Seuls 51% des cours d’eau du grand Sud-Est ne sont pas pollués, nous dit l’Agence de l’eau Rhône-Méditerranée et Corse dans son rapport, rendu public le 6 décembre dernier. Mais cette agence de l’Etat ne se contente pas de faire la liste des polluants que l’on peut trouver dans les rivières, fleuves, lacs et autres nappes phréatiques. Elle met en avant deux causes essentielles sur lesquelles il semble urgent d’agir.
1/ Le Round-up dans trois-quarts des cours d’eau
C’est le pesticide le plus répandu dans les rayons des supermarchés et dans les nappes phréatiques. Au lieu de le nommer par son nom barbare, le glyphosate, l’Agence précise bien qu’il s’agit de la substance active du Round-up, fabriqué par le chimiste Monsanto.
Il est tellement omniprésent dans les cours d’eau que l’Agence n’a trouvé que cinq points où il n’était quasiment pas décelable.
L’association de défense de l’environnement de référence sur le sujet, la Frapna, enfonce la porte ouverte par l’Agence de l’eau, par la voix de son responsable « eau », Jacques Pulou :
« Il faut aller jusqu’à l’interdiction du Round-up ».
Problème, note le rapport : même interdits, des pesticides se retrouvent dans les cours d’eau : dans 60% des rivières et 45% des nappes, on en a retrouvés six, dont l’atrazine.
« Alarmant » écrit l’Agence :
« Leur présence dans les eaux courantes est la preuve d’un usage actuel, bien qu’illicite. (…) La présence de pesticides est d’autant plus préoccupante que l’on observe aucune évolution significative à la baisse ».
Insistant sur les pesticides, le rapport est moins alarmiste sur les autres micropolluants. Les niveaux de concentrations de PCB mesurés « ne sont pas très élevés ».
L’Agence de l’eau pointe toutefois les pollutions liées aux hydrocarbures et aux micropolluants d’origine industrielle, localisés en aval des sites spécialisés dans la fabrication du chlore. Sont notamment cités la Vallée de la chimie dans le Sud de Lyon et Saint-Auban (Alpes de Haute-Provence) qui abritent deux usines du groupe Arkema.
2/ Le « coupable », c’est le béton
Pour absorber la pollution ordinaire, notamment les résidus d’hydrocarbure, il faut un éco-système des cours d’eau le plus proche possible de l’état naturel. Idem, si l’on veut avoir une faune et une flore diverses. C’est ce qu’on appelle le « bon état écologique ».
Or, l’artificialisation des rivières est « coupable » du mauvais état écologique, souligne le rapport :
« Parmi les rivières en mauvais état écologique deux tiers ont subi de graves déformations physiques (débits modifiés, construction de seuils, de barrages ou de digues). Les poissons, comme les truites, ne peuvent plus se reproduire dans ces conditions ».
Ce constat et les recommandations de l’Agence ont fait bondir de joie les écologistes de tous poils. C’est la première fois que le bétonnage des cours d’eau est autant mis en avant dans une communication de cette agence de l’Etat chargée de l’environnement. « Mis sur la sellette », selon les termes du communiqué de presse.
La Frapna a même repris à son compte les recommandations de l’Agence :
- supprimer ou aménager les seuils
- reméandrer les cours d’eau
- renaturer les berges et les anciens bras morts
C’est la « nouvelle priorité » pour atteindre en 2015, selon les engagements du Grenelle de l’Environnement, 66% des cours d’eau en bon état écologique.
« Ce sera très difficile, pronostique Jacques Pulou de la Frapna. Ce n’est pas une question financière car l’Agence dispose d’un budget de plusieurs dizaines de millions d’euros pour subventionner des projets. Mais il faut changer les mentalités pour que des porteurs de projets émergent sur cette question. C’est autant les services déconcentrés de l’Etat que les collectivités qui doivent s’y mettre ».
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