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C’est bien beau d’être artiste #5 : Ivan Gouillon

Avec un nom qui claque comme le sien, Ivan Gouillon ne pouvait pas faire autre chose qu’un job « public », du type comédien. Pas actor studio, mais plutôt artiste qui tâte de la planche, qui se déplace dessus avec l’aisance d’un danseur peu timide. Et ce qu’on ne peut pas lui ôter, à Monsieur Gouillon, c’est son à-propos.

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Poker face / Il en faut quand on est (l’un des meilleurs) comédiens de la Lily, ligue d’improvisation lyonnaise. Sa rencontre avec la compagnie Thearte lui a fait endosser le costume de Christian Gilbert, le présentateur moulé dans un sous-pull marron, de Pressing, un talk-show monté au gré de l’actualité.

Il s’est retrouvé chaque week-end dans ce costume élastomère au Lavoir, à Lyon. Il a bien voulu répondre à notre questionnaire « Orgueil et préjugés ».

Votre premier geste artistique ?

Entre 1976 et 1978 je ne sais plus exactement.
A l’occasion d’un repas de famille, j’ai joué au foot, à poil, sous la pluie en plein mois de décembre avec mon cousin. Il est plus qu’évident que nous avons à faire, dans ce cas précis, à une vraie prise de risque, non seulement artistique, mais aussi politique. En effet si l’on prend en compte les conditions météorologiques, d’une part et l’autorité parentale bafouée, d’autre part, on peut s’accorder à penser qu’il s’agit bien là d’une entrée triomphante et de plein pied, dans l’expression contestataire par le truchement d’un acte incongru et cependant résolument artistique.

 

Avec lequel de vos parents pensez vous avoir un problème ?

D’une certaine façon, probablement avec les deux. Mais par « problème », j’entends plutôt la définition arithmétique du mot, à savoir une question, une énigme, qui logiquement propose une solution. De ce point de vue, je pense que c’est ce type de « problème », que j’ai pu rencontrer avec mes deux parents : une suite de questionnements, d’interrogations parfois sans réponse. Je trouve ça passionnant. Il faudrait ne jamais penser de quelqu’un, qu’on en a fait le tour. Il subsiste toujours des zones d’ombre à éclairer. Ou pas.

 

Quelle pratique artistique trouvez-vous intolérable ?

Une certaine catégorie de spectacles dits « jeune public » me paraissent, trop souvent être l’œuvre d’authentiques imposteurs, qui semblent s’être fixé pour principe de base, de prendre nos enfants pour des demeurés, en leur proposant des spectacles moisis, d’une niaiserie affligeante. Si l’on considère que la durée moyenne (30 minutes), d’une prestation « jeune public », est inversement proportionnelle au nombre de représentations possibles, par rapport aux réseaux ciblés, écoles, médiathèques, etc. Alors on imagine aisément le bénéfice effectué par les dits artistes, que je qualifierais, personnellement, d’escrocs. L’indigence culturelle semble avoir encore de beaux jours devant elle et pas seulement à la télévision.

 

Quelle est pour vous la plus grosse arnaque artistique ?

Je serais tenté d’aborder un sujet épineux, à savoir : l’œuvre de  l’excellent Justin Bieber, mais j’aurais l’impression de tirer sur une ambulance. En même temps, si je dis qu’Edith Piaf c’était pas elle qui chantait en vrai, c’est un peu gratuit et en plus, je n’ai aucune preuve de ce que j’avance. Je me bornerai donc à vilipender succinctement l’ensemble des comédies musicales françaises produites ces dix dernières années, son cortège de bellâtres et de chanteuses à voix ainsi que la récupération honteuse de thèmes dits « universels », pour mieux vendre la soupe au tout venant.

 

Votre pire souvenir sur scène

Un spectacle joué il y a quelques années. J’ai compris trop tard sur les dernières répétitions, que ce que nous faisions n’était ni fait ni à faire. Par amitié ou par lâcheté ou les deux, je n’ai rien osé dire, tout en sachant que nous allions droit dans le mur.
Comme prévu, les dix jours de représentations furent dix jours de bides.
Après quelques bons succès, ce genre d’épisode a le mérite de remettre les idées en place.

 

Quelle personnalité politique prendriez vous pour faire la com. de votre travail ?

S’il était encore en vie, Henri Krazucki, pour l’humour, l’absurde, le sens de l’improvisation, le décalage, les idées, le mec.

 

Le dernier produit culturel consommé ?

Un album de « Public Image Ltd » : The greatest hits, so far, un live du Brian Setzer Orchestra, Gil Scott-Heron : I’m new here.
Un livre « Une vie dans le parti des Black Panthers » de Moumia abu jamal.

 

Avez-vous déjà sacrifié votre art pour de l’argent ?

Il m’arrive de faire de « l’alimentaire », j’essaie toujours, cependant d’y trouver mon compte, financièrement et artistiquement. C’est aussi ce qui me permet de continuer à faire mon métier sereinement.

 

Et sinon vous avez un vrai métier ?

Père au foyer.


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