Le président de l’Oeuvre française, Yvan Benedetti, quelques minutes avant son interpellation © Alexander Roth-Grisard / Maxppp
Ce samedi matin, le tribunal administratif de Lyon, saisi en référé, a rejeté le recours des organisateurs « de la révolte des souchiens contre le racisme anti-blanc » et a donc confirmé la décision du préfet d’interdire la manif d’extrême droite nationaliste de ce samedi.
Présent à l’audience, le leader des Jeunesses nationalistes, Alexandre Gabriac, est resté injoignable toute la journée. Il serait parti « hors de Lyon », selon plusieurs sources policières.
Les nationalistes défient « le système »
Le coup semble avoir été finement préparé. Absent, Alexandre Gabriac a laissé la direction des troupes à son mentor Yvan Benedetti, le président du parti pétainiste l’Oeuvre française, lui aussi récemment exclu du FN. Sur le site Internet des Jeunesses nationalistes, Gabriac n’a pas modifié l’appel à venir se rassembler à 14h30, place Guichard, lieu originel du départ de manifestation, pourtant interdite.
Résultat, à l’heure prévue, une petite centaine de personnes (selon la police) est venue progressivement sur le lieu du rendez-vous.
Cueillis par un imposant dispositif policier autour de la place (une vingtaine de camions de CRS, un hélicoptère et un canon à eau), les manifestants ont tous été contrôlés. Puis ils ont pu repartir, une demi heure plus tard, le temps de procéder aux vérifications.
Peu après le début de ces contrôles, vers les 14h45, Yvan Benedetti rassemblait une cinquantaine de fidèles d’extrême droite dans le hall de la gare Part Dieu.
Comme le rapporte l’AFP (via lepoint.fr) , Il a pu prendre la parole pendant une dizaine de minutes d’une haut d’un escalier conduisant à des quais, à côté d’une banderole sur la « Marche des souchiens » :
« Nous sommes ici pour dénoncer une forfaiture. Nous voulions défiler pacifiquement. Les Français sont interdits de parler chez eux. Aujourd’hui, c’est l’étranger qui fait la loi chez nous (en faisant allusion une manifestation en soutien au peuple syrien autorisée samedi à Lyon, ndlr ».
Le slogan « Bleu blanc rouge, la France aux Français » a ensuite été crié.
Après une bousculade, la BAC est intervenue pour les repousser devant l’une des entrées de la gare.
Le chef Benedetti gazé et interpellé
Entourée de CRS et de membres de la BAC, le petit groupe a scandé son slogan favori pendant que Yvan Benedetti répondait à quelques journalistes.
Les entretiens radio et télé réalisés, le chef a montré qu’il était le chef. En première ligne, nous l’avons vu tenter de forcer, avec quelques fidèles, le barrage de police. Sans grand espoir de passer. Conséquence de son acte, les CRS l’ont repoussé en aspergeant le groupe de gaz lacrymogène.
Surtout, leur interpellation ne faisait plus aucun doute.
Une première a eu lieu. Puis un quart d’heure plus tard, par groupe de cinq à dix personnes, les policiers ont emmené les nationalistes vers des cars. Direction l’hôtel de police.
En traversant le parvis de la gare, les plus hardis reprenaient encore leur slogan favori (pour mémoire : « Bleu blanc rouge », « La France aux Français »). « Facho », leur répondaient les badauds de plus en plus nombreux à regarder le spectacle et à les insulter.
Le dernier a être emmené était le chef, Yvan Benedetti, qui a pu lancer à une caméra qui était à sa proximité : « bientôt on reviendra. On est maître chez nous ».
Yvan Benedetti lors de son interpellation à la gare Part Dieu © Hassen haddouche/filtrages
69 interpellations, des couteaux et barres de fer
Au total, à l’heure où nous écrivons ces lignes, 69 personnes ont été interpellées (70 avaient été annoncées en milieu d’après-midi). Essentiellement à la Part Dieu. D’autres ont été interpellées dans d’autres quartiers de Lyon, notamment dans le Vieux Lyon. Motif : attroupement interdit. A minima.
D’après le préfet délégué pour la défense et la sécurité, Jean-Pierre Cazenave-Lacrouts, cité par l’AFP (via liberation.fr), des manifestants ont été arrêtés portant «des fumigènes ou des couteaux dans leur sac à dos», d’après M. Cazenave-Lacrouts.
Selon lui :
«certains vont faire l’objet d’une vérification d’identité et d’autres seront placés en garde à vue pour des infractions plus graves que leur participation à un attroupement».
Il vise ceux qui portaient « couteaux ou barres de fer » et ceux qui ont commis des «violences sur agent de la force publique».
A la suite des interpellations, 58 personnes ont été placées en garde à vue.
Pétain, Mussolini et le discours des martyrs
Présents devant la gare, une vingtaine de militants et sympathisants d’organisations nationalistes n’ont, eux, pas été interpellées. Car ils n’ont pas participé au déploiement de la banderole, nous expliquait notamment un policier.
Pour autant, ça ne les aurait pas dérangé de finir en garde à vue.
Cédric est venu du Var avec quatre autres personnes. Il est le meneur d’un micro groupe des Jeunesses nationalistes dans son département. Il nous parle du « Panthéon nationaliste » en citant le Maréchal Pétain, le fasciste espagnol Diego Primo de Rivera ou encore Mussolini. Il évoque le « sang que sa famille a versé pour la France ». Et pour finir, il commente la situation actuelle :
« Si l’adversaire veut que cinquante personnes finissent en garde à vue. On le fera. ça ne nous arrêtera pas ».
Steven Bissuel, l’un des jeunes responsables du GUD Lyon est venu également applaudir les interpellés. Même combat, la garde à vue ne le dérange pas :
« Tant que c’est pour notre combat, ça ne pose pas de problème. La manif des rebelles syrien a été autorisé. Pas la nôtre alors que nous défendons la France charnelle. »
Selon la police, près de 200 personnes sont venus ce samedi à Lyon pour tenter de manifester. Ils étaient 280 lors de leur première manifestation le 14 janvier dernier. Ils seraient notamment arrivés de Suisse, de Nantes, de Grenoble ou encore de Paris.
Certains étaient déjà présents vendredi soir pour le concert du groupe de « celtic punk » Dropkick Murphys au Transbordeur, à Villeurbanne.
Samedi, vers 19h, une quinzaine de personnes a sillonné rapidement les rues du Vieux Lyon, quartier dont l’extrême droite veut faire son fief. Elles ont crié, encore, leur slogan favori. Elles n’ont pas été interpellées.
Les nationalistes libérés après, en majorité, des rappels à la loi
Selon l’AFP qui cite des sources policières et judiciaires (via liberation.fr), la majorité des militants et sympathisants d’extrême droite arrêtés ont été relâchés entre samedi soir et dimanche midi, après une garde à vue.
une majorité d’entre eux ont écopé d’un rappel à la loi.
Trois seulement ont passé la nuit en garde à vue. Parmi eux, le chef de l’Oeuvre française, Yvan Benedetti. Ils ont été relâchés dimanche à la mi-journée.
Toujours selon l’AFP, une décision sera prise ultérieurement sur d’éventuelles poursuites, a indiqué la source judiciaire, précisant que l’enquête se poursuivait.
Le dernier militant en garde à vue, qui avait lancé samedi à la gare une canette en direction des policiers, a reçu dimanche un rappel à la loi puis a été libéré.
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