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Affaire Neyret : David Metaxas, l’avocat « du milieu lyonnais » mis en examen

« Je suis surpris qu’il n’ait pas été arrêté en même temps que Michel Neyret ». Les langues se délient au lendemain du placement en garde à vue de David Metaxas, dont plusieurs confrères pénalistes avaient dénoncé les méthodes auprès du conseil de l’ordre. Le jeune avocat lyonnais qui traînait une réputation sulfureuse a été relâché ce jeudi après avoir été mis en examen pour des faits de « recel de violation de secret professionnel ». David Metaxas a été entendu mardi matin à Lyon par l’IGPN, la police des polices, sur « l’affaire Neyret », dans laquelle il pourrait être impliqué, avant d’être transféré dans la nuit de mardi à mercredi à Paris pour être auditionné par les magistrats en charge de l’instruction. (Article modifié le 22 mars)

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Crédit photo : Maxppp / Juste Philippe pour le Progrès.

Comme nous l’annoncions au lendemain de sa garde à vue, c’est Alain Jakubowicz qui assurera sa défense. Pour lui :

« Cette garde à vue ne méritait pas tout ce tintamarre, au vu de la qualification : « recel de violation de secret professionnel ». On a monté toute une opération, qui d’ailleurs ne le vise pas lui mais vise Michel Neyret. Quand on voit tout ce qui a été écrit, tout ce qui a été dit, par les confrères notamment, certains doivent être bien déçus. C’est une montagne qui accouche d’une souris. Je vais prendre connaissance de tout cela sereinement, très calmement. »

C’est justement chez Alain Jackubowicz, par ailleurs président de la Licra, que David Metaxas a démarré sa carrière, il y a quelques années. Ambitieux, presque enragé, David Metaxas a très vite considéré qu’il pouvait se lancer seul avec l’aide, malgré tout, d’un aîné, et pas des moindres, un « ténor » du barreau, François Saint-Pierre, qui le loge un temps dans son cabinet. Avant de le mettre dehors, « à coups de pied au cul », raconte-t-on.

David Metaxas a en effet ce caractère « irritant », selon le qualificatif de la vice-bâtonnière du barreau de Lyon, Frédérique Penot Paoli, qui reste mesurée en comparaison des termes fleuris employés par d’autres confrères. Une enquête déontologique relative à David Metaxas est d’ailleurs en cours depuis de nombreux mois, portant sur deux qualifications tenues secrètes, qui concernent des conflits avec des confrères.

Mais Frédérique Penot Paoli précise : « cela n’a rien à voir avec l’affaire Neyret », pour laquelle le jeune avocat se trouve désormais à Paris, dans l’attente d’être auditionné par les deux juges d’instruction qui travaillent sur le dossier de l’ex-numéro 2 de la police judiciaire de Lyon, en détention provisoire depuis octobre 2011, pour des faits de « corruption » et de « trafic de stupéfiants ».

 

« Mieux vaut ça plutôt qu’on retrouve son corps dans le coffre d’une voiture »

Le jour où l’interpellation de Michel Neyret est révélée par la presse, David Metaxas est déjà sur le devant de la scène. Le « plus grand flic de France » est mis en examen. Le jeune avocat lyonnais prend presque immédiatement la parole, affirmant avoir été sollicité par le commissaire pour assurer sa défense. Et Metaxas apparaît très satisfait de pouvoir être catégorique : hors de question pour lui de défendre Neyret.

A certains journalistes, il dit les pires horreurs sur le policier, à d’autres il en parle comme d’un « ami » qu’il ne peut défendre pour des raisons professionnelles (conflit d’intérêt avec des clients), et « personnelles ». Metaxas souffle le chaud et le froid, et semble toujours parler trop vite.

 


Metaxas dénonce les méthodes de la police par BFMTV

Aujourd’hui, l’avocat est mis en cause par des écoutes téléphoniques, qui traduisent une proximité avec Michel Neyret et présument une implication dans les faits pour lesquels le policier est mis en examen. Le nouveau procureur de la République, Marc Cimamonti, arrivé très discrètement il y a quelques semaines pour remplacer Marc Désert, a aussi posé sa marque dans le processus d’enquête.

