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Reconversion des prisons de Lyon : la mémoire sacrifiée ?

La reconversion des prisons Saint-Paul et Saint-Joseph à Lyon va entrer dans sa phase active. Mais le projet retenu ne convainc pas entièrement les défenseurs de la mémoire patrimoniale du lieu.

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VUE AERIENNE PRISON PERRACHE - LYON
Les anciennes prison de Lyon : en bas sur la photo, Saint-Joseph et, en haut, Saint-Paul © Pierre Augros / Maxppp

 

En ce mois d’août, le groupement formé par l’Université catholique de Lyon, Garbit et Blondeau Architectes, Habitat et Humanisme et l’Opac du Rhône, entre autres, va devenir propriétaire des prisons Saint-Paul et Saint-Joseph. Leur projet, appelé La vie grande ouverte, a remporté l’appel d’offres lancé par la préfecture pour la reconversion du site. Il prévoit un campus pour l’Université catholique sur Saint-Paul, des logements, des bureaux et des commerces sur Saint-Joseph. Les travaux débuteront en fin d’année.
Après le transfert en 2009 des prisonniers à la maison d’arrêt de Corbas, dans la banlieue est, la démolition des prisons de Lyon avaient un temps été envisagée. C’était sans compter la mobilisation des défenseurs du patrimoine :

  • Deux étudiants ont créé un blog.
  • Paul Raveaud, militant PS habitant le quartier et sensible à ces questions, a rédigé une pétition avec l’historien Bruno Benoît qui a recueilli 87 signatures.

Paul Raveaud explique :

« Il est important de garder des traces de l’histoire. On ne peut pas construire sereinement le futur sans cela. Et puis, Confluence arrivait au sud du quartier, qu’allait-il advenir du Nord ? Nous étions inquiets de voir la paupérisation grandissante de cette zone. Il fallait un projet qui tire tout le quartier vers le haut ».

 

Un patrimoine conservé « a minima »

Il faut dire que le complexe formé par les deux prisons représente un témoignage unique de l’architecture carcérale française du 19e siècle. Il n’existe en effet nulle part ailleurs en France la juxtaposition de ces deux styles et de ces 2 visions : Saint-Joseph, construite fin des années 1820 sur un plan en peigne et selon une philosophie empreinte des Lumières ; et Saint-Paul, construite en 1860 sur un plan panoptique, à une époque où l’enfermement devait faire expier les fautes.
D’où un appel d’offres précisant les parties de chaque prison qui doivent être conservées et celles qui peuvent être modifiées ou démolies. Or, pour les défenseurs des prisons, le projet retenu ne va pas suffisamment loin sur ce point. C’est l’avis de Bernard Bolze, fondateur de l’Observatoire international des prisons (OIP), qui a lui-même passé trois mois à Saint-Paul :

« Le projet respecte a minima les exigences du cahier des charges. Il ne prévoit pas de garder davantage de bâtiments. Ainsi le bâtiment H de Saint-Paul, emblématique de la prison, avec ses 3 étages et ses coursives, ne sera pas conservé ».

 

vue aérienne des 2 projets-3

Vue des deux projets. En bas lîlot Saint-Paul; en haut, l’îlot Saint-Joseph © La Vie Grande Ouverte

 

« Ouvrir le site sur le quartier »

A Saint-Paul seront conservées la rotonde centrale, symbole de la prison, et sa chapelle. A Saint-Joseph, le bâtiment Baltard, le bâtiment d’administration, une partie des murs d’enceinte seront conservée, tout comme le portail d’entrée ainsi que la chapelle. Des galeries permettront au public de traverser les deux prisons, de la place des archives au quai Perrache.

« Mais elles seront fermées en soirée, regrette Paul Raveaud. On pourrait y organiser des évènements culturels, notamment à la belle saison, pour faire vivre le lieu et l’ouvrir sur le quartier ».

Bernard Bolze aurait également souhaité faire du site un lieu d’échanges et de connaissance sur son passé :

« On pourrait imaginer des conférences sur ce qu’était la vie en prison, des expositions, des rencontres. Il faut que le public se réapproprie le site. Autrefois, on ne franchissait pas les voûtes, qui délimitaient le quartier. Il était insalubre et faisait peur. Les représentations sont restées. Le regard doit changer avant que ça ne disparaisse ».

A défaut, une vieille demande des riverains a été entendue : les prisons seront ouvertes au public pendant les Journées du patrimoine, avec un parcours balisé.

 

Le logement intermédiaire oublié

Le projet a tout de même des points positifs, reconnaissent-ils. Et notamment la mixité des publics accueillis et des usages. Ainsi juge Paul Raveaud :

« L’Université catholique, c’est très bien. Il y aura de la vie avec les étudiants. Habitat et Humanisme et un centre de l’économie sociale et solidaire, cela va dans le bon sens. Cela rappelle le côté humaniste de la ville. »

En revanche, il manque du logement intermédiaire. La fourchette des prix va en effet de 6213 euros le m2 pour un appartement de 27.20 m2, à 8299 euros pour un appartement de 95m2. Loin de la moyenne observée sur le 2e arrondissement de Lyon, autour de 3700 euros selon les sites spécialisés. C’est le bémol que soulève Paul Raveaud :

« Les logements à vendre sont trop chers. Cela va exclure une partie importante de la population. On aurait peut-être pu faire en sorte que les prix ne suivent pas ceux du marché».

 

 

 


#Perrache

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