour de la mission Bus de Médecins du Monde qui, deux fois par semaine, va à la rencontre des SDF de Carnot. Isabelle Prévost, responsable de la mission, s’« attend à un été difficile ». En effet, en cette période de « décélération », les hébergements d’urgences ferment les uns après les autres.
« Pour nous c’est d’autant plus de travail, alors que justement il y a d’autant moins de personnes dans les associations », relève Adélie Guillaume de Médecins du Monde.
Ces militants vont à l’encontre de l’idée selon laquelle les SDF seraient tirés d’affaire en été, après avoir subi le froid de l’hiver :
« On sait aujourd’hui qu’il y a plus de morts en été qu’en hiver. On a affaire à plus de pathologies, notamment respiratoires et à des déshydratation liées à un manque d’accès à l’eau », explique Isabelle Prévost.
La situation des personnes dormant en tente sous le tunnel du tramway de Perrache les préoccupe particulièrement. En effet, depuis juillet 2012, où un camp situé entre la gare et l’échangeur a été évacué, de nombreuses personnes n’ont pas eu de solution d’hébergement. Beaucoup sont restées dans le quartier. D’autres sont depuis arrivées place Carnot, qui est depuis de nombreuses années une porte d’entrée des migrations à Lyon.
Une partie de ces SDF de Perrache sont des demandeurs d’asile en provenance des Balkans. Alors que, de droit, ils devraient être hébergés par l’Etat, ils ne trouvent pas de place dans les centre d’accueil (CADA) saturés du fait d’un afflux de migrants plus important dans le Rhône que dans les autres départements de la région.
« Il y a aujourd’hui une tolérance relative de la part de la police, entre 23 et 6 heures, pour qu’ils dorment ici en tente. Le reste du temps, ils doivent remballer leurs affaires sous peine de se les faire embarquer », explique la responsable de la mission Bus.
Et s’ils dépassent de la zone tolérée, gare aux réprimandes. Si bien qu’ils sont aujourd’hui une centaine, dont quelque 40 enfants à dormir dans quelques mètres carrés de béton à l’entrée du tunnel du tramway.
« Notre ras-le-bol vient aussi du fait qu’il y a de plus en plus d’enfants et de femmes enceintes. Aujourd’hui, ce ne sont plus seulement les grands exclus qui se retrouvent à la rue mais aussi des familles, renchérit son collègue, Thierry Malzevin.
Médecins du Monde demande « simplement » aux pouvoirs publics de tenir leur engagements :
« Cécile Duflot avait dit qu’il n’y aurait pas de retour à la rue à la fin du plan froid. C’est pourtant ce qui se passe aujourd’hui, constate le responsable de la mission Bus. Et en plus, des centaines de personnes appellent tous les jours le 115 et se trouvent sans solution d’hébergement d’urgence alors que l’Etat a obligation de respecter ce droit à l’hébergement. »
Aller plus loin
Remise à la rue des SDF à Lyon : les 20 millions promis par Duflot envolés
Squat de Perrache : après l’évacuation, la politisation
A Lyon-Perrache, chroniques d’une enfance sans logement
Chargement des commentaires…