« Un avocat pénaliste est potentiellement toujours très exposé, surtout quand il décide d’orienter sa carrière vers le grand banditisme », souligne Frédérique Penot Paoli.

Entre deux eaux, « sur la ligne » selon la vice-bâtonnière, David Metaxas roulait des muscles à la façon d’un caïd, mais a aussi pu être affublé du surnom de « facteur » par certains délinquants, qui estimaient qu’en faisant appel à lui, ils pourraient faire circuler des messages en dehors des lieux de détention.

D’une part David Metaxas aurait frayé avec des gangsters dont il aurait voulu s’assurer la fidélité, d’autre part il aurait manqué à sa mission professionnelle. Plusieurs pénalistes affirment avec beaucoup d’agacement que nombre de clients de Metaxas lui étaient envoyés par Michel Neyret. Des relations troubles, une posture d’agent double voire d’agent triple : l’avocat pourrait risquer gros, aussi bien du côté de la Justice que du côté des délinquants. « Mieux vaut qu’il se soit fait arrêter par la police plutôt qu’on ait retrouvé son corps dans le coffre d’une voiture », estime même un avocat.

« Il est fini professionnellement »

François Saint-Pierre veut rester prudent. L’affaire Neyret est « compliquée et toujours en cours d’instruction », rappelle-t-il, tout en observant navré la situation de David Metaxas :

« C’est un garçon qui était brillant, qui pouvait être très sympathique. Compétent et motivé quand il s’est installé. Mais on ne triche pas avec les règles du barreau. C’est ce qui l’a conduit dans des chemins de traverse. C’est un gamin qui n’a pas anticipé la dureté de la chute. »

Mondain, fêtard, adoptant avec un plaisir d’enfant une attitude et un vocabulaire de margoulin, David Metaxas n’hésite pas à se montrer dans des clubsaux côtés de quelques loustics de la place lyonnaise. Un journaliste de Lyon Capitale avait déjà évoqué son nom dans un article relatif à l’affaire Neyret, et David Metaxas avait peu goûté la citation. Depuis, régulièrement, l’avocat a versé dans la tentative d’intimidation.

David Metaxas tient par ailleurs à jour sur son Facebook un « crime book » qui recense de nombreux articles de presse relatant des faits divers. Toujours par le biais du réseau social, il règle des comptes, envoie des messages salés :

« Je réponds à quelqu’un qui se reconnaîtra: Je suis un p… d’Avocat et je ne défends pas toujours la bonne cause, trafiquants de drogues, braqueurs, bad boys en tout genre… Mais, écoute bien… Je préfère me pendre et rendre ma robe, plutôt que de défendre un pédophile ou un violeur, quand bien même t’es prêt à payer des millions….

Il y a plein d’autres confrères, prends les eux., ils sont meilleurs que moi.. Et prie très fort pour que ta victime ne me choisisse jamais, parce que moi, je te défoncerai à l’audience, façon que tu n’as jamais imaginée. On va en reparler très vite dans quelques jours. Je persiste et signe. »

Dès le début de sa carrière, David Metaxas est l’avocat de nombreuses affaires médiatiques, se prêtant volontiers au jeu des interviews, passant lui-même des appels. A l’ouverture de son cabinet, il envoie ainsi des communiqués à toute la presse locale, accompagnés de photos de lui, posant avec un air déterminé. « Il est fini professionnellement », juge désormais l’un de ses mentors.

« Il est irritant, oui, répète Frédérique Penot Paoli, mais ça ne fait pas de lui un coupable. Il bénéficie de la présomption d’innocence. »

Les avocats sont d’accord sur un point aujourd’hui : ce nouveau rebondissement du feuilleton Neyret jette le discrédit sur leur profession et donne une pâle image du barreau lyonnais.


#David Metaxas

